Archives par mot-clé : Nine Inch Nails

Top 100 Albums 2013

Comme d’habitude, il y a certainement eu des oublis, des albums qui sont placés plus haut ou plus bas qu’ils ne devraient, mais j’avoue ne pas avoir accordé énormément d’attention à la précision du classement, le 91e pourrait être 23e et ainsi de suite. Une fois de plus, ce ne sont que mes albums préférés. Il y a beaucoup de listes comme celle-ci, mais celle-ci est la mienne.

La playlist Spotify reprenant un morceau de chaque album est à la fin (écoutez-la en lecture aléatoire, please), et n’hésitez pas non plus à aller écouter celle de MDEIMC, reprenant ses morceaux préférés de l’année, il n’y a rien à jeter. Let’s go.

100 Haust – No. Punk hargneux norvégien à riffs rendu amusant par mes recherches menant à www.haust.no.
99 Jagwar Ma – Howlin. Si les Stone Roses ne sortent jamais de troisième album, c’est leur faute.
98 Eisley – Currents. La famille DuPree switche (parfois) les guitares pour des rythmes plus dansants, tout en conservant les plus belles harmonies que vous entendrez cette année (Haim qui?)
97 Splashh – Comfort. Dans ce classement, il y aura quelques groupes qui auraient vraiment bien aimé qu’on soit en 1993 et pas en 2013 et qui ont un autel avec des photos de Kevin Shields et de J Mascis dessus. Voici le premier. Désolé (pas désolé, en fait) mais c’est mon classement.
96 Johnny Marr – The Messenger. Parce que c’est Johnny Fuckin Marr, c’est tout.
95 The History of Apple Pie – Out of View. Shoegaze pop adorable, juste arrivé quelques années trop tard pour Lost in Translation.
94 Bass Drum of Death. Guitare, batterie, garage.
93 Phoenix – Entertainment. Merci Daft Punk d’avoir sorti l’album la même année…
92 Public Service Broadcasting – Inform Entertain Educate. Curieux, intéressant, fascinant même si probablement éphémère. Ils me rappellent un peu The Avalanches en moins cinglé. C’est quand vous voulez, au fait, The Avalanches.
91 Camera Obscura – Desire Lines. Toujours là quand on en a besoin, toujours excellent.
90 I Is Another – I Is Another. Premier album/EP du duo Ian Love/Jonah Matranga, criminellement trop court.
89 Paul McCartney – New. On parle du retour de Bowie, mais New est le meilleur album de Macca depuis bien longtemps.
88 Touché Amoré – Is Survived By. Oui, c’est plus mélodique et moins intense qu’avant. Mais c’était le seul moyen.
87 Bad Religion – True North. Un des meilleurs albums de Bad Religion, et c’est le seizième. Si on me demandait par quoi commencer BR, je dirais True North.
86 Front Bottoms – Talon of the Hawk. Comme MDEIMC l’explique très bien, duo folk-dance-pop-punk, ce qui sonne bien mieux qu’il n’y paraît.
85 Potty Mouth – Hell Bent. Post-Riot Grrrl punk rock comme on n’en faisait plus. Cool.
84 Tegan & Sara – Heartthrob. Les sœurs Quin expérimentent avec des sonorités plus modernes sans sombrer dans la dance pop FM.
83 Milk Music – Cruising Your Illusion. Le successeur de l’incendiaire EP Beyond Living ne pouvait être qu’un ton en dessous, mais ce n’est quand même pas mal du tout, juste plus Neil Young que J Mascis.
82 Rival Schools – Found. Après avoir de nouveau perdu Ian Love, un des seize groupes de Walter Schreifels retrouve son fameux second album « perdu » et lui offre une véritable sortie.
81 California X. J’ai déjà parlé de J Mascis?
80 Purling Hiss – Water on Mars. Maintenant, on peut enfin parler de descendants de Nirvana plutôt que d’imitateurs. Parfait exemple de fuzz pop homogène.
79 Deap Vally – Sistrionix. White Stripes féministes revendicatrices, moins homogènes mais avec 100% de déclarations stupides en moins.
78 Mudhoney – Vanishing Point. Mudhoney = Sub Pop. Et avec eux, un album qui personnifie parfaitement ce qu’a toujours été Mudhoney. Pas leur plus expérimental, mais pas leur moins bon non plus.
77 Suede – Bloodsports. Des groupes qui se reforment et sortent un nouvel album, ce n’est pas si fréquent. Quand l’album en question soutient la comparaison avec le reste de leur discographie, c’est encore plus rare et mérite d’être souligné.
76 Drenge. J’imagine qu’on doit dire que c’est une sorte d’équivalent anglais des Black Keys, mais ça serait assez stupide, Drenge semble vraiment aimer leur musique pour ce qu’elle est.
75 Hunx and His Punx – Street Punk. Fun + punk + revendications sociales. What’s not to like?
74 Babyshambles – Sequel to the Prequel. Alors qu’on l’avait totalement oublié, Pete Doherty sort le meilleur album de Babyshambles et probablement son album le plus concentré. Pendant ce temps, il est où Carl? Il attend le coup de fil?
73 The Knife – Shaking the Habitual. Leur spectacle (plutôt que concert) aura bien fait parler de lui cette année, mais l’album qui l’accompagne n’est pas mal du tout, juste beaucoup trop long et trop bizarre. Mais est-ce que c’est vraiment une mauvaise chose?
72 Boards of Canada – Tomorrow’s Harvest. Détenteur du titre de buzz marketing de l’année jusqu’à Reflektor. Un album dense, riche, cinématique.
71 City and Colour – The Hurry and the Harm. Dallas Green, mélancolique à souhait. C’est beau, c’est triste, c’est nécessaire.
70 Jimmy Eat World – Damage. Finalement, ce n’est pas une mauvaise chose que Jimmy Eat World n’a jamais connu un énorme succès commercial : ils sont toujours excellents.
69 White Denim – Corsicana Lemonade. Rencontre du rock psyché 60s et du math rock, avec une touche de classic et southern.
68 Joanna Gruesome – Weird Sister. À cause de Google, il faut trouver des noms de groupe aussi percutants/pourris que possible. On en a un quelques uns cette année, mais aucun aussi amusant que ce combo gallois indie-punk éclectique. Et ça marche.
67 Pearl Jam – Lightning Bolt. Toujours capables de remplir des salles n’importe où en Europe en un clin d’œil, Pearl Jam sort son dixième album qui a l’infinie vertu d’être bien meilleur que le précédent.
66 David Bowie – The Next Day. L’immense buzz autour de sa sortie a probablement troublé la relative objectivité du jugement, mais The Next Day est quand même le meilleur Bowie depuis un certain temps.
65 Nine Inch Nails – Hesitation Marks. L’album le plus inégal de l’année?
64 Chelsea Light Moving. La meilleure manière de ne pas regretter Sonic Youth (voir aussi Body/Head).
63 Bleached – Ride Your Heart. Fuzzpop indé, deux soeurs, Haim qui?
62 Yo La Tengo – Fade. 45 minutes d’indiepop (trop) parfaite.
61 Yuck – Glow and Behold. Loin de couler le groupe, le départ du frontman Daniel Blumberg a modifié leur modus operandi en gagnant en textures ce qu’ils ont perdu en énergie.
60 Bored Nothing – Bored Nothing. Délicatesse indé, quelque part entre Pavement et Elliott Smith.
59 Palms – Palms. Isis + Deftones. Exactement.
