Deftones – Saturday Night Wrist

On les croyait morts, les Deftones, minés par le conflit interne imposé par le chanteur, l’imposant (il a triplé de volume en 10 ans) Chino Moreno. Après le semi-échec commercial et critique de l’éponyme quatrième album, Chino décida de quitter le groupe, sans prévenir, durant les sessions d’enregistrment du cinquième. En résulta une grosse tension qui a failli faire éclater le groupe, mais aussi le projet parallèle de Chino (Team Sleep) et une compilation de raretés des Deftones. Quelques mois plus tard, après moults retards, Saturday Night Wrist voit le jour, et surprise : c’est peut-être leur meilleur album à ce jour.

Les Deftones ont toujours compté sur deux éléments pour rendre leur musique unique : la voix de Chino, murmure habité, et les atmosphères musicales, pouvant aller du (très) bruyant au calme, quasi ambient. Et c’est évidemment le cas ici, dès le morceau d’ouverture et premier single Hole In The Earth. L’album est homogène, mais compte sur quelques modificaitons de la formule pour ne pas céder à la facilité : Rapture et Rats! Rats! Rats! comptent parmi les morceaux les plus violents jamais enregistrés par le groupe, Mein voit la collaboration réussie de Serj de System of a Down, et on retrouve même un superbe instrumental dont le titre fera sourire ceux qui comprennent la (semi) private joke (U,U,D,D,L,R,L,R,A,B,Select,Start).

On peut toutefois se demander ce qui Pink Cellphone vient faire au beau milieu de l’album : ce monologue borderline ridicule de Annie Hardy (Giant Drag) n’a pas sa place dans l’album (mais la fin est tordante, si vous avez la version non censurée), mais heureusement la suite vient confirmer ce qu’on pensait déjà : SNW est un des meilleurs album s del’année, tous genres confondus, et se retrouve avec White Pony au panthéon des meilleurs albums métal contemporains. Etonnant, mais vrai.

Foo Fighters – Skin And Bones

Cela peut paraître surprenant que le premier album live des Foo Fighters, groupe peu connu pour faire dans la dentelle live, ait été enregistré lors de leur petite tournée semi-acoustique, destinée à promouvoir la seconde partie de In Your Honour. Les quatre Foo Fighters étaient alors accompagnés de la violoniste/choriste Petra Haden, du clavieriste Rami Jaffee et de l’ex-Nirvana et Foo Pat Smear à la guitare.

On ne doit donc pas s’attendre à des brûlots punk genre Monkey Wrench, mais plutôt à des morceaux calmes, comme ceux qui forment la majorité du setlist, les extraits du second CD de In Your Honour, comme l’excellent Friend of a Friend, écrit par Dave Grohl lorsqu’il était encore batteur de Nirvana. Nirvana dont les Foo reprennent Marigold, écrité et interpretée déjà à l’époque par Grohl. Mais c’est néanmoins les classiques du groupe qui fonctionnent le mieux ici, comme Times Like These, Big Me, Walking After You, et surtout, évidemment, Everlong (qui se retrouve systématiquement dans les listes des meilleures chansons des années 90).

Les arrangement sont classieux sans être lourds, et sont toujours au service de la musique, joué par un groupe qui a parfois un peu de peine à se retenir, sans doute un manque d’habitude (Best of You acoustique, pas une bonne idée). Il reste que Skin and Bones est un bon album, qui montre une autre facette de ce très bon groupe, qui petit à petit devient un des classiques du rock contemporain. Il faut juste faire attention de ne pas comparer Skin and Bones avec un autre album acoustique où apparaissait également Dave Grohl…

Ramones – Ramones (1976)

On passera sur la question sans aucun intérêt de qui a inventé le punk, pour s’attarder sur un des albums majeurs de la genèse du mouvement (ils seront tous chroniqués ici tôt ou tard). Les quatre Ramones ont réinventé le monde musical d’une manière que peu de monde l’a fait depuis, et pour deux raisons majeures : d’abord, ils ont eu le génie de mélanger musique « dure » et pop, refrains mémorables sur riffs métalliques. Ensuite, vu leur légendaire limitation technique (qui n’était d’ailleurs pas si grande), ils ont montré que n’importe qui pouvait prendre une guitare et former un groupe, ce qui a évidemment permis de créer des centaines de groupes, dont certains tout à fait majeurs (il suffit de regarder la liste des artistes qui ont participé à l’album hommageWe’re a Happy Family).

