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Metallica – Death Magnetic

C’est tellement facile de se moquer de Metallica. Ils n’ont plus rien pour eux, malgré deux des meilleurs albums de l’histoire du metal. Quels sont les chefs d’accusation? Avoir rendu le metal très accessible (autrement dit, s’être vendu corps et âme) avec un album truffé de morceaux assez faciles et d’une (sainte horreur) ballade, s’être lancé dans le rock country discutable, avoir sorti un album qui ne ressemble à rien, s’être totalement ridiculisé dans un (fantastique) documentaire, et, last but not least pour les internautes, l’affaire Napster. N’en jetez plus, la coupe est pleine.

Death Magnetic devait changer tout cela. D’abord, ils ont (enfin) changé de producteur, Rick Rubin remplaçant Bob Rock. Ensuite, on a souvent entendu les mots « Master » et « Puppets » lors des interviews durant l’enregistrement, ce qui pouvait être considéré comme prometteur. Puis les premiers morceaux sont arrivés, mais on s’est promis d’attendre l’album avant de juger. Maintenant, il est là : dix morceaux, dont neuf dépassant les six minutes, deux atteignant même les neuf. Le tout est de l’écouter, autant que possible, sans préjugés.

Et là, on se surprend presque à rêver. That Was Just Your Life sonne comme un vieux Metallica. Vraiment vieux, genre 1986. Le riff est là, le groove est même meilleur. James Hetfield se met même à chanter très vite, on jurerait être tombé sur un Slayer. Il sonne un peu usé, mais Kirk Hammett retrouve enfin la possibilité de faire un solo, parfois, il n’en faut pas plus pour raviver la flamme. Mais une flamme, ça s’entretient, et on va vite déchanter.

The End Of The Line m’a bien fait rire, parce que le riff, qui arrive après 42 secondes est immense. Mais il est aussi méchamment pompé à Pearl Jam (Why Go). Petit à petit, les éléments irritants se font sentir. Hammett a ses solos, c’est vrai, mais il a aussi une pédale wah wah qui aimerait sans doute se reposer une fois de temps en temps. Ulrich montre aussi bien vite ses limites, quand on le compare à d’autres batteurs de la génération suivante, comme Joey Jordison, par exemple. Broken, Beat and Scarred a ses moments, mais pâtit de paroles absolument abyssales. Puis, la longueur des morceaux semble assez artificielle : couper certains passages aurait été pertinent.

Mais rien de tout ça ne pouvait préparer au premier single, The Day That Never Comes, sorte de mauvais hybride entre One et Nothing Else Matters, se distinguant par un Hetfield à la limite du supportable (« The day that never comes-aaaah »). On s’était habitué aux morceaux sans solos de St Anger, maintenant on doit faire avec les solos interminables, difficilement justifiables et en plus assez limités. Heureusement, Metallica Inc. s’est bien rendu compte qu’il fallait banker sur les rumeurs de retour aux sources, c’est ainsi que All Nightmare Long comprend d’entrée des éléments de trash : ça va très vite, mais bizarrement (ou pas, ils ne sont plus tout jeunes), ça s’arrête aussi sec. Le refrain sauve les meubles, et en fait un des meilleurs morceaux d’un album assez éclaté, et dont la seconde moitié est, disons, discutable.

Le tandem Cyanide/The Unforgiven III suit, comme un mauvais poisson d’avril. J’enfonce le clou, ou une porte ouverte, mais Hetfield (ou qui que ce soit responsable des paroles) doit vraiment faire des efforts, parce que ça ne marche pas du tout. C’est bien le même type qui a écrit Ride The Lightning? Disposable Heroes? Je voudrais presque faire ressortir la vieille théorie de l’enlèvement alien. De plus, James joue vite, et Lars est tellement limité qu’on se demande s’ils jouent ensemble. Enfin, non, on ne se demande plus rien du tout…

The Unforgiven, on s’en souvient, c’était une des power ballads du Black Album, et on l’a bizarrement fait suivre par la version II sur Reload. Voici la 3.0, et devinez quoi? Elle craint. Non, mais là elle craint vraiment. C’est pompeux, lourd, commence par un piano, des cordes et des cuivres (pourquoi pas, mais pas comme ça…) et on se met à regretter St Anger. Et Load. Nan, j’déconne.