58 Franz Ferdinand – Right Thoughts Right Words Right Action. Tentative relativement maladroite de se souvenir du premier album, mais avec des moments de brillance.
57 Diarrhea Planet – Rich Beyond Your Wildest Dreams. Folie furieuse avec plein de guitares.
56 The Men – New Moon. Chaque année, un nouvel album de The Men, et dans un autre style. Ici, les chansons de feu de camp et le rock n’ roll Springsteenesque. Je comprends rien à ces gens, mais ils sont forts, très forts.
55 The Strokes – Comedown Machine. Zéro promo pour un album que je n’attendais pas mais qui se révèle être bien plus intéressant qu’Angles. Le meilleur album sur lequel Casablancas a chanté cette année.
54 Daughter – If You Leave. Indiepop délicalement triste, tristement délicate, qui ne pouvait provenir que de chez 4AD.
53 Smith Westerns – Soft Will. Encore beaucoup de délicatesse pour un bel album. Le genre de groupe que l’on garde secret, rien que pour soi.
52 Wavves – Afraid of Heights. Il porte bien son titre, cet album.
51 Aye Nako – Unleash Yourself. Kathleen Hanna est responsable d’une certaine partie de ce top 100, et c’est pas fini (tip pour 2014 : Perfect Pussy). Punk rock 4 ever, etc
50 Sigur Rós – Kveikur. Apparemment leur album rock. C’est un album de Sigur Rós.
49 Kylesa – Ultraviolet. Les puristes n’aiment pas que Kylesa semble devenir « mainstream » Les puristes sont cons.
48 Pity Sex – Feast of Love. Shoegazy indie punk. Oui, encore.
47 Neko Case – The Worse Things Get… Le titre est bien plus long que ça, Fiona Apple-style, mais il est surtout excellent, frôlant la perfection dans la case singer-songwriter accessible. Et quelle voix…
46 The Wonder Years – The Greatest Generation. Les Menzingers de cette année. Punk rock intelligent et intense.
45 Mazzy Star – Seasons of Your Day. Rien n’a changé pour Mazzy Star, malgré le temps qui a bien passé autour d’eux. Ce qui donne une raison de plus pour s’y replonger.
44 Chvrches – The Bones of What You Believe. Pop music incontournable dans mon utopie.
43 Eleonor Friedberger – Personal Record. Personnel, oui mais aussi heureusement accessible et très bien écrit. Dans l’utopie mentionnée juste au-dessus, When I Knew = Get Lucky.
42 Superchunk – I Hate Music. Ouais, et moi je déteste ces vieux groupes qui sortent des albums qui insultent leur histoire.
41 Grant Hart – The Argument. L' »autre » ex-Hüsker Dü. Et un album très dense, qui part dans tout les sens mais qui ne cesse jamais d’être brillant.
40 The Bronx – The Bronx (IV). Putain de punk rock.
39 Pissed Jeans – Honeys. Putain de punk rock, l’autre côté de la pièce.
38 Los Campesinos! – No Blues. Pas de blues, non, plutôt l’écrasement de ce qui sert de coeur, lentement, douloureusement, délicieusement.
37  Ty Segall – Sleeper. Son Sea Change. Tellement brillant qu’on le prend comme acquis.
36 Détroit – Horizons. Bertrand Cantat (Noir Désir) et Pascal Humbert (Sparklehorse) chantent la misère et un rayon de soleil éphémère.
35 Motörhead – Aftershock. Ceux qui disent que Motörhead fait toujours la même chose n’ont jamais écouté Motörhead. Ceux qui écoutent Motörhead savent, même si ça dépasse l’entendement, que leur vingt-et-unième album est un de leurs meilleurs.
34 Cheatahs – Extended Plays. Oui, techniquement c’est une compile de deux EPs. Mais l’album n’a quand même plus dix ans à vivre, alors, autant tout célébrer. Notamment une autre excellente tranche d’indie shoegaze machin.
33 Merchandise – Totale Nite. D’ailleurs, en parlant de formats, on fait quoi de ça? 5 morceaux, mais une durée d’album (court, certes).  Un des espoirs de 2013 qui a choisi la voie très difficile, avec brio et suicide commercial.
32 Alkaline Trio – My Shame is True. Don’t call it a comeback, they’ve been there for years. Mais ça faisait longtemps quand même, un tel album.
31 Future of the Left – How to Stop Your Brain in an Accident. leur meilleur album à ce jour, et ça veut dire quelque chose.
30 These New Puritans – Field of Reeds. En fait l’album est bien meilleur que ça, mais je n’aime pas danser, encore moins sur de l’architecture.
29 Swearin’ – Surfing Strange. Altpunk, lofi, pédale fuzz, fille qui chante. Comme 20% de ce top 200, c’est chouette 🙂
28 Kurt Vile – Wakin on a Pretty Daze. Ou l’esthétique slacker poussé à son paroxysme, il n’a pas pensé à couper certains morceaux en deux ou en trois. C’est pas grave.
27 Best Coast – Fade Away. Grosse surprise pour moi, je ne m’y attendais pas mais Bethany et le type barbu ont sorti leur meilleur disque à ce jour. Techniquement un EP, mais voilà. Ma liste, etc.
26 Fuzz – Fuzz. Encore un petit tour pour Ty Segall, cette fois à la batterie. Plus stoner que grungy, toujours excellent.
25 Manic Street Preachers – Rewind the Film. Encore une grosse surprise, je n’écoute plus les Manics que par habitude, mais là ils sortent un album différent, roots sans être chiant, varié et plein d’espoir. Ils sortiraient un album post-punk en 2014, maintenant je les attends au tournant.
24 Janelle Monáe – The Electric Lady. Vous vous rappelez de l’utopie? Dedans, elle est Beyoncé.
23 FIDLAR – FIDLAR. Putain de punk rock.
22 Fuck Buttons – Slow Focus. Electro hautement imaginative et dérangeante.
21 Kanye West – Yeezus. Grosse prise de risque pour une superstar de ce calibre, inspiré autant par Death Grips (que j’ai honteusement oublié dans ce top 100) que par son invraisemblable mégalomanie. Mais l’album est complètement pourri par une misogynie crasse et inexcusable.
20 The Icarus Line – Slave Vows.  Post-hardcore et proto-punk, en même temps.
19 Iceage – You’re Nothing. Post-punk à couper au couteau, augmenté en cours d’année par un 7″ et le bouleversant projet parallèle Vär (un autre oubli)
18 The Julie Ruin – Run Fast. Kathleen Hanna reprend son alias, en fait un vrai groupe, ressort les guitares, garde les claviers, et rend heureux.
17 Speedy Ortiz – Major Arcana. La chanteuse Sadie Dupuis faisait partie d’un cover band de Pavement qui s’appelait Babement. Rien que pour ça, il faut écouter cet album.
16 The Thermals – Desperate Ground. Assaut punk rock direct, rageux et inspiré.
15 Surfer Blood – Pythons. Et dire qu’un jour, c’était la place de Weezer.
14 Waxahatchee – Cerulean Salt. Personnel, authentique, touchant et excellent, Katie Crutchfield oscille entre alt folk et fuzz rock pour faire vibrer tout ce qui peut encore vibrer. Elliott Smith n’est jamais très loin.
13 Nick Cave and The Bad Seeds – Push the Sky Away. Nick Cave me fait toujours peur, mais quel talent. Carrément un de ses tout meilleurs albums.
12 Thee Oh Sees – Floating Coffin. Punk, garage, psyché, etc etc. Rock.
11 The National – Trouble Will Find Me. Joie et bonne humeur toujours au rendez-vous, mais qu’est-ce que c’est beau.

