Mystery Jets – Making Dens

Parfois, sans qu’on s’y attende, arrive un groupe à contre-courant des tendances actuelles, et qui pense que zeitgeist est une tactique de guerre allemande. Aujourd’hui, ce groupe, c’est Mystery Jets, dont l’histoire est tellement bizarre qu’elle mérite qu’on s’y attarde.

D’abord, ils ne viennent pas de Dalston, de Burnage ou de Rotherham, mais d’une île sur la Tamise, Eel Pie Island, qui héberge squatteurs et rejetés de la société en tous genres. Ensuite, ils comptent quelques multi-instrumentistes, dont le chanteur/percussionniste/bidouilleur électro Blaine Harrison, et son père (oui, son père), le guitariste/bassiste/tambourineur Henry Harrison.

Enfin, leurs chansons racontent toutes des histoires nécessairement tordues (genre on écrit une chanson sur l’amitié entre les chats et les souris, et on l’appelle You Can’t Fool Me Dennis).mais parfois poignantes, comme l’autobiographique Little Bag Of Hair (Blaine est atteint de spina bifida, qui l’a forcé à passer une bonne partie de son enfance à l’hôpital, et qui paralyse ses membres inférieurs).

Il est difficile de comparer Mystery Jets, mais on peut toujours invoquer Super Furry Animals (pour la bizarrerie couplée à la sensibilité pop) ou The Beta Band (pour la grande variété d’instruments). Mais intrinsèquement, la folie pure de Zootime, morceau trippant limite drum n bass, perturbé de cris répétitifs), ou la mélancolie tragi-comique de Alas Agnes n’existent que grâce à Mystery Jets.

Comme c’est un premier album, on y retrouve quelques défauts classiques : conscients de leur différence stylistique, les Jets versent parfois dans le trop étrange, et c’est à ce moment qu’ils perdent contrôle de leurs morceaux. Mais cela n’arrive pas souvent, et Making Dens sera un des meilleurs débuts de 2006, voire un des meilleurs albums tout court.

Mudhoney – Under A Billion Suns

Quand on parle du quatuor légendaire du grunge, on cite généralement Nirvana, Soundgarden, Alice In Chains et Pearl Jam. Mudhoney est systématiquement omis, malgré une grande influence et quelques excellents albums. En plus, contrairement à 3 des 4 groupes cités, ils existent toujours, et sortent (à quelques semaines de Pearl Jam) leur nouvel album, Under A Billion Suns, 18 ans après leur fameux morceau Touch Me I’m Sick.

Toutes ces années n’ont pas (trop) usé le groupe : les guitares de Steve Turner et Mark Arm sont toujours aussi distorted et overdriven, et la voix de ce dernier reconnaissable entre 1000, et très efficace. Where Is The Future, It Is Us, ou l’excellent Hard-On For War sonnent comme des classiques grunge, agrémentés parfois de discrètes trompettes et saxophones.

Mais les influences ne se réduisent pas à Seattle : I Saw The Light, par exemple, voit Mark Arm invoquer l’esprit de Jim Morrison et du pur rock/soul.

L’album est très complet, sans aucun morceau faible. On regrettera juste les paroles, assez simplistes, surtout quand le groupe se met à politiser. Ceci dit, UABS est un très bon album, et très impressionnant de la part d’un groupe qui a vingt ans d’âge.

Mclusky – Mcluskyism

Je parle souvent d’injustice dans Music Box, mais à ce point-là, c’est grave. Mclusky n’est plus, détruit par des querelles internes et le manque de succès commercial, malgré trois excellents albums, dont un carrément fantastique (Mclusky Do Dallas).

Cette grave erreur peut être réparée ici, avec la sortie de Mcluskyism, simple best of ou anthologie selon les versions. En effet, on a le choix entre l’édition simple, reprenant leurs singles, ou la totale (faces A, B et, hmmm, C).

Les faces A, soit 28 minutes de pure perfection, sont indispensables : noise, punk, rock, attitude, sarcasme… Difficile de trouver une seule seconde qui aurait du être modifiée. Et encore, on ne parle que des singles, un vrai best of aurait été encore plus impressionnant.

Tout cela est très bien, mais pour quelques euros de plus, on préfèrera la version spéciale, qui ajoute donc deux disques.

Les faces B sont généralement d’un très bon niveau, et voient le groupe dévier un peu de leur répertoire habituel, avec un morceau country et un carrément hip-hop. Certains morceaux auraient carrément pu se retrouver sur le premier disque, comme Love Song For A Mexican.

Enfin, les faces C ajoutent un disque bourré de nouveau matériel, soit des inédits (dont l’excellent The Difference Between You And Me Is That I’m Not On Fire), des démos et une bonne demi-heure de leur dernier concert à l’ULU de Londres, historie de finir l’anthologie en montrant Mclusky dans leur élément.

Vous l’aurez compris, Mcluskyism est indispensable pour tout le monde : le premier disque pour ceux qui veulent connaître le groupe, le second pour les amateurs non acharnées, et le troisième pour ceux qui ont déjà tout.

This is my music box, this is my home. Since 2003.