Archives de catégorie : Music Box

Chroniques d’albums contemporains

Slash – Slash

Parfois, je me surprends à manquer de curiosité, à ne plus tenter de découvrir de nouvelles choses, de nouveaux artistes comme je pouvais le faire auparavant. Contrairement à ce qu’on pourrait croire, ce n’est pas parce que 2010 manque de nouveaux artistes : une preuve irréfutable est cet album, le premier d’un guitariste anglais prometteur, Saul Hudson, qui a adopté l’amusant sobriquet de Slash. Trève de plaisanterie même pas drôle, Slash est effectivement son premier album solo, après quelques Guns ‘N Roses, Slash’s Snakepit et Velvet Revolver. Slash a choisi une approche similaire à Tony Iommi il y a quelques années : inviter un vocaliste différent pour chaque morceau, et sans doute espérer que cela marche aussi bien. Le résultat est mitigé, et l’album ressemble plus à un compile qu’à quelque chose de cohérent, mais il faut être honnête : c’était sans doute le but.

Slash sait que c’est son album. Il profite autant que possible de ne pas avoir un chanteur à l’égo surdimensionné qui lui pique la vedette. Ian Astbury (The Cult) ouvre l’album assez joliment, mais c’est l’évidente Les Paul du chevelu qui est la star ici, surtout qu’elle est carrément double-trackée. Histoire qu’on ne la loupe pas. Tant qu’on parle de trucs de studio, le morceau suivant est chanté par Ozzy. Et c’est là qu’on se rend compte que l’auto-tune a été inventé pour Ozzy. Sauf qu’il est tellement à la masse ces jours-ci qu’il a probablement fallu mettre les réglages très haut, et qu’il ne sonne plus du tout comme un être humain. D’un autre côté… Si quelqu’un a osé écouter son dernier album solo, qu’il me dise si c’est un peu plus écoutable.

La suite n’améliore pas vraiment les affaires : on a probablement dit à Slash qu’il fallait du jeune, et Astbury, Ozzy et les vioques de la suite, c’est pas top. Alors, on a fait venir Fergie. Si, la fille au visage bizarre des Black Eyed Peas. Fergie hurle. Elle doit être sous stéroïdes, ou sur je ne sais pas quoi que Lance Armstrong a pris pendant des années, mais elle fait vraiment peur. Slash, quant à lui, semble jouer avec un killswitch. Si. Je me demande s’il va troquer son légendaire chapeau pour un seau KFC. Myles Kennedy prend la relève, il est le chanteur de Alter Bridge. Grand groupe, Alter Bridge : c’est Creed, mais sans le chanteur Scott Stapp, encore un mec à l’égo surdimensionné, tiens. Kennedy est un pote de Slash : il lui offre deux morceaux ici, est son chanteur de tournée et sera probablement dans la future version de Velvet Revolver. Il chante comme Chris Cornell, en fait, mais le Chris Cornell qui savait chanter, évidemment.

Parce que l’autre Chris Cornell, celui de maintenant, il est ici aussi, à s’exploser les poumons dans une powerballad médiocre qui ressemble vaguement à un thème de James Bond. Déjà vu, déjà vu… Malheureusement, Slash semble avoir choisi les vocalistes les plus horripilants possibles : on retrouve aussi Andrew Stockdale (Wolfmother) dans un évident numéro de mimétisme robertplantien, et Kid Rock (KID ROCK!), dont les 15 minutes de « gloire » sont passées depuis bien longtemps. Last but not least : le type de Maroon 5. Vraiment.

Alors, totalement à chier? Non, en fait, parce que bizarrement, la seconde moitié de l’album a quelques bons moments. Le final, d’abord : Rocco DeLuca (moi non plus, mais tant mieux) apporte un morceau carrément flamenco, qui change avec le ton général très rock à bières et bikers, et Iggy Pop finit en racontant évidemment n’importe quoi. Le meilleur chanteur de l’album? Terrible à dire, mais c’est Lemmy. Gros, très gros morceau rock ‘n roll, on regrettera juste un peu la production trop léchée par rapport à Motörhead, mais vu le reste de l’album, on ne va pas se plaindre. Mais le meilleur morceau de l’album est peut-être Watch This, un instrumental (ben tiens) rehaussé par la présence de Duff McKagan et Dave Grohl. Aucune tentative de faire du show, juste faire du rock. Ca marche, et c’est très bon.