10 Parquet Courts – Light Up Gold. Je ne sais pas si le comeback de Pavement en 2010 a eu une quelconque influence sur Parquet Courts, mais s’ils ont un descendant direct, ce sont eux.

09 Queens of the Stone Age – … Like Clockwork. Très injustement critiqué pour des raisons stupides (trop de « ballades », des guests invisibles, le Josh Homme show), … Like Clockwork est effectivement bien différent que, oh, Songs for the Deaf, mais si vous n’avez pas changé en dix ans, c’est votre problème, pas le leur.

08 Mikal Cronin – MKII. Autrefois connu comme bassiste du Ty Segall band, il devrait sortir de cette (fantastique) ombre grâce à un talent d’auteur/compositeur/multi-instrumentiste hors du commun.

07 Savages – Silence Yourself. Sérieux à faire passer The National pour Me First and the Gimme Gimmes, Savages allie intensité glaciale, rythmes no-wave et agenda socio-politique chargé.

06 Deafheaven – Sunbather. Un album post-genre, qui ne cherche pas la comparaison, et pour cause : une telle union de puissance sonore et mélodique n’a que rarement été produite auparavant.

05 John Grant – Pale Green Ghost. Des histoires sordides, glauques et autobiographiques qui initient l’ère du songwriter contemporain, qui utilise les outils électroniques avec la même évidence que la guitare acoustique. Et une voix extraordinaire.

04 My Bloody Valentine – mbv. La couleur de la pochette était un indice : Kevin Shields est le Docteur, voyage dans le temps et va chercher des sons du futur pour les mélanger avec ceux de son glorieux passé. Ce qui explique pourquoi il a fallu 22 ans pour que l’album sorte : pour Shields, seulement quelques mois se sont écoulés.

Reflektor

03 Arctic Monkeys – AM. Cinq albums, cinq réussites majeures. Celui-ci est plus introverti, plus contrôlé et sans la moindre seconde superflue.

02 Vampire Weekend – Modern Vampires of the City. On l’espérait plus ou moins secrètement et on l’a eu. Un album d’un grand raffinement et d’une extrême intelligence mélodique de la part du groupe indé le plus important au monde.

01 Arcade Fire – Reflektor. Parce qu’il est difficile de vraiment parler d’indé en ce qui concerne Arcade Fire, qui pourrait atteindre un jour le niveau de popularité U2. En attendant, profitons-en : dans ses excès de longueur et de densité, Reflektor est un album magique, presque sans temps mort, qui justifie à lui seul le concept d’album qui semblait voué à disparaître.


Playlist
Spotify de 93 morceaux / 6 heures ci-dessous, mode aléatoire très fortement recommandé. À l’année prochaine!

Septembre 2013

Comme chaque année, des tonnes de sorties en cette rentrée scolaire et musicale. On ne traîne donc pas.

Arctic Monkeys - AMMon album du mois, et probablement de l’année à moins qu’Arcade Fire désamorce le piège du double album, c’est Arctic MonkeysAM. Je sais que je le fais à chaque fois, mais sincèrement, je le pense, et cette fois je ne suis pas le seul, compte tenu des reviews unanimement en faveur de leur cinquième album. Je ne sais pas si c’est leur meilleur, mais c’est en tout cas leur plus travaillé, leur plus précis et, avec Humbug, leur plus étonnant, mettant au point un son différent tout en étant toujours typiquement Monkeys, probablement la marque des grands.

