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Juin 2014

Ce n’est pas parce que je m’occupais full time de la Coupe du Monde Music Box que j’allais délaisser les albums sortis en juin, même si l’article sort aussi tard que d’habitude. Pour faire plus simple, ce sera cette fois une simple liste commentée, dans le désordre, à l’exception de mon album du mois.

White Lung

Après le très impressionnant album de Perfect Pussy, la seconde moitié du punk féministe qui gueule est aussi sortie ce mois-ci, Deep Fantasy de White Lung, emmené par la très charismatique et engagée Mish Way. Contrairement à Perfect Pussy, on peut comprendre plus facilement ce que Mish Way raconte, et la musique, aussi rapide et sans compromis puisse-t-elle être, est aussi plus accessible. C’est pour cela que Deep Fantasy est encore plus recommandable, et mon album du mois de juin.

Bob Mould avait sorti un des tous meilleurs albums de 2012 avec Silver Age, et récidive avec Beauty and Ruin. Précision mélodique, énergie, compositions parfaites : ceux qui l’ont découvert grâce à Dave Grohl ont peut-être bien laissé tomber les Foo Fighters depuis.

Second album et confirmation pour les sœurs suédoises First Aid Kit (Stay Gold). Les morceaux sont peut-être moins immédiats qu’auparavant mais sont toujours aussi bien écrits, avec des accents d’Americana, des arrangements excellents, des harmonies somptueuses et un grain de folie toujours bienvenu.

Après une relativement longue période d’attente et sa première angoisse de la page blanche, Jack White, le Willy Wonka du vingt-et-unième siècle, nous propose Lazaretto, son second album solo. C’est un album de Jack White, varié, parfois inégal et vaguement sexiste mais aussi percutant et riche. Mais je n’arriverai jamais à m’enlever de la tête l’idée qu’il n’a jamais fait mieux que les White Stripes.

Death Grips aura écrit une petite page de la musique indé de cette décennie, surtout grâce/à cause de leur instabilité. Concerts annulés, problèmes avec leur label, sorties instantanées d’albums, on ne s’est jamais ennuyé avec eux. Ils viennent de se séparer brusquement, après trois années d’existence et un double album en 2014, dont la première moitié vient de sortir. The Powers That B comprend huit morceaux un peu moins cinglés que d’habitude, mais avec l’aide de Björk, qui apparaît sur chaque morceau, même si ce n’est pas toujours vocalement.

Déjà le quatrième album en cinq ans pour Rival Sons (The Great Western Valkyrie), et ils se sont maintenant confortablement installés dans un rôle de groupe rock fiable, à rapprocher de Gaslight Anthem, par exemple. Les influences sont claires mais les morceaux sont bons, même si la seconde moitié de l’album perd progressivement en intensité.

En parlant d’intensité, Fucked Up est déjà de retour avec Glass Boys, qui continue leur progression vers une musique accessible, avec des solos, des mélodies et tout ça, mais toujours marquée par la folie furieuse du chanteur Damien Abraham.

L’intensité, par contre, ce n’est pas le truc de Kasabian. J’entends qu’ils sont très bons en concert, mais je n’ai jamais été convaincu par leurs albums, et ce n’est pas ce 48:13 qui va changer quoique ce soit, on est à la limite de l’anémie.

Cerebral Ballzy, voici quelques mois, faisait partie de cet espèce de mouvement nouvel hardcore, avec notamment Trash Talk. Mais ils ont toujours représenté un côté plus fun, qui se retrouve encore plus dans un Jaded and Faded fort mélodique et accrocheur, mais qui manque justement de puissance.

Vous vous souvenez de Klaxons? Un premier album percutant, la nu-rave, quelques hits, un lolcat en pochette du second… et maintenant un troisième album (Love Frequency) peu intéressant, qui ne parvient ni à retrouver les gloires d’antan, ni à apporter quoi que ce soit de nouveau, malgré (ou à cause de?) des productions Chemical Brothers.

Pour Fu Manchu (Gigantoid) par contre, pas de déception mais pas d’évolution non plus, c’est du bon gros stoner. Enfin, pas si gros que ça, parce que Fu Manchu alterne morceaux longs et courts, de 8 à 2 minutes. Cela surprend, mais on évite ainsi une certaine monotonie répétitive.

Premier album pour les danois de Lower (Seek Warmer Climes),  propulsés au devant de la scène indie locale suite au succès d’estime d’Iceage. Moins violents et dangereux, leur post-punk anguleux reste fort intéressant mais peut-être un peu trop générique? Mais ce n’est qu’un premier album, fort prometteur.

The OrwellsDisgraceland. Pas de réinvention de roue ni d’eau chaude, mais on ne leur demande rien de plus non plus. Parfois Strokes en encore plus rien à foutre (Southern Comfort), parfois Nirvana-lite avec moins de choses à dire (TheRighteous One), ils ont digéré suffisamment d’influences pour sortir un premier album solide de bout en bout.

Priests, quant à eux, font du punk un peu plus classique, avec la voix de Poly Styrene et la musique de X, époque Los Angeles. Mais c’est très bien comme ça, surtout que cela ne dure que 17 minutes percutantes (Bodies and Control and Money and Power)

J’ai été vaguement impressionné par Linkin Park (The Hunting Party), mais probablement parce qu’ils ont consciemment tenté de revenir aux sources, après une phase électrochiante. Ils se retrouvent finalement quelque part entre le rock classique et le nu-metal des débuts, voire en plein dans le punk/hardcore (War). Malheureusement inégal (on n’évite pas les horreurs – Until It’s Gone – ou le remplissage) il est efficace, surtout grâce à une production musclée et des morceaux plus variés qu’il n’y paraît, notamment grâce aux guitares invitées de Tom Morello, Page Hamilton et Daron Malakian.

