Vampire Weekend – Contra


Début 2008, Vampire Weekend sort son premier album, et secoue le petit monde du Pitchforkrock avec un ovni aux influences originales, ou en tout cas peu revendiquées. Malgré une sortie fort tôt dans l’année, l’album arrive sans peine à se hisser au sommet des listes de fin d’année, et c’est donc finalement sans trop de surprise que le quatuor new-yorkais nous envoie la suite de son oeuvre, après deux ans quasi jour pour jour.

On le sait, il n’existe pas trente-six manières de suivre un premier album, a fortiori quand il fut remarquable et remarqué. On peut faire comme le premier, mais forcément en moins bien : les exemples abondent, mais on cite souvent les Strokes comme cas d’école, même si Room On Fire n’est pas mauvais du tout. On peut aussi tenter de se réinventer, comme le Primary Colours des Horrors. Mais les groupes intelligents essaieront de tout avoir en même temps : renouveler leur son tout en gardant ce qui a fait le succès du début, leur identité. Arctic Monkeys l’aura fait (deux fois!) et Vampire Weekend est à ajouter à la liste. Car Contra, c’est ça : clairement le second album de Vampire Weekend, le seul groupe estival à sortir ses albums en janvier mais avec pas mal d’évolution sonore, notamment grâce à deux techniques souvent utilisées pour un second album, l’importance accrue de l’électronique et un ton plus posé, plus subtil.

Rostam Batmanglij, le producteur/guitariste/claviériste est la tête pensante du groupe, et c’est sous son influence que Vampire Weekend a remplacé pas mal de ses percussions organiques par des beats electro qui font tout de suite penser aux expériences de Radiohead sur Kid A. Assez froides, ces rythmes contrastent avec l’ambiance généralement estivale et optimiste qu’on associe avec le groupe, mais étonnamment, le mélange prend : Horchata, morceau d’entrée d’album, donne tout de suite le ton. La boîte à rythme ne remplace pas le métronomique Chris Thomson, mais le complète, et le fait assez bien, surtout que la mélodie au marimba est irrésistible.

De même, l’album est nettement moins immédiat que le premier, et aussi plus varié. Holiday et Cousins sont aussi rapides que n’importe quel ancien morceau, mais c’est plutôt le calme et l’atmosphère qui prédomine ici. Comme s’il ne fallait pas détourner l’attention du soin porté à la fabrication des morceaux, nettement plus subtils et produits qu’auparavant. Il faut en effet plusieurs écoutes pour percevoir des nuances qu’on aurait difficilement pu associer avec le Vampire Weekend première période. On a encore des cordes, mais elles sont juste un élément de plus dans la construction de California English, morceau basé sur les textes érudits (parfois à l’excès) d’Ezra Koenig et qui se permet même un passage à l’autotune. Mais on ne cherche pas à faire du bruit, on expose, on pousse l’auditeur à écouter soigneusement. Taxi Cab est un parfait exemple, avec une basse menaçante, un beat répétitif et différentes couches mélodiques qui se suivent et se superposent, le tout saupoudré par la voix de Koenig qui sonne plus Lou Reed que Paul Simon. Juste après, Run se la joue très synthétique, sans être impersonnel.

Pourtant, le groupe aime continuer à surprendre : aux deux tiers de l’album sont nichés les deux morceaux les plus évidents, le remuant Cousins et Giving Up The Gun, qui pourrait être le morceau qui leur ouvrira les portes du succès commercial, grâce à une production claire et une ambiance générale assez Strokes, sans la voix murmurée. Après cela, VW prend forcément la tangente, avec les six minutes de Diplomat’s Son qui pourrait, quant à lui, être leur meilleur morceau, notamment grâce à la succession parfaite d’un break 8-bit suivi du même, mais exécuté au piano, le tout sous un sample hypnotique de MIA et une prestation vocale élastique. Enfin, le synthétique I Think Ur a Contra clôture calmement un album vraiment intrigant, avec une métaphore assez folle (l’opposition Sandinistes/Contras comme symbole d’une relation amoureuse tumultueuse).

Je n’étais pas conquis du tout après la première écoute, mais j’avais sans doute tort. Vampire Weekend, pour moi, était un groupe immédiat, à consommer immédiatement en cas de déprime, le temps d’esquisser un large sourire. Mais non, Vampire Weekend vaut plus, et mieux que ça. Contra est un album qui réussit quelque chose de très rare : il élargit tellement le son du groupe qu’il empêche toute comparaison avec leur début. Il n’est donc pas meilleur ou moins bon, mais par contre, le groupe, lui, est nettement meilleur qu’en 2008. Et réussira encore à se rappeler à notre souvenir dans onze mois. Impressionnant, une fois de plus.

8 réflexions sur « Vampire Weekend – Contra »

  1. comme vous aimez cet album, je vais l'eviter et continuer a ecouter ce que vous critiquer 😉

  2. comme vous aimez cet album, je vais l'eviter et continuer a ecouter ce que vous critiquer 😉

  3. Je dirais peut-être écouter encore un autre morceau ou deux, et s'ils ne vous plaisent pas non plus, ce n'est pas bien grave, ce ne sont pas les autres albums qui manquent 😉

  4. Je dirais peut-être écouter encore un autre morceau ou deux, et s'ils ne vous plaisent pas non plus, ce n'est pas bien grave, ce ne sont pas les autres albums qui manquent 😉

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