Un son différent à chaque album, c’est aussi un trait quasi systématique des Manic Street Preachers. Rewind the Film ne comprend quasi pas de guitare électrique et semblait destiner à rejoindre Lifeblood sur le podium de leurs albums « mal compris », mais non : il est excellent, varié, très intelligent, quasi sans baisse de niveau et prouve qu’un « vieux » groupe peut encore étonner en innovant. Et ce n’est pas fini : le « post-punk » Futurology est censé sortir l’an prochain.

Je termine mon trio du mois avec Janelle Monáe, dont le second album The Electric Lady est une merveille d’inventivité, et, probablement, de génie. Elle passe d’un genre à l’autre avec une aisance remarquable, sans ennuyer ou se répéter une seconde. Incroyable.

Septembre a aussi vu le retour discographique semi-surprenant de Nine Inch Nails, qui s’est distingué cet été par son light show aussi spectaculaire que les sautes d’humeur de Trent Reznor. Hesitation Marks semblait être un retour aux sources pour NIN, c’est en fait un album différent des autres, une fois de plus. Sans doute l’album le plus synthétique de Reznor, il puise son inspiration un peu partout, dans les BO de films qu’il a récemment composé avec Atticus Ross, dans la synthpop des années 80 (l’invraisemblable Everything) ou la pop/RnB contemporaine (Satellite, All Time Low). La grande variété de l’album en empêche par définition sa cohérence : Hesitation Marks n’est pas un grand album de NIN, mais c’est un de mes préférés.

On avait laissé Kings of Leon en mauvaise posture, suite à un album simplement mauvais et quelques troubles personnels. Sans arriver au sommet des premiers albums, Mechanical Bull se défend très bien, et joue même parfois la carte de la relative variété, lorgnant du côté de Queens of the Stone Age (comme tout le monde) et de Sly and the Family Stone. Tout en usant et abusant du combo arpèges/pédales de délai, évidemment. Pete Doherty, quant à lui, est toujours en mauvaise posture, et c’est donc encore plus étonnant de remarquer que le troisième album de Babyshambles, Sequel to the Prequel, est bon et ordonné. Certes, Doherty n’est pas seul, mais c’est évidemment son esprit très libre qui plane au-dessus de douze morceaux passant du punk au dub en passant par deux ou trois compos qui auraient nettement plus marqué les esprits si l’autre guitariste était Carl Barât. Mais bon, ça aussi, c’est fini. Qu’importe, c’est sans doute leur meilleur album.

Chvrches, composé d’ex-Twilight Sad et Aereogramme ainsi que de l’excellente chanteuse Lauren Mayberry fait de l’électro accessible, jamais agressive, recherchée et intelligente. The Bones of What You Believe rappelle les meilleures heures de la new wave, passées sous un filtre indé. Toujours en Écosse, vous vous rappelez de Glasvegas? Il y a déjà six ans sortait leur premier album qui augurait d’un futur intéressant. Un second album en forme de suicide commercial plus tard, Glasvegas se retrouve sans label et auto-produit (maladroitement) un troisième album (Later… When the TV Turns to Static) qui est censé leur ressembler, jusqu’à l’accent à couper au couteau du chanteur James Allen. Il passera probablement inaperçu, mais il n’est pas dénué de qualités, même si la voix peut fatiguer bien vite. Encore dans la catégorie « vous vous souvenez de », MGMT. Un des plus gros suicides commerciaux de ces dernières années, Congratulations a totalement enterré l’immense succès d‘Oracular Spectacular, six pieds sous terre. MGMT tente de trouver une place entre les deux : on ne peut pas/veut pas/sait pas écrire des trucs catchy comme avant, mais on veut quand même que Pitchfork nous aime bien. Ce qui marche plus ou moins, parfois.

On a beaucoup parlé de London Grammar, à qui la presse a déjà donné le Mercury Prize de l’année prochaine. Leur album If You Wait est une sorte de mix entre The XX et Daughter, sublimé par la voix enfumée de Hannah Reid et est juste assez discret pour être très bien accueilli. En parlant de discrétion, Mazzy Star le fait toujours très bien. Le duo composé de Hope Sandoval et de David Roback a atteint un statut de groupe culte suite à leur long hiatus (17 ans!) maintenant terminé et leur fantastique Fade Into You, une des plus belles chansons des années 90. Seasons of Your Day se comporte comme si rien n’avait changé, la voix éthérée de Sandoval, une instrumentation simple et efficace, une production légère, et une musique qui a parfois tendance à se placer en fond sonore, comme si elle n’était pas vraiment là.

Le crew Odd Future/OFWGKTA a peut-être dépassé son quart d’heure de gloire, avec les récentes sorties en demi-teinte de Tyler, The Creator et Earl Sweatshirt. Le plus gros succès du groupe vient de Frank Ocean, qui s’en est relativement détaché, tout comme The Internet, composé de Matt Martians et du DJ attitré d’Odd Future, Syd tha Kyd. Et là, surprise : Syd sait chanter, et elle le fait même très bien. Feel Good n’est pas un album parfait et le groupe devrait encore s’améliorer, mais Dontcha est digne des meilleures productions laidback de Pharrell. Une bonne surprise.

Après quelques mois de retard et un paquet de singles, le premier album de Splashh peut enfin sortir, et est conforme aux attentes, un sympathique retour à l’indie rock des années 90, tant UK (My Bloody Valentine, Jesus & Mary Chain) que US (Pixies). Rien de nouveau, peut-être, mais la production psyché/garage à souhait empêche Comfort d’être bêtement considéré comme une copie carbone de ses glorieux prédécesseurs. S’ils se mettent à écrire des bonnes chansons mémorables, leur second album pourrait être énorme. The Strypes se sont fait connaître par leurs concerts énergiques, endiablés et anachroniques : ces très jeunes gamins jouent comme s’ils vivaient dans un univers parallèle où « RnB » n’a jamais changé de sens. Alors oui, c’est entraînant et paradoxalement original, le guitariste a un ratio âge/prouesses techniques impressionnant, mais les chansons sont évidemment très typées (notamment au niveau des paroles qui auraient déjà été ridicules en 1961), et l’album (Snapshot) souffre d’un évident manque de variété. Ce qui s’est passé avec Yuck est assez étrange : le frontman Daniel Blumberg est parti, et le guitariste Max Bloom l’a remplacé au chant. En résulte un second album (Glow and Behold) moins percutant mais tout aussi appréciable, rappelant plutôt le shoegaze que le proto-grunge, pour ceux qui aiment bien les bêtes étiquettes. Mais on dirait vraiment un autre groupe. Joanna Gruesome rejoint Yuck dans la catégorie des noms pourris, mais aussi un peu dans les influences, très 90s. Mais Joanna Gruesome est moins carré et nettement plus fun. Même si pas aussi fun que le premier album (Run Fast) de The Julie Ruin, le nouveau groupe totalement extatique de Kathleen Hanna.

