Archives de catégorie : Chroniques

R.E.M. – Live at the Olympia

Alors que R.E.M. travaillait sur leur dernier album, , ils ont eu l’excellente idée de passer cinq jours à l’Olympia de Dublin, pour tester les nouveaux morceaux. Ce double album (2h30) reprend l’intégralité (dans un ordre relativement aléatoire) des morceaux joués lors des cinq dates, et est un énorme cadeau aux fans qui suivent le groupe de 1982 à nos jours. Il est fort différent des concerts « classiques » du groupe : quasi aucun hit, aucun single. A part (et encore!) Drive ou Electrolite, on peut parier que ceux qui ne connaissent R.E.M. que via les singles, vidéos et best of n’auront aucune idée de ce qui se passe ici. Le groupe a joué 39 morceaux différents en 5 dates, morceaux qui se répartissent sur toute leur carrière avec notamment quatre des cinq extraits de leur premier EP, Chronic Town. Entendre ces morceaux en live est une expérience unique et intéressante : certainement pour le fan, qui n’a que rarement eu l’occasion de la vivre, mais aussi pour ceux qui connaissent moins R.E.M. : comme c’est souvent le cas chez les grands groupes, les morceaux connus (très connus) sont rarement les meilleurs.

En ce qui concerne les nouveaux morceaux, presque tout Accelerate a été joué, et les commentaires de Michael Stipe indiquent qu’ils étaient toujours en plein travail : Man-Sized Wreath est introduit comme un morceau « qui ne sera pas sur l’album » (il le sera) alors que On The Fly, un des préférés de Stipe, ne le sera pas. On the Fly est d’ailleurs un des deux inédits de l’album, l’autre étant le sympathique Staring Down The Barrel of the Middle Distance.

Long et parfois obscur, Live at the Olympia est une excellent album live, et surtout un concept fantastique qui donne vraiment, vraiment envie d’être fan du groupe. Quelle bouffée d’air frais par rapport à ces groupes à la setlist quasi inchangée et aux tournées mégalostupides.

The Beatles – Past Masters Vol. 1 (1988)

Histoire de terminer ce qu’on a souvent tendant à appeler la première moitié de la carrière des Beatles, j’ai choisi de couper en deux le double Past Masters, qui était d’ailleurs disponible pré-remaster en deux volumes. Le concept Past Masters est simple : ce sont tous les morceaux des Beatles sortis en face B de single, ou en EP, mais pas en album. Ils ont été compilés pour la sortie cd de 1988, et sont donc évidemment remastérisés ici. Comme toute compilation de face B, on retrouve du dispensable, mais comme, à l’époque, les singles (45 tours) se retrouvaient rarement sur album, on a des très gros morceaux de choix.

Love Me Do commence la compilation, une version différente avec Ringo Starr derrière les fûts, et une basse plus puissante. Cette version est nettement plus dynamique que celle du premier album, dès leur premier single, les Beatles ont réussi à faire ce que personne n’avait fait avant eux. From Me To You, sympathique, leur offre leur tout premier numéro 1, mais montre clairement les limites du remaster stéréo : les voix ne sont audibles que du côté droit, ce qui donne une impression vraiment dérangeante. Comme c’est généralement le cas pour les premiers albums (au moins les quatre premiers), on préférera les monos, tout en regrettant qu’ils ne soient disponibles que dans un boxset très limité et assez cher.

Les deux morceaux de bravoure de l’album sont She Loves You et I Wanna Hold Your Hand, deux popsongs inouïes de perfection sonore. Les « yeah yeah yeah » de She Loves You auront probablement toujours une implication dans les chansons pop de l’année 2115, et le rythme imprimé par le duo McCartney/Starr est toujours impressionnant aujourd’hui. Ces deux extraits exceptionnels sont aussi repris en allemand, ce qui fait sourire une fois ou deux. Le reste de l’album n’est pas désagréable, bien sûr, mais n’arrive plus à ce niveau, même si le riff dantesque (et les expériences de feedback) de I Feel Fine et le rock n roll pied au plancher de I’m Down s’y rapprochent. Forcément indispensable, cette demi-compile clôture donc une époque, même si la transition avec Rubber Soul pouvait déjà se faire sentir.

The Raveonettes – In And Out Of Control


Avec My Bloody Valentine qui revient en force et de nouveaux groupes comme A Place To Bury Strangers pour renouveler la flamme, le shoegaze ne se porte pas trop mal, pour un mouvement mort. Lust Lust Lust, le précédent album des Raveonettes était plus fuzzy qu’une usine de Big Muff, mais arrivait à y allier une recherche mélodique quasi surannée. Il était aussi surpuissant et sans concession, à un point tel qu’il était impossible pour le duo Danois de continuer dans cette veine. Alors, ils ont allégé la musique, repris les habitudes des albums précédents, et poli la production : l’aiguille est maintenant plutôt dans la zone pop.

Pop with a twist, évidemment. Parfois des gros beats un peu bourrins (Bang, Suicide) mais souvent une jolie recherche mélodique, qui va de pair avec la voix de Sharin Foo. Bien sûr, le bruit et le feedback ne sont jamais bien loin (Gone Forever), mais ils ne sont plus la caractéristique principale de leur son. Last Dance renoue même avec les tubes à la Attack of The Ghost Riders. Mais que dire des paroles… Je ne l’ai remarqué que vers la fin : In and Out of Control est une sorte d’album-concept sur la violence, notamment la violence conjugale. Quand on s’y attache, c’est vraiment bizarre, surtout que les thèmes sont en contrepoids total avec la musique éthérée et aérienne. Il est par exemple quasi impossible de ne pas avoir en tête le refrain-titre de … Boys Who Rape (Should All Be Destroyed). Franchement embarassant. Autre exemple, Oh I Buried You Today fait penser à la pop des 50s, à Nancy Sinatra (et son Bang Bang) mais est empreint d’un malaise prégnant.

On perd d’ailleurs assez facilement le fil de cet album, qui ressemble plus à une collections de morceaux pas très soignés, alors que le but (producteur + studio alors que Lust Lust Lust était autoproduit at home) était sans doute différent. On retiendra toute fois le fantastique Heart of Stone, même si son riff lorgne un peu trop vers le Lateralus de Tool et Break Up Girls, seul morceau où Sune Rose Wagner se lâche enfin un peu sur les pédales. Sinon, In and Out of Control reste un bon album, mais trop impersonnel, et bien trop loin du précédent. Il fallait peut-être cela pour repartir de l’avant, reculer pour mieux sauter. On le verra dans deux ans.