Si l’album se finissait ici, il serait déjà long, mais non non, on a encore vingt minutes. The Judas Kiss est insignifiant, Suicide & Redemption rappelle que Metallica a écrit d’excellents instrumentaux (Orion, The Call of Ktulu, To Live Is To Die), mais n’y arrive plus, et enfin, My Apocalypse apporte une bouffée d’air frais : cinq minutes à peine, et un bon rythme suivi, qui ressemble un peu trop à un Slayer fort fatigué, mais au point où on en est, on ne discute.

L’album n’est donc pas folichon : on se demande si Metallica n’aurait pas du continuer à faire autre chose, que tenter de réveiller un cadavre qui voulait juste qu’on lui foute la paix. Load, Reload et St Anger, au moins, étaient différents. Ici, on a juste un mix de différentes époques du groupe, joué par la plus faible incarnation de Metallica depuis leurs débuts (et Rob Trujillo n’a rien à voir là-dedans, on ne l’entend pas).

Pour empirer la situation encore un peu plus, je me dois de mentionner la masterisation de l’album, totalement calamiteuse, et adhérant parfaitement au concept de Loudness War. Rick Rubin est un grand habitué de la chose, certains de ses albums (Californication, par exemple) étant excessivement mal fichus en cd. On aura peut-être un meilleur son avec le vinyl, mais si vous vous demandez pourquoi le son sature, et pourquoi le snare a tendance à clipper, voilà la réponse, merci au Team Rubin.

Allez, sortez-nous un album entièrement acoustique la prochaine fois, au moins, on aura moins à dire.

Metallica – Master of Puppets (1986)

En trois ans de rédaction pour Music Box (entre autres), j’ai remarqué que si je venais à dire du mal de Metallica, je me prends à chaque fois plein dans la gueule dans les commentaires. Ce qui malheureusement confirme un cliché, mais je tenais à affirer ici que je ne déteste pas Metallica, au contraire. Ce n’est pas parce les membres du groupe sont des abrutis de première (Some Kind of Monster, le film et l’affaire Napster suffisent), qu’ils ont sorti trois (voire quatre, mais là je m’expose à l’anthrax dans ma boîte aux lettres) albums très pénibles et que les deux nouvelles chansons jouées en 2006 sont ridicules que le groupe n’a jamis rien valu, bien au contraire.

Master of Puppets, qui fête ses 20 ans cette année (c’est le premier album que je chronique dont je n’ai pas vécu la sortie – j’avais 6 ans) est le meilleur album du groupe, il est difficile de le nier (même pas la peine de mettre les mots « black » et « album » dans un commentaire). Le groupe lui a d’ailleurs rendu hommage lors de leur petite tournée 2006, en le jouant dans son intégralité.

L’album commence par la fameuse intro flamenco de Battery, qui est tellement connue aujourd’hui que son effet de surprise est passé, mais reste que le morceau qui la suit est un archétype d’offensive trash metal, emmené par ce qui est sans doute le principal point fort de Metallica, la guitare rythmique extraordinaire du chasseur d’ours blanc James Hetfield. Le tout aussi classique morceau titre le confirme, avec son intro légendaire qui ne permet heureusement pas encore de montrer les lacunes du batteur Lars Ulrich. On peut dire, sans doute à raison, que ce genre musical est aujourd’hui suranné, et les morceaux de 8 minutes sans trop de variation seraient maintenant risibles, mais il reste que la puissance de ces morceaux est indéniable.

Un peu plus loin, Welcome Home (Sanitarium) suit la formule de Fade To Black (sur Ride The Lightning, personnellement mon préféré), à savoir une intro mid-tempo suivi d’une suite plus dynamique. Quelques années plus tard, Metallica sortira un album entier sur ce principe, même si le tempo lent sera prévalent. Disposable Heroes accèlere les choses, et reste, avec le dernier morceau ici, Damage Inc., un de leurs morceaux les plus rapides. On doit aussi retenir le splendide instrumental Orion, dominé par la basse du très regretté Cliff Burton.

Master of Puppets ne possède plus la même puissance aujourd’hui (même si une bonne remasteristation arrangerait les choses), mais il reste un album majeur pour la carrière de Metallica et pour le metal en général, vu que tout ce qui va suivre sera lourdement influencé par cet album. Un classique, par définition.