On pourrait encore parler des tonnes de bonus tracks sorties sur la dizaine d’éditions différentes, mais vu que le morceau le plus remarquable est une reprise de Paradise City avec Cypress Hill et Fergie, il vaut mieux pas. Slash est un album peut-être décevant, mais la nature même d’une telle superproduction devait décevoir. Tony Iommi, évoqué plus haut, avait eu le bon goût de ne pas faire appel à des superstars, mais à d’excellents vocalistes (Anselmo, Steele, Rolllins, déjà Astbury et un encore vaguement fringuant Osbourne), pour un résultat optimal. Ici, c’est un peu comme un film de Michael Bay : ça explose dans tout les sens, mais ça finit bien vite par écoeurer.

Blip.fm : Watch This, Doctor Alibi, Beautiful Dangerous

Far – At Night We Live

De toutes les histoires de reformations récentes de groupes des 90s, celle de Far est une des plus étonnantes. Far, voyez-vous, est ce qu’on appelle un groupe culte : un groupe qui a influencé des tonnes d’artistes qui ont, eux, vendu des disques. Articulé autour du tandem Jonah Matranga (voix) – Shaun Lopez (guitare), le quatuor fit partie de la scène de Sacramento d’où sont notamment issus Deftones. Leur album de 1998, Water and Solutions, a failli leur offrir un succès commercial mérité, mais les dissensions internes finirent par avoir raison du groupe, qui était censé rester à jamais dans la catégorie namedrop (par Jimmy Eat World, Blink-182, et plus ou moins n’importe qui a un jour porté l’étiquette emocore).

Depuis, les quatre membres vivaient d’autres aventures, musicales ou non, jusqu’au jour où une idée de reformation éphémère vint à l’esprit de Matranga. Quelques dates anglaises ont été bookées, et le groupe s’amusa en studio avec une reprise du hit RnB graveleux de Ginuwine, Pony. Et c’est là que les prévisions dépassèrent toute espérance. Pony (présent ici en piste cachée) devint un hit majeur sur les radios rock US, le genre de hit qui a toujours manqué à Far. De fil en aiguille, au fur et à mesure d’e-mails echangés par Matranga et Lopez, une idée germa : et si le comeback était assorti d’un nouvel album, douze ans après Water and Solutions? Voici le résultat, At Night We Live. Continuer la lecture de Far – At Night We Live

Hole – Nobody’s Daughter

Dans le courant de l’année dernière, des morceaux inédits de Courtney Love se sont retrouvés sur internet. Il s’agissait d’une version quasi terminée de Nobody’s Daughter, le second album solo de Courtney Love, sous forte influence Dylanienne. Les morceaux étaient étonnants, généralement simples et majoritairement acoustiques. Mais surtout, ils étaient bien meilleurs que ce que l’on aurait pu attendre. Malheureusement, Courtney, ou son label, ou son styliste, n’était pas content du tout que ces morceaux se soient retrouvés à l’air libre, et les a directement qualifiés de démos sans rapport avec la version finale de l’album. Une de ces deux affirmations est vraie. Ce n’était absolument pas des démos, mais la version commerciale de Nobody’s Daughter est loin, bien de loin du niveau de ces morceaux.

De plus, pour une raison imbécile et commerciale, Love sort Nobody’s Daughter sous le nom de Hole, qui fut son groupe des années 90. Pourquoi pas? Oui, sauf que Courtney est le seul membre de Hole qui reste dans le groupe : elle n’a carrément pas demandé l’avis d’Eric Erlandson, Patty Schemel, Samantha Maloney ou Melissa Auf der Maur, quelques un de ses anciens compagnons. Elle les a remplacé par des musiciens inconnus, et trouvé une nouvelle muse : Micko Larkin, 23 ans, anglais et guitariste de Larrikin Love (moi non plus).