L’album éponyme est le premier d’une terrible série de huit albums excellents (la suite fut moins glorieuse), et peut-être le meilleur (Leave Home et Rocket To Russia ne sont pas loin). Rien n’est à jeter ici, que ce soit les morceaux punk prototypiques (Blitzkrieg Bop, Now I Wanna Sniff Some Glue, Beat On The Brat) à ceux plus lents (I Wanna Be Your Boyfriend, qui aurait pu être une production Spector pour les Ronettes).

Tenter de décrire ce disque est inutile, il faut l’écouter pour comprendre, car l’alchimie entre les regrettés Johnny (guitare), Joey (chant) et Dee Dee (basse) est unique dans l’histoire du rock n roll, et a permis d’en faire un de ses meilleurs représentants.

Pendant ce temps, à New York, le jeune Ian MacKaye préparait, casque sur les oreilles, l’étape suivante alors qu’à Londres, Joe Strummer et Malcolm McLaren avaient leurs propres idées… J’y reviendrai.

The Datsuns – Smoke And Mirrors

Qui se souvient encore des Datsuns, ce groupe neo-zélandais qui était au coeur du mouvement revival hard rock d’il y a quelques années? Clairement plus grand monde, et c’est peut-être dommage, vu leur excellent second album qui était passé inaperçu presque partout (sauf ici). Ceci dit, le troisième est nettement plus douteux, vu qu’ils ont décidé de virer le son plus varié et ambitieux du second pour tenter de revenir à la sobriété rock n roll du début. C’est généralement raté, et très vite oubliable. Les meilleurs morceaux sont presque des auto-parodies (Maximum Heartbreak est le jumeau de Harmonic Generator) et puis, c’est marrant de voler Led Zep, mais à la fin, ça fatigue. Et ce n’est pas les morceaux acoustiques maladroits qui relèvent le niveau. Il faudra vraiment un exploit pour qu’on entende de nouveau parler du groupe un jour.

Metallica – Master of Puppets (1986)

En trois ans de rédaction pour Music Box (entre autres), j’ai remarqué que si je venais à dire du mal de Metallica, je me prends à chaque fois plein dans la gueule dans les commentaires. Ce qui malheureusement confirme un cliché, mais je tenais à affirer ici que je ne déteste pas Metallica, au contraire. Ce n’est pas parce les membres du groupe sont des abrutis de première (Some Kind of Monster, le film et l’affaire Napster suffisent), qu’ils ont sorti trois (voire quatre, mais là je m’expose à l’anthrax dans ma boîte aux lettres) albums très pénibles et que les deux nouvelles chansons jouées en 2006 sont ridicules que le groupe n’a jamis rien valu, bien au contraire.

Master of Puppets, qui fête ses 20 ans cette année (c’est le premier album que je chronique dont je n’ai pas vécu la sortie – j’avais 6 ans) est le meilleur album du groupe, il est difficile de le nier (même pas la peine de mettre les mots « black » et « album » dans un commentaire). Le groupe lui a d’ailleurs rendu hommage lors de leur petite tournée 2006, en le jouant dans son intégralité.

L’album commence par la fameuse intro flamenco de Battery, qui est tellement connue aujourd’hui que son effet de surprise est passé, mais reste que le morceau qui la suit est un archétype d’offensive trash metal, emmené par ce qui est sans doute le principal point fort de Metallica, la guitare rythmique extraordinaire du chasseur d’ours blanc James Hetfield. Le tout aussi classique morceau titre le confirme, avec son intro légendaire qui ne permet heureusement pas encore de montrer les lacunes du batteur Lars Ulrich. On peut dire, sans doute à raison, que ce genre musical est aujourd’hui suranné, et les morceaux de 8 minutes sans trop de variation seraient maintenant risibles, mais il reste que la puissance de ces morceaux est indéniable.

Un peu plus loin, Welcome Home (Sanitarium) suit la formule de Fade To Black (sur Ride The Lightning, personnellement mon préféré), à savoir une intro mid-tempo suivi d’une suite plus dynamique. Quelques années plus tard, Metallica sortira un album entier sur ce principe, même si le tempo lent sera prévalent. Disposable Heroes accèlere les choses, et reste, avec le dernier morceau ici, Damage Inc., un de leurs morceaux les plus rapides. On doit aussi retenir le splendide instrumental Orion, dominé par la basse du très regretté Cliff Burton.

Master of Puppets ne possède plus la même puissance aujourd’hui (même si une bonne remasteristation arrangerait les choses), mais il reste un album majeur pour la carrière de Metallica et pour le metal en général, vu que tout ce qui va suivre sera lourdement influencé par cet album. Un classique, par définition.

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