Ce mois-ci, on a Placebo, aussi. Loud Like Love sonne comme Placebo depuis dix ans, des rimes fatiguées (gay/Champs-Élysées/communiqué/superhighway), deux ou trois morceaux passables, rien de mauvais mais rien de bien utile non plus. Quelque part entre admirable (de longévité) et pathétique mais au moins, pas de dubstep. Balance and Composure cogne beaucoup plus fort, et est aussi nettement plus intense que le trio de Molko, au moins eux ne font pas semblant. Parfois limite pop-punk, parfois carrément emocore, The Things We Think We’re Missing est peut-être l’album rock du mois : rien que le fait qu’on pense encore à faire ce genre de musique, ça fait beaucoup de bien. Et la voix du chanteur me fait penser à Roddy Idlewild. C’était bien, Idlewild, au début. Encore un échelon au-dessus niveau intensité et pur volumé sonoré, Touché Amoré. Leur truc, ce sont des cocktails molotov à base de puissance pure et de sentiments à fleur de peau, mais cette fois, ils augmentent la longueur des morceaux (de 1 à 2/3 minutes, en gros) et améliorent leurs compositions.

Le Ty Segall du mois, c’est Fuzz, qui ne pouvait pas mieux porter son nom. Segall chante et joue de la batterie, c’est Charlie Moothart qui est cette fois à la guitare. Musicalement, c’est évidemment solide, mais les morceaux partent parfois dans tous les sens et auraient peut-être bénéficié d’un peu plus d’attention et d’édition. Mais Segall est probablement en train de travailler sur sept autres albums alors que j’écris péniblement ces lignes. Vista Chino, c’est Kyuss. Enfin, c’est Kyuss sans Josh Homme et sans les problèmes de justice causés par ce dernier. Donc, Vista Chino, Peace. Musicalement, ils ressemblent plus à Kyuss qu’aux Deftones (mon dieu, que c’est drôle) : guitares stoner comme au bon vieux temps (même si elles sont l’oeuvre du guitariste belge Bruno Fevery), Brant Bjork à la batterie, Nick Oliveri à la basse quand il prend la peine de venir jouer, et évidemment la voix de John Garcia. Un peu comme les Foo Fighters, c’est un peu étrange de voir Queens of the Stone Age avoir un tel succès actuellement mais voilà, heureusement, « Kyuss » vit toujours.

Quant à Lou Barlow, il a récupéré deux groupes, car c’est maintenant Sebadoh qui sort son premier album en quatorze ans. De nouveau lo-fi, Defend Yourself renoue avec l’essence du groupe tout en étant malheureusement/forcément trop inégal. Girls Against Boys revient également à notre meilleur souvenir, avec un EP cinq titres (The Ghost List) qui laisse augurer de bien bonnes choses. Et en parlant d’EP, celui de Fishboy (IMAVOLCANO), complètement cinglé mais tellement catchy, vaut le détour. Brandon Boyd continue son chemin en parallèle d’Incubus avec l’album de Sons of the Sea, le projet qu’il forme avec le mégaproducteur/multi-instrumentiste Brendan O’Brien (je pense que Brandon et Brendan aurait été un meilleur nom, mais qu’est-ce que j’en sais, moi). L’album est solide sans être extraordinaire, mais il a au moins l’avantage de ne pas être automatiquement comparé à Make Yourself. Par contre, ce n’était pas une bonne idée de sortir quatre des meilleurs morceaux de l’album en EP voici quelques semaines…

Pour terminer, on n’oubliera certainement pas deux boxsets de grande qualité. D’abord, Sound System de The Clash, soit leurs cinq albums studio (ne leur parlez jamais de Cut the Crap) et trois disques de démos, raretés et morceaux live. Sans aucun doute le document définitif d’un des groupes les plus importants de l’histoire du rock ‘n roll. Ce qui est aussi, n’en déplaise à certains, le cas de Nirvana. Leur dernier album, In Utero, fête ses vingt ans avec un remaster, l’ajout de démos et du concert Live and Loud. Mais surtout, il ajoute une nouvelle version de l’album, un mix complémentaire inédit réalisé par Dave Grohl, Pat Smear, Krist Novoselic et Steve Albini. Parfois très surprenant, il offre une vision différente et probablement plus proche de ce que le groupe voulait avant que Geffen ne foute la merde pour vendre des disques. Au risque de paraître révisionniste, je pense préférer ce nouveau mix.

Ah oui, et si quelqu’un veut m’expliquer Haim, je suis prêt, quand vous voulez.

Trente-deux morceaux dans le playlist Spotify, avec quelques ajouts de morceaux d’albums à venir, comme Jake Bugg ou le nouveau projet de Bertrand Cantat, Détroit.

Enjoy!

Pukkelpop 2013 : compte-rendu

Évidemment avec un peu de retard, voici mon compte rendu du Pukkelpop 2013 ou plus exactement du jeudi 15 août, premier jour du festival. Je l’ai peut-être déjà écrit auparavant, mais les festivals, je n’en fais plus. Trop de monde, trop cher, performances artistiques rarement au niveau des concerts et salle, etc etc. Mais bon, une fois de temps en temps, si l’occasion se présente, je m’octroie le droit d’aller voir des groupes que je n’ai jamais vu (Pavement aux Ardentes, Faith No More au Pukkelpop) ou, dans ce cas-ci, une affiche particulièrement intéressante pour moi.

Pukkelpop 2013On le sait, le coup de génie du Pukkelpop, c’est de commencer le jeudi, et donc d’éviter la concurrence des festivals du même weekend (Lowlands, plein de trucs en Allemagne qui changent de nom chaque année) tout en profitant des groupes qui sont en tournée des carnavals européens. Le jeudi était de loin la journée la plus intéressante du weekend, encore plus suite à l’annulation de Neil Young le lendemain.