Tout était donc réuni pour un bon gros album pourri, et une nouvelle preuve que les nineties, aussi chouettes furent-elles, gagneraient à ce qu’on leur foutent la paix. Et c’est vrai qu’une bonne part de Nobody’s Daughter ne vaut pas grand chose. Nouvelle déception dès le début : le morceau-titre est totalement différent de la fuite, seul le nom reste. Comme premier morceau, il est très mal choisi : il se traîne, est trop long, trop produit (Michael Beinhorn, le Michael Bay de la production rock) et montre une Love déjà à bout de souffle, qui recherche doublement l’inspiration. Larkin a co-écrit le morceau, et est peut-être un gentil garçon, mais ne semble pas être spécialement talentueux. Il tente d’évoquer le Billy Corgan co-compositeur de Celebrity Skin pour le second morceau et premier single, Skinny Little Bitch, mais n’arrive qu’à pondre un riff assez ridicule. Mais pas autant que Love, dont les inflexions vocales sont franchement embarrassantes.

Pacific Coast Highway, une des meilleures fuites, relève largement le niveau, même si, il faut en convenir, ce n’était pas difficile. C’est aussi le premier morceau co-écrit par Billy Corgan, et même si, comme beaucoup de monde, je trouve que Corgan s’est méchamment paumé depuis, oh, dix ans, il est toujours capable d’écrire de très chouettes trucs. Même si, vu la genèse de cet album, ses compos doivent déjà avoir quelques années. Pacific Coast Highway est un peu le cousin moins séduisant de Malibu, et donne à Micko Larkin l’occasion de faire un solo de guitare. Il n’aurait pas du. Corgan co-écrit également Samantha, classique post-grunge perdu à tiroirs assez bien foutu, il faut le souligner.

Cela ne durera pas, car la seconde moitié de l’album appartient à Linda Perry. Linda Perry, ex-4 Non Blondes et responsable de quelques scies radio carrément offensives, comme le Beautiful de Christina Aguilera. Perry a commis Someone Else’s Bed, probablement pour les radios « adultes » US, For Once In Your Live, où elle offre à Love la possibilité de chanter « look what I can do » avec la voix d’une vieille perverse qui relève sa jupe devant des gamins jouant au basket dans un parc jonché de capotes usagées et de seringues sanguinolentes, et, encore pire, Letter To God. Ben oui, Courtney prend de l’âge, s’interroge sur sa vie et donc, écrit à Dieu. « I never wanted to be the person you see, Can you tell me who I am », ou pire « I always wanted to die ». Vu l’historique de la dame, elle aurait peut-être gagné à s’abstenir.

On se faisait tellement chier qu’on oubliait presque que Courtney pouvait encore faire un peu de rock, Loser Dust le rappelle. Mais devinez qui l’a écrit, Corgan ou Perry? Le dernier morceau de l’album est carrément co-écrit par Corgan ET Perry, il est donc facile de séparer les passages emmerdants des autres. Mais si on est arrivé à ce moment de l’album, on n’a plus vraiment grand chose à espérer, si ce n’est la fin. Pourtant, on a partiellement tort, car le morceau bonus (?) est carrément touché par la grâce : Never Go Hungry est le seul de l’album entièrement écrit par Love. Il est aussi le seul à ne pas être surjoué et surproduit : guitare acoustique et voix, c’est tout. Lorsque le morceau se conclut, on a retrouvé la Courtney Love de Doll Parts. Elle criait « I wanna be the girl with the most cake », maintenant c’est « I’ll never go hungry again ». Love était rageuse, puissante, énervée, exactement ce qu’elle est censée être, une force de la nature. Maintenant, elle ne l’est que très épisodiquement, préférant se ridiculiser sur scène et en dehors, écrire avec des compositeurs aussi rock ‘n roll que Susan Boyle et secouer quelques cadavres qui ne demandent que le repos éternel.

A l’écoute des « démos » et de Never Go Hungry, il apparaît clairement que la direction Hole 2.0 de Nobody’s Daughter était une grosse erreur. Love aurait du se replier sur elle-même et sortir la version originale de l’album, sans groupe minable et ballades FM. Mais elle ne pouvait/voulait probablement pas le faire. Il reste peut-être encore de l’espoir pour Courtney, qui reste une interprète et compositeur de talent (les accusations que Cobain aurait écrit Live Through This n’ont jamais été confirmées), mais on peut difficilement encore y croire.

