Isobel Campbell – Milkwhite Sheets

Isobel Campbell est connue en tant qu’ex-violoncelliste de Belle And Sebastian, mais 2006 est l’année qui la voit définitivement s’envoler de ses propres ailes, et a ce train-là, la référence à B&S sera bientôt tout à fait inutile, si ce n’est pas déjà le cas.

Milkwhite Sheets est son second album de l’année, et suit Ballad Of The Broken Seas, magnifique album réalisé avec Mark Lanegan. Ballad est peut-être l’album de l’année, la concurrence est donc rude pour celui-ci, et Isobel le sait bien. en effet, là où Ballad pouvait plaire à un public plus large (enfin, faut pas pousser c’est pas Placebo non plus), Milkwhite Sheets est beaucoup plus typé folk. La voix angélique est évidemment là, fluette, parfois pas juste mais toujours émouvante, parfois limite inaudible.
L’instrumentation fait la part belle à la contrebasse, la harpe et le violoncelle, ce qui confère à l’album un sentiment anachronique très marqué, et la préciosité de la demoiselle peut très facilement énerver. Mais dès qu’on se laisse conquérir, on découvre un univers éthéré, aussi pur que les draps du titre. Les deux berceuses endormeraient n’importe quel adulte en trois minutes (les bébés, c’est plus dur) Et quand Isobel se la joue a capella sur Loving Hannah, le monde s’arrête.

Moins mainstream, et sans doute moins percutant que Ballad Of The Broken Seas, Milkwhite Sheets reste un splendide album, montrant à la mouvance new folk actuelle la voie à suivre. Nous, on suit.

Albert Hammond Jr. – Yours To Keep

Pour commencer, deux faits incontestables. 1. Albert Hammond Jr est un des guitaristes des Strokes (celui avec l’afro et qui tient sa guitare collée contre son menton). 2. Yours To Keep est un titre affreux.
Voilà. Nous pouvons maintenant parler de l’album, qui a vu le jour suite à la frustration de Hammond, qui voyait toutes ses compostions refusées par Julian Casablancas, Noel Gallagher new-yorkais. Sauf qu’à entendre cet album, il n’a pas toujours eu raison, le Jules, tant les meilleurs morceaux de Yours To Keep auraient pu sans aucun problème se retrouver dans un des trois albums du groupe. De plus, sa voix, tout à fait décent, n’est pas trop différente (juste plus précise) que celle de Casablancas.
On retrouve donc de l’indie rock à la Strokes, agrémentés de claviers très eighties, et d’une production assez lo fi. Albert tente parfois de s’éloigner de son job habituel, mais c’est généralement avec maladresse, comme le prouvent un solo de sifflet (?) et des trompettes de mariachis(re-?).
C’est donc quand Hammond évoque l’esprit de son groupe qu’il est le meilleur, et qu’on se demande pourquoi Casablancas a refusé Back To The 101, qui aurait été un des meilleurs Strokes.
Yours To Keep est un album correct, qui ne tombe pas dans le piège du solo prétentieux du guitariste. Il n’arrive pas au niveau des meilleurs Strokes, mais au moins il a essayé, en s’en sort avec les honneurs.

Incubus – Light Grenades

Ceci ne me rajeunit clairement pas, mais Light Grenades est le sixième album des Californiens d’Incubus, qui, en une bonne dizaine d’années, ont connu, et survécu à la vague nu-metal qui nous a infligé des grands noms du rock comme Limp Bizkit, Linkin Park ou Mudvayne (qui?). Ils ont survécu de la meilleure manière qui soit, en laissant la musique évoluer. Après des débuts tonitruants, avec notamment l’excellent S.C.I.E.N.C.E., le groupe a connu un certain succès commercial grâce, en grande partie, à une radio-friendlisation de leur musique. L’album de 2004 (A Crow Left Of The Murder) avait compliqué un peu la tendance, en montrant que ce qu’Incubus faisait de mieux, c’était des pop songs enfermés dans des instrumentations assez complexes. Light Grenades confirme tout cela, et est aisément leur album le plus abouti à ce jour.

L’album débute par l’étrange Quicksand, plus une pièce ambient/spacerock qu’un morceau en soit, qui se termine là où A Kiss To Send Us Off débute. Ce dernier est un bon morceau rock, dont le refrain emprunte gentiment les accords de World Wide Suicide de Pearl Jam, une des références majeures du groupe, en terme de trajectoire de carrière.