Malgré ses menaces de quitter la musique, Lana Del Rey est bien là avec un second album, Ultraviolence, coproduit par Dan Auerbach des Black Keys. Pas de plagiat de Jack White par ici, mais des balades enfumées tristes, qui vont parfaitement à la voix de Del Rey. Mais d’un autre côté, on se fatigue très vite, vraiment très vite.

C’est aussi le moment du second album pour Parquet Courts, qui après deux disques excellents (il y avait aussi en EP) semblent un peu s’essouffler (Sunbathing Animal). Rien de grave, mais un peu de syndrome du trop, trop vite…

Enfin, chaque mois apporte ses ressorties, et on a du très lourd en juin, avec tout d’abord Superunknown, l’album de la consécration de Soundgarden qui fête ses vingt ans. Toujours aussi étrange et puissant, l’album n’a pas vieilli, et ressort en deux éditions. L’édition deluxe est accompagnée d’un second disque classique de faces B, démos et enregistrements de répétitions, mais la super deluxe (notez la différence) envoie carrément un disque entier de démos, un autre de répétitions, et un troisième avec tout le reste. Dispensable, oui, mais uniquement si vous avez l’album original. Une des influences majeures de Soundgarden (et de quiconque a un jour tenu une guitare, si possible une Les Paul) commence également un programme de ressorties, il s’agit de Led Zeppelin. On commence par leurs trois premiers albums, accompagnés d’un live à Paris de 1969 (I), ou de backing tracks, mix alternatifs et inédits (II et III). On pourra penser ce qu’on veut de Led Zep, mais historiquement, peu d’albums sont aussi importants que ceux-ci, tant au niveau de l’influence qu’ils auront envers, notamment, le heavy metal mais aussi du refus de ce genre de musique par le mouvement punk. Même si je ne serai jamais fan de Led Zeppelin…

On se revoit dans quelques semaines pour l’article Juillet/Août, en attendant, n’oubliez pas Tumblr, Twitter, Facebook et le playlist Spotify du mois de juin, avec quelques morceaux d’albums à venir en plus. Par contre, Spotify ne me laisse pas actuellement ordonner les morceaux, n’hésitez pas à utiliser le bouton shuffle, le hasard fera mieux les choses.

Led Zeppelin – II (1969)

600px-LedZeppelinLedZeppelinIIalbumcoverJe le jure, je ne l’ai pas fait exprès, mais le timing est intéressant : je voulais écrire sur Led Zeppelin depuis longtemps, et maintenant que je le fais, ils annoncent une reformation exceptionnelle pour laquelle plus de 20 millions de personnes ont demandé des places, en quelques heures. 20 millions. Écrire sur Led Zep, c’est bien, se décider quel album choisir, c’est autre chose. Je m’occuperai probablement de quelques autres plus tard, mais aujourd’hui, ça sera le second album, II. Pourquoi? Tirage au sort entre les quatre premiers. Ceci dit, le sort est parfois heureux. II est l’album qui a cimenté la place de Led Zeppelin dans l’histoire, et notamment grâce au morceau de pure folie qui entame celui-ci, Whole Lotta Love. 

Le riff de Robert Plant est monumental, la basse de John Paul Jones fait l’effet d’un rouleau compresseur, et la production de Jimmy Page, qui alterne les guitares entre les canaux droit et gauche rendent ce morceau complètement cinglé, mais terriblement mémorable. Encore plus dingue est le pont, où Robert Plant râle et gémit de manière tellement suggestive qu’on a surnommé cette partie "la section de l’orgasme". Orgasme, ça l’a clairement été pour le rock n roll, qui y trouve un de ses meilleurs morceaux. Difficile, voire complètement impossible de suivre un tel monument, mais Led Zeppelin fait mieux qu’essayer.

The Lemon Song envoie quelques références sexuelles subtiles, une des spécialités du groupe (après le "backdoor man" de Whole Lotta Love, Plant propose qu’on presse son citron jusqu’à ce que le jus coule…), mais rien, absolument rien ne pourrait détourner l’attention de la basse de Jones, qui est invraisemblable tout au long du morceau. Et dire qu’il a apparemment tout improvisé. Autre spécialité du groupe, mais pour laquelle on ne peut pas vraiment leur en tenir rigueur, c’est l’emprunt très peu subtil de paroles ou de sections entières d’autres morceaux. Ainsi, le début de Thank You est directement volé à Jimi Hendrix : cela reste une ballade sublime, menée par l’orgue d’un omniprésent John Paul Jones.

Heartbreaker montre le retour du riff mortel, accompagné d’un solo improvisé, rythmé par l’incroyable John Bonham, qui marquera de son empreinte l’instrumental Moby Dick : en concert, son solo de batterie pouvait durer trente minutes et se finissait souvent par un Bonham poings en sang, ayant fini sans ses baguettes lancés dans le public. On a pas ça dans un concert de Fall Out Boy. Quoi encore.. Ramble On raconte le plus simplement du monde l’histoire de Frodo Baggins (à la première personne, rien que ça). Le blues/rock/blues Bring It On Home clôture avec une classe folle un album d’une classe folle.

Led Zep allait encore être plus dingue, plus excessif, jusqu’au point de non retour. Reformation, tournée, nouvel album, qu’importe. Quel est le meilleur album, on s’en fout. Jimmy Page a-t-il vendu son âme à Sean "Satan" Combs, quoi d’autre.

II est un des albums les plus importants de l’histoire de la musique, point. 

 
Whole Lotta Love