Ma journée a commencé assez tôt de de manière surréaliste, avec Oathbreaker dans The Shelter. The Shelter, c’est la scène punk/hardcore/metal, et elle se trouve tout au fond du site, il est assez difficile de s’y trouver par hasard. Et Oathbreaker, c’est un groupe belge qui marie joliment black metal et hardcore (leur dernier album est sorti chez Deathwish Inc. et est produit par Kurt Ballou de Converge). On a donc eu ce mélange réussi vers midi, avec des lumières stroboscopiques, des canons à fumée et la voix inquiétante de la chanteuse Caro.

Arrivait ensuite, dans le Club (la plus petite scène « majeure ») Mikal Cronin, auteur d’un de mes albums de l’année et qui était en train d’installer son équipement quand je suis arrivé, tranquillement, m’installer devant lui. Même si c’était, selon Cronin, « the biggest tent we’ve ever played », il était encore trop tôt pour la remplir (même si c’était quasi le cas toute la journée, on y reviendra). Pourtant, Cronin et son groupe étaient impeccables, jouant une quarantaine de minute de pop songs parfaites extraites de ses deux albums solo. Et malgré deux cordes cassées (sur douze, heureusement) tout au début, il a continué comme si de rien n’était. Classe.

Retour sous le Shelter pour la fin des Menzingers, impeccable groupe punk qui m’a toujours fait penser à un Gaslight Anthem qui aurait gardé l’esprit punk. Excellentes chansons à scander, rien à dire. Ensuite, Parquet Courts, qui confirme sur scène leur réputation de Pavement punk, c’est bordélique, chanté par plus ou moins tout le monde, mais c’est aussi très bien. Je me fais ensuite entraîner de nouveau au Club pour rencontrer un ami (coucou Julien) mais je me fais aussi bien chier, parce que déjà que sur disque, je n’ai jamais compris la dithyrambe autour d’Allah-Las, mais sur scène, c’était, donc, chiant. Pas mauvais du tout, juste répétitif.

Autre must-see de ma journée, Surfer Blood, dont l’album Pythons sera probablement dans mon top 10 2013. Le concert était aussi fort bon, avec une majorité d’extraits de leur premier album. Le bedonnant chanteur John Paul Pitts s’est promené dans le public avant d’emmener son groupe dans un final plein de feedback et de bonheur, c’était bien. À un moment de la journée, j’ai vu Kendrick Lamar sur la grande scène, je pourrai donc dire que je l’ai vu quand il sera devenu la mégastar interplanétaire qu’il est censé être. Mais je n’avais pas le temps (enfin, disons que j’avais fait mes choix).

Parce que les choses sérieuses allaient commencer avec Deftones, un de mes groupes préférés de tous les temps, simplement. Et après les avoir vu pour la première fois il y a une quinzaine d’années, cela fait un bien fou de les retrouver en meilleure forme qu’à l’époque, et avec une discographie récente exceptionnelle, ce qui n’est le cas d’aucun de leurs contemporains. En une petite heure de concert, impossible d’avoir une longue setlist, mais le groupe a pioché dans presque tous ses albums : mention spéciale à Elite chanté (hurlé) dans le public, la merveilleuse Sextape ou un final avec deux morceaux d’Adrenaline, pour le bon vieux temps. Malgré la tragédie qui a frappé le groupe (l’accident suivi du décès du bassiste Chi Cheng), il a réussi à garder la tête très haute, notamment grâce à un remplaçant de choix, Sergio Vega. Un Sergio Vega qui faisait double emploi, car il jouait également avec Quicksand, légende du post-hardcore emmené par Walter Schreifels, aussi membre de Rival Schools et Gorilla Biscuits. C’est là que la fatigue a commencé à se faire sentir, et je n’ai pas pu apprécier Quicksand assez longtemps, malheureusement. Les festivals, sur papier, c’est très bien, mais en vrai…

Un peu comme Miles Kane, tiens. Je l’aime bien, ses compos sont chouettes même quand ce n’est pas Alex Turner qui les écrit, et son groupe est bon, même quand Alex Turner n’est pas là. J’ai juste du mal avec sa voix, mais c’est très personnel. Mention spéciale à son code vestimentaire qui l’oblige à porter un col roulé sous les projecteurs du Marquee.

En me dirigeant vers la grande scène, pour ne pas être trop loin pour Nine Inch Nails (m’empêchant d’ailleurs de voir Johnny Marr massacrer des chansons des Smiths), j’ai été jeter un oeil sous le Club où jouait Glen Hansard et une fanfare de 350 personnes au moins. Ce qui change beaucoup de ses concerts en solo. Pas mieux, pas moins bien, juste différent. Mais un festival n’est pas non plus le meilleur endroit pour apprécier cet artiste unique sous bien des aspects.

Nine Inch Nails, donc. Mes efforts étaient inutiles, j’aurais pu facilement me retrouver assez près de la scène tant le public ne semblait pas intéressé… Pourtant Trent Reznor, de retour en tant que NIN après cinq ans, apporte un show grandiose avec murs de LED, écrans mobiles et mise en scène très précise faisant la part belle aux cinq musiciens qui changent constamment d’instruments. Mais Reznor a toujours eu un tempérament disons, imprévisible : il n’a pas apprécié de commencer en plein jour et encore moins de jouer devant un public majoritairement composé de fans d’Eminem attendant le retour du fils prodigue. En « punition », il n’aura pas joué ses deux morceaux les plus célèbres (Closer et Hurt), terminant le concert dix bonnes minutes à l’avance. Heureusement qu’il était irréprochable, le concert, mêlant nouveaux morceaux (Copy of a, Came Back Haunted) et anciens parfois réarrangés (Sanctified), passages instrumentaux intenses (Help Me I Am In Hell) à un barrage final de hits (Only, The Hand That Feeds, Head Like a Hole). Ceci dit, à Reading, T-Rez a fait encore mieux : fâché de jouer avant Biffy Clyro, il a complètement réarrangé son set en ne jouant aucun hit.