Le plus gros hit du groupe était la ballade Drive, c’est sans doute pour cela que le groupe (ou Sony?) a inclus un morceau qui pourrait égaler ce succès, deux même. Dig n’est pas vraiment extraordinaire, Love Hurts est déjà beaucoup mieux (malgré les paroles un peu Myspace), mais elles remplissent bien leur rôle, tout en détonnant un peu avec le reste de l’album, comme le premier single, le fantastique Anna Molly. Brandon Boyd n’est pas un chanteur exceptionnel, mais il sait jouer de ses qualités, comme sur ce morceau, influencé juste ce qu’il faut par The Police croisé avec un peu de prog rock.

On peut en profiter pour signaler l’excellence musicale du groupe, dont chaque membre réussit à se démarquer sans jamais se mettre en avant et assombrir le groupe en tant que tel. La section rythmique est très solide (euphémisme), le guitariste Mike Einziger joue de ses pédales d’effet juste ce qu’il faut, et DJ Chris Kilmore apporte vraiment un plus, ce qui n’est pas le cas de tous les DJ rock (autre euphémisme). Et après la seconde ballade (Love Hurts, donc), Light Grenades est carréménet les 2 minutes 20 les plus rapides et violentes de la carrière du groupe, un pur concentré d’énergie. Franchement, ça fait du bien de les voir faire du full on rock, comme quoi, évolution ne veut pas toujours dire ramollissement (non, je n’ai rien dit, même pas cité un autre groupe californien qui aurait sorti un double album cette année). Earth To Bella clôture la première partie de l’album, : début calme, et bridge limite Mogwai.
La suite est plus complexe, parfois expérimentale, mais jamais très difficile d’accès. En fait, la première partie a servi à attirer l’auditeur, et la seconde réussit à les conserver. On retiendra surtout l’excellent Rogues et le bizarre Pendelous Threads. La seconde partie d’Earth To Bella clôture en beauté ce superbe album, d’un groupe aux ressources étonnantes, et dont la carrière semble de plus en plus intéressante.

Oasis – Stop The Clocks


Noel Gallagher a un jour dit qu’Oasis ne sortirait de best of que lorsqu’ils n’existeraient plus. Sony/BMG est passé par là, et a forcé le groupe à compiler Stop The Clocks, histoire de terminer leur contrat. Noel n’a eu d’autre choix que d’accepter, mais il a au moins eu le bon goût de définir lui-même le tracklist et de ne pas inclure d’inédits, toujours inférieur au matériel compilé. Et dans ce cas, quel matériel!

Contrairement à la majeure partie de compilations de Noël (sans jeu de mot), celle de U2 étant un exemple parfait, on se base sur le succès commercial des singles et on prend les plus gros. Ici, rien de tout cela : moins de 50% des singles du groupe sont repris ici, ainsi que des morceaux d’albums et quatre faces B. Maintenant, quand on connaît la carrière d’Oasis, on sait que leurs faces B datant de 94 à 95 sont dans bien des cas supérieures aux singles, donc ce n’était pas un problème.

Le problème, c’est bien sûr l’immense chute de qualité de leurs albums, à dater de Be Here Now (1997). Résultat, des 18 morceaux présents ici, seuls quatre datent d’après 1995, et leur album What’s The Story (Morning Glory)? Et encore, ce sont clairement les quatre morceaux les plus faibles du disque. Gallagher le sait, tout le monde le sait, le best of d’Oasis, c’est simplement tout ce qui est sorti entre Definitely Maybe et Morning Glory. Supersonic, Live Forever, Cigarettes And Alcohol, Wonderwall, Don’t Look Back In Anger : ces morceaux font partie du patrimoine populaire anglais, auquel on peut ajouter Slide Away, Champagne Supernova ou encore The Masterplan, fréquemment citée comme meilleure face B de tous les temps (Rain des Beatles leur dispute généralement cet honneur). On n’a rien à ajouter sur la qualité des chansons, très dérivatifs mais dignes représentants d’une époque majeure de la culture populaire anglaise.

En ce qui concerne Stop The Clocks, on ne peut que chicaner sur l’inclusion/exclusion de certains morceaux (personellement : Songbird, Go Let It Out, The Importance Of Being Idle out, Stay Young, Don’t Go Away et Rockin’ Chair in) et surtout de l’oubli total de tout ce qui concerne Be Here Now, album cocaïne par excellence mais non dénué de qualités, et de la relative brièveté de l’affaire: quitte à avoir deux cds, autant les remplir, 5-6 morceaux supplémentaires auraient pu être ajoutés sans trop de difficulté.

Mais le problème majeur est tout autre. En fait, Stop The Clocks ne sert à rien. Pour avoir le best of d’Oasis, laissez tomber cet album, et procurez vous Definitely Maybe, (What’s The Story) Morning Glory?, The Masterplan voire Be Here Now. Un peu plus cher, mais beaucoup mieux.

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