Ash – A-Z Volume 1

Ash a toujours été connu comme un « singles band », soit un groupe qui réussissait à chaque fois à sortir des singles imparables, sans tenir la distance sur album. Je ne suis pas certain que la réputation soit justifiée, mais à une époque où le format traditionnel de l’album est de plus en plus mis à mal, les Nord-Irlandais ont franchi le pas vers une campagne particulièrement originale et ambitieuse. Tous les quinze jours pendant un an, le groupe sort un nouveau morceau, en vinyl simple face et mp3. Il était possible de s’abonner au début du programme (en septembre), ou d’acheter les mp3 individuellement (les vinyls sont quasi tous sold out dès la sortie). De plus, les abonnés ont régulièrement droit à des morceaux bonus, au bon vouloir d’un groupe qui garde les pieds sur terre : le dernier morceau s’appelle Pirates Are So 2004.

On vient d’atteindre la moitié du programme, et Ash a bien réussi à faire parler de lui, remplissant des salles plus ou moins grandes et réinvestissant les ondes radio. Cependant, le format cd semble encore compter pour le groupe : A-Z Volume One compile ainsi les treize premiers singles, le morceau Return of White Rabbit qui avait lancé l’affaire ainsi que quatre bonus tracks, mais attention, pas les mêmes que celles des abonnés. Bref, si ce concept aura au moins montré quelque chose, c’est que Ash pouvait être prolifique, avec déjà une vingtaine de morceaux sortis.

Return of White Rabbit ouvre la compile, et le fait très bien : guitares angulaires, un peu d’électro, on croirait presque entendre Bloc Party. On ne s’étonnera donc pas de voir Russell Lissack renforcer le groupe à la seconde guitare lors de la tournée en cours. Un des reproches souvent faits à Ash, et à son compositeur/chanteur/guitariste Tim Wheeler, c’est qu’ils n’ont que deux types de morceaux : le punk-pop rapide et la ballade. Caricatural, mais pas spécialement faux : la grande majorité de ce qu’on trouve ici appartient à une des deux catégories, avec parfois l’une ou l’autre variante. True Love 1980 et son un clavier très (trop?) 80s et Tracers du coté ballade, The Dead Disciples (Muse vs Nirvana vs Star Wars), Ichiban ou le bonus The Creeps de l’autre. 

Heureusement, Ash a parfois tenté de casser cette logique binaire : Pripyat est plutôt mid-tempo et raconte une touchante histoire de fin de civilisation, Space Shot est truffé d’effets spéciaux cheesy mais fun et Command met la basse de Mark Hamilton en évidence, un changement bienvenu. Il reste que bizarrement, la fin de la compile (avant les morceaux bonus) traîne en longueur : est-ce que la pression de fournir un single toutes les deux semaines a poussé les Nord-Irlandais à sortir un peu n’importe quoi, juste parce qu’ils le devaient? On peut déjà le savoir en écoutant la suite des singles, sur leur site officiel : ils sont tous disponibles à l’écoute au fur et à mesure.

On peut évidemment s’interroger sur le bien fondé d’une telle compilation : accoler des morceaux les uns aux autres et les vendre sur un même disque, ça ressemble quand même à un album, qui était la chose à éviter pour Ash. Soit, on ne s’embarrassera pas trop de sémantique : même si A-Z Volume One est d’un niveau inégal, ses bons moments prouvent que ses auteurs font effectivement partie de la grande tradition anglaise des groupes à singles, aussi peu variés soient-ils. On peut toutefois se demander si ces morceaux auraient vraiment pu tous être des extraits à succès d’un album : des singles populaires plutôt que décidés par le groupe. On se revoit dans six mois pour la suite et fin de l’entreprise.

Deftones – Diamond Eyes

Quatre ans entre deux albums, c’est une éternité pour certains (en quatre ans, Arctic Monkeys sort trois albums), ou rien grand chose pour d’autres (Tool, évidemment). Dans le cas des Deftones, c’est le délai le plus long jamais enregistré entre deux albums, mais pour une raison hélas assez bonne. Saturday Night Wrist est sorti fin 2006, sous d’excellentes critiques qui louaient en groupe en danger, qui avait profité des difficultés pour se sublimer. Le groupe travaillait sur son nouvel album, l’agressif Eros, quand un accident de voiture envoya le bassiste Chi Cheng dans un coma duquel il n’est toujours pas sorti. Après réflexion, Deftones a décidé de ne pas sortir Eros tant que Chi était absent, et d’écrire un nouvel album reflétant leur état d’esprit. C’est dans ce contexte très particulier qu’il faut placer Diamond Eyes, album d’une nouvelle énergie, d’une nouvelle force de vie… et meilleur Deftones en dix ans.