Dernier passage par le Club pour voir Savages de loin, aussi intense que prévu, mais j’avais faim, mon ami et grand esthète Arnaud aussi, la vie est une question de choix et de priorités.

À partir de là, tel deux saumons remontant les rivières, nous avons bravé les armées de fans d’Eminem (sérieux, c’était dingue) pour nous retrouver de l’autre côté du site, passant à côté de Hurts qui avait attiré la grande foule, pour finir au premier rang d’un Shelter probablement décimé par ce qui est passé avant, j’ai quand même loupé Fucked Up et The Bronx. Mais je n’allais certainement pas rater Alkaline Trio, groupe de mon coeur et de maintes crises existentielles. J’étais même par hasard au premier rang, mais quand tu es au premier rang du concert d’un groupe dont tu connais tous les morceaux, et que tu n’as pas la moindre idée de ce qu’ils jouent, soit c’est Radiohead, soit le son est pourri parce que tu es trop près. Je me suis reculé, recentré, et c’était tout de suite nettement mieux. Une heure d’Alkaline Trio, c’est peu (même si nettement trop pour mes compagnons d’un jour qui ont quitté la tente, voire le site) mais Messieurs Skiba, Andriano et Grant ont fait un maximum, piochant dans presque tous leurs albums, passant d’un chanteur à l’autre pour un set sans temps mort, sans point faible. S’il y avait un Dieu, il devrait les bénir.

Il était alors 1h du matin, mes pieds étaient en compote, mon dos une autre métaphore fruitée, mais ce n’était pas fini, oh non… Car dans le Marquee allaient commencer ces sauvages punk cinglés de Godspeed You! Black Emperor. Alors, oui, j’aime beaucoup GYBE. Leur dernier album est fabuleux, et leur concert était magique, une dizaine de musiciens qui jouent 3 morceaux en 1h30, des morceaux qui vivent, qui évoluent, des musiciens qui se nourrissent les uns des autres. Mais à ce moment-là, dans cet état physique, c’était assez dur à supporter. Mais un peu comme un concert de My Bloody Valentine, ou de Fucked Up justement, c’est une expérience physique intense, et c’est ça aussi, la musique : une expérience physique.

C’était donc aussi bien que possible, ce Pukkelpop 2013, on pardonnera même à Trenty son ptit caca nerveux. Mais comme évoqué plus haut, je continue à penser qu’un festival tel que celui-ci, c’est comme un repas qui sent meilleur qu’il ne goûte. Les clashes horaires, le son souvent à la ramasse, des sets toujours courts voire raccourcis, un public absent (mais heureusement pas hostile, on n’est pas en UK) : c’est l’évidence même de le dire, mais les concerts en salle, c’est quand même mieux. Malheureusement, l’état actuel de l’industrie musicale et l’insignifiance générale de ce pays en termes de salle de taille décente (plus grand que l’AB, plus petit que le Sportpaleis, moins pourri que la Lotto Arena) font que beaucoup de ces groupes (au hasard, NIN, Deftones, Alkaline Trio, Eminem, et j’en passe) ne s’arrêteront ici que pour jouer à Werchter/Dour/Pukkelpop. C’est donc ça, ou rien. Même si c’est souvent rien, parfois, je choisis ça. Et je ne le regrette pas.

edit : j’ai honteusement oublié de dire que j’ai aussi retrouvé mon pote Tony avec qui j’ai vu Deftones, et qui a écrit un compte-rendu des trois jours (parce que lui, il est cinglé) sur son excellent blog, Music Doesn’t Exist in my Country.

Nine Inch Nails – The Slip

Cinquième album de Nine Inch Nails en trois ans, The Slip dépasse tous les autres en matière de distribution : en effet, Trent Reznor l’offre, totalement gratuitement, en quatre formats numériques différents (avant une sortie en magasin). Reznor arrive ainsi à l’aboutissement logique de sa démarche, nettement plus crédible que celle de, allez, Radiohead.

Mais même si on ne tarira pas d’éloges sur l’importance de ce que Reznor fait au niveau des nouveaux modes de distribution, il faut garder un certain recul quand à la qualité du matériel sorti. Pour quelqu’un qui avait l’habitude de laisser couler de longues années entre deux sorties, est-ce possible de sortir deux albums en trois mois sans que la qualité ne s’en ressente?

Après une courte introduction instrumentale, 1,000,000 entame les débats avec une intro à la batterie étrangement empruntée à Pearl Jam (Last Exit). Mais après cette référence amusante, on se rend vite compte que Reznor n’avait plus sonné aussi organique depuis un bon paquet d’années. Assez loin des considérations électro de Year Zero, on se rapproche plus de With Teeth, même si l’esprit nous ramène encore plus loin, aux premières années de Nine Inch Nails. D’ailleurs, en parlant d’organique, il est intéressant de constater que, contrairement aux habitudes où Reznor fait tout, les musiciens qui accompagnent NIN en tournée (Alessandro Cortini, Robin Finck, Josh Freese) jouent sur cet album, lui conférant ainsi un son plus live. Ceci dit, on regarde les repères classiques, c’est clairement du NIN : les paroles, le chant, la disto, le son, tout est là.

Letting You continue dans ce thème, étant carrément agressif et bruyant, jusque dans le fltre qui modifie la voix de Reznor. Rien de totalement nouveau, certes, mais, je le répète, on pouvait croire qu’on avait perdu cette facette de Nine Inch Nails, il semble qu’elle était simplement en veilleuse. On peut chercher pourquoi Reznor est partiellement revenu à ses premières amours, mais cela n’aurait pas beaucoup d’intérêt. De toute façon, maintenant que l’on sait qu’il contrôle chaque étape de la création artistique, on sait qu’il est exactement là où il veut être. Et cela inclut le premier extrait radio (ben oui, single ne veut plus dire grand chose), Discipline, qui est pop sans aucune honte. Avan de crier à la trahison, il serait intéressant de s’y intéresser un peu plus, les parties discrètes de piano (merci, Ghosts) lui offrant un niveau d’écoute supplémentaire. Sinon, et c’est un grand classique, les singles de NIN sont rarement les meilleurs morceaux.

