Radiohead – The Bends (1995)

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Radiohead est l’archétype même de l’artiste qui évolue constamment. Peu de groupes, peut-être aucun, ne l’a fait autant et aussi bien. En quatre articles, je vais tenter de décrire ce qu’ils ont fait en une dizaine d’années, pendant lesquelles ils sont devenus l’artiste le plus inspirateur depuis que Robert Johnson a rencontré Satan.

On passera le premier album, Pablo Honey. Il n’est certes pas du tout dénué de qualités, mais il pâtit de la présence de Creep, morceau emblématique et rejeté maintes fois par ses concepteurs. De plus, l’album suivant, The Bends est peut-être le plus grand album à guitares jamais réalisé. C’est d’ailleurs difficile à comprendre, quand on sait que le groupe a quasi eliminé toute guitare de l’album Kid A, mais il faut dire qu’après The Bends, il n’auraient pas pu continuer dans ce style : la perfection ne peut pas être améliorée.

L’album commence doucement, avec Planet Telex tout en délai de guitares, comme un Edge sous stéroïdes, et des couches de claviers, qui ne sont que la première étape de processus de mutation. Comme tous les morceaux de Radiohead, la base basse/guitare est très importante. Versatile, la paire Colin Greenwood/Phil Selway n’a que très peu d’égal, il faut chercher loin pour en trouver (Chancellor/Carey, peut-être). Mais ce sont les guitares qui fount tomber tout le monde. Thom Yorke, Ed O’Brien et Jonny Greenwood y participent tous trois, avec des talents et des rôles différents, Greenwood étant le manipulateur en chef, rôle qui ne fera que s’accroître avec le temps. The Bends, le morceau titre est simplement parfait, et plus loin, les différentes guitares de Just sont admirables, y compris un solo injouable et complètement étrange. Ces deux morceaux, avec le post-grunge Bones, forment l’épine dorsale bruyante de l’album, et en fait les derniers gros morceaux rock jamais composés par le groupe. Comme évoqué plus loin, ils en avaient fait le tour.

Le reste de l’album est remarquable : des morceaux d’une pureté totale comme High And Dry, (Nice Dream) ou Street Spirit (Fade Out) ont forcé la création de trois millions de groupes, dont Coldplay. Merci, les gars… My Iron Lung, qui est en fait sorti en EP pile entre les deux albums, se moque ouvertement du succès de Creep, en reprenant sa base mélodique et en ajoutant des paroles comme "This is the new song / Just like the old one / A total waste of time. Parce que Yorke fait dans l’humour noir, quand on arrive à percer le mystère de textes qui, c’est vrai, sont encore compréhensibles. De même, il chante très bien, et arrive à transporter tout un spectre d’émotions dans un seul couplet. Tout cela va aussi évoluer, on le verra.

 
On parlait de Coldplay tout à l’heure, mais Black Star, vers la fin de l’album, a crée Muse, exactement comme Tomorrow Never Knows a crée la musique électronique. Enfin, Street Spirit (Fade Out), qui clôture l’album, est une des plus belles ballades jamais écrites. Immerse your soul in love… Il faudra attendre douze ans, et le tout nouveau In Rainbows, pour que Radiohead retrouve ce type d’ambiance. Ce qui ne veut pas dire que les quatre albums suivants ne valent rien, bien au contraire : OK Computer sera encore plus important que celui-ci.

The Bends reste un album exceptionnel, d’un groupe exceptionnel. Même si on ne comprend pas, ou si on n’adhère pas à leurs changements de style à venir, la perfection (oui, perfection) de l’album est difficile à nier. C’est un des meilleurs albums jamais réalisés, surtout au point de vue guitaristique.

The Bends

Street Spirit (Fade Out)

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