Aussi cliché que cela puisse paraître, Diamond Eyes est vraiment le son d’un groupe qui s’est retrouvé. Chi est donc absent, remplacé par Sergio Vega (ex-Quicksand), mais ce n’est pas la seule différence visible : le chanteur Chino Moreno a subi une modification physique assez impressionnante, perdant ses (nombreux) kilos en trop pour retrouver une forme proche des débuts, mais aussi une voix : Chino n’a simplement jamais chanté aussi bien. Même s’il était facile de les catégoriser dans le mouvement nu-metal, les ‘Tones ont toujours eu quelque chose en plus, et Chino incarne en grand partie ce quelque chose. Personnalité attachante et émotive, fan de Cure et des Smiths, il semblait assez loin des considérations gothico-cocasses de Jonathan Davis ou du rap macho stupide de Fred Durst. Chino approche la dualité de la musique de son groupe à la perfection : ses cris sont toujours perçants et puissants (Royal, Rocket Skates), mais ils sont généralement entrecoupés de passages mélodiques qui voient parfois Chino crooner. Souvent, les deux facettes du personnage se suivent dans une même respiration, rappelant avec plaisir White Pony, pour moi, un de mes albums préférés de tous les temps. Le morceau-titre et introduction de l’album donne le ton, avec des guitares crunchy et un refrain hypermélodique. Le duo Royal/CMND-CTRL est aussi agressif que possible, le guitariste Stephen Carpenter semblant jouer avec des lames de rasoir, mais Chino chante et hurle comme bon lui semble, emmenant deux morceaux apparemment simples vers des niveaux étonnants d’émotion.

On pouvait se douter que l’album posséderait une charge émotionnelle forte, mais rien ne fait directement allusion à la condition de Chi. Cependant, chaque morceau est à fleur de peau, surtout à partir de Beauty School, où la voix de Chino arrive à un niveau littéralement jamais atteint, sur un riff de guitare hypnotique et lancinant. Une des meilleures choses jamais réussies par le groupe, qui place Diamond Eyes dans la catégorie chef d’oeuvre sans hésitation. La suite ne fera que confirmer, que ce soit le mouvementé Prince (où Sergio Vega montre qu’il n’est pas juste un remplaçant), l’agressif et répétitif Rocket Skates ou l’extraordinaire final. Parce que comme White Pony, Diamond Eyes est un album qui s’écoute du début à la fin sans une seconde d’ennui. Il est peut-être l’album le plus « calme » du groupe, il est aussi le plus maîtrisé : outre Beauty School, Sextape et Risk (« I will save your life ») atteignent des niveaux inouïs de beauté pure tandis que This Place Is Death conclut magistralement un album passionnant, qui prend aux tripes, qui tire sur la corde de l’émotion sans jamais verser dans l’emo.

Passionnant, parce que Deftones n’a jamais essayé de faire du bruit, de faire un truc du genre « c’est pas juste, notre bassiste n’a rien demandé et il est dans le coma le monde c’est de la merdeAAAARGHHH » alors qu’ils auraient facilement pu le faire, et tout le monde aurait trouvé ça normal. Au contraire, la seconde partie de l’album serait très confuse pour l’auditeur qui se serait arrêté à Around The Fur : pas specialement de passage mosh-friendly, mais beaucoup de sentiments et d’émotion. Chino Moreno, et tout le groupe se place vraiment à part dans le paysage musical contemporain. Un des meilleures groupes metal de l’histoire vient encore de sortir un album extraordinaire. Maintenant, il faut juste attendre que Chi se porte mieux pour enfin entendre Eros, et encore beaucoup, beaucoup d’autres albums : les Deftones sont incapables d’autre chose que l’excellence.

Blip.fm : Royal, Sextape, Prince