La première partie de The Slip est presque l’antithèse de Year Zero. Les guitares dominent, souvent (mal)traitées. Echoplex tient sur un riff répétitif mais progressivement mutant, et inclut quelques lignes typiques de Reznor, qui exemplifient le manque de contrôle et de relevance (“my voice just echoes off these walls”), ce qui est évidemment un comble, vu le contexte de la sortie de l’album. Mais même si les guitares se font sentir, c’est évidemment le tout qui fait le son NIN, basse, programmation de beats, batterie, claviers, et tout le bricolage sonore qui les entoure. Head Down persiste et signe niveau sonore, jusque dans la confrontation (“hey, what you’re lookin’ at?”), tempérée par une explication dans le refrain, étonnamment mélodique. Un grand moment, assurément, d’un album jusqu’ici étonnant, inattendu et vraiment très bon.

C’est bien méconnaître Reznor que de croire qu’il va continuer longtemps comme ça : la fin de Head Down semble nous emmener vers une autre direction, qu’emprunte Lights In The Sky, dont la discrète intro piano/murmures nous renvoie directement au chef d’oeuvre de Trent Reznor, The Fragile. Alors que l’album était jusqu’ici assez accessible (enfin, tout est relatif), les sept minutes instrumentales de Corona Radiata changent la donne. Tout en ambiance, il n’a strictement rien à voir avec ce qu’on a entendu jusque maintenant, graĉe à sa multitude d’effets sonores très discrets (The Slip est un album à écouter avec un bon casque, si possible). Serait-ce cela, le concept The Slip : des morceaux directs et puissants, avant un glissement vers quelque chose de tangent, d’étrange? Il reste deux morceaux pour le savoir, mais Corona Radiata est, malgré tout, la pièce centrale de l’album, et un morceau d’une intensité remarquable, qui touche au sublime.

The Four Of Us Are Dying semble confirmer la théorie. Également instrumental, il est plus rythmé mais reste tout aussi intense, comme le titre peut le laisser sous entendre. Comme ses cousins lointains de Ghosts, on pourrait l’utiliser dans un film, mais alors pour conclure quelque chose de terrible. Demon Seed remonte la moyenne de BPM, et offre une ligne de basse peu rassurante. On est en effet au plus fort de la menace, avec Reznor murmurant littéralement au creux de l’oreille. Des nappes de guitares fortement filtrées semblent vouloir clôturer le morceau, dans le danger et l’incertitude la plus totale.

The Slip est le meilleur album de Nine Inch Nails depuis The Fragile, je ne vois pas comment on pourrait prétendre le contraire. Assez court, précis, et agencé très soigneusement, il montre un artiste de nouveau au sommet, après quelques années de recherche personnelle. La question initiale trouve donc une réponse évidente. Même si The Slip était sorti classiquement, sur iTunes et en magasin, il ne serait pas passé inaperçu. Mais ici, Trent Reznor soigne le fond et la forme, pour apporter quelque chose de rare dans le monde musical contemporain : une oeuvre d’art complètement dominée par l’artiste lui même, pure, totale, et libre.

Nine Inch Nails – Ghosts I-IV

On ne reviendra pas sur l’événement qui a entouré la sortie de cet album, dont l’existence était totalement inconnu il y a de ça une petite semaine. Ghosts I-IV, malgré son mode de distribution alternatif, est bel et bien le sixième album studio original de Nine Inch Nails, c’est d’ailleurs officiellement un Halo (chaque sortie officielle du groupe porte un numéro Halo, dans ce cas Halo 26).

Entièrement instrumental, il tiendra une place à part dans la discographie de Trent Reznor, mais ne doit pas être considéré comme une sortie mineure, car c’est loin d’êre le cas. Si on devait le placer quelque part dans la discographie de son auteur, ce serait assez près de The Fragile, double album ambitieux et étonnant de variété, les morceaux metallo-industriels succédant avec bonheur aux instrumentaux planants. C’est somme toute ce qu’on a ici. Comme d’habitude, Reznor a tout joué et composé, aidé par le fidèle Atticus Ross et quelques invités, dont Alessandro Cortini et Adrian Belew. Petite note au passage, les morceaux n’ont pas de titres, on y référera donc en tant que 1 Ghosts II, 7 Ghosts IV, etc.

Le début de l’album est placé sous la domination du piano. Reznor se la joue classique et ambient, autant influencé par Chopin que par Aphex Twin. L’ambiance générale est difficilement explicable, car elle est très volatile et ephémère : le calme du piano laisse place aux distortions parfois sévères (4 Ghosts I n’aurait pas été renié par Sonic Youth). Tout ici est sujet à variation : les rythmes, les instruments (du banjo chez NIN, qui l’eut cru), les durées des pistes (de deux à cinq minutes). Reznor a explicité sur son site le caractère cinématographique de l’oeuvre, on peut effectivement imaginer des paysages en mouvement, accompagnés par la bande originale de la promenade, de la rêverie. Un blu-ray animé est d’ailleurs compris dans l’édition spéciale de l’album.

Les morceaux sont donc assez schizophrènes, parfois dans la même minute. Tantôt mnimalistes, tantôt bruyants, ils ne laissent jamais rien au hasard, et explicitent encore un peu plus le génie de Trent Reznor. On trouve quelques surprises, comme un passage assez folk avec guitares slide ou un autre très speed., pour carrément atteindre le sublime, 28 Ghosts IV. Rien n’est à jeter, et tout peut être réutilisé : la licence Creative Commons sous laquelle l’album est sorti permet l’utilisation et le remixage illimité.

Non seulement Ghosts I-IV est le plus grand pas jamais effectué vers une transformation idéale du modèle de distribution/extortion actuel, mais c’est aussi la meilleure chose que Trent ait fait depuis The Fragile. Libre de toute contrainte, il a pu livrer une oeuvre passionnante, qui, et c’est déjà confirmé, connaîtra une suite. On l’attend avec impatience, tout comme son prochain album vocal (suite de Year Zero?).

Si d’aucuns ont été déçus, ou du moins préoccupés, par les deux derniers albums, Ghosts I-IV nous apporte le meilleur de Trent Reznor, et cimente sa place dans l’histoire de la musique contemporaine. Mais il pourrait avoir un rôle encore plus important dans les mois à venir, celui de pionnier non seulement artistique, mais aussi commercial. Il mérite le respect.