Le plus grand groupe hip-hop français de tous les temps (ce qui n’est pas très difficile) fait son come-back après 6 ans d’absence. Enfin, absence n’est pas le bon terme, car IAM, à l’instar du Wu-Tang, s’est dispersé en projets solo (Sol Invictus, Black Album pour Akhenaton,Où Je Vais pour Shurik’n, et albums aussi pour Kheops -la série des Sad Hill, Freeman, et Imhotep. Akhenaton s’est aussi lancé dans le cinéma, avec son premier long métrage,Comme un aimant. Le groupe s’est reformé, sept ans après le phénoménal succès de L’École du Micro d’Argent, et le résultat est cet album, Revoir un Printemps.
L’album délivre ses promesses, et arrive même à parfois surprendre. La principale particularité est, et ça commence à devenir une habitude, ce dont personne se plaindra, l’instrumentation live. En effet, les 18 morceaux ont tous été écrits via platines et boîtes à rythmes avant d’être rejoués par des musiciens : batterie, basse, guitare, claviers et même cordes et cuivres, ce qui confère une atmosphère particulière, chaude et mélancolique, qu’on avait plus retrouvé dans le rap depuis le premier solo d’Akh (Métèque et Mat). De plus, les ambiances sonores sont assez variées, passant allégrement du hip-hop old school aux mélodies arabisantes. Un très bon point donc pour les musiques, quid des textes ?
Eh bien de ce côté là rien n’a vraiment changé : lyrics ouvertement politiques (21/04 sur les présidentielles françaises, Armes de distraction massive, Bienvenue) et définitivement originales dans le hip-hop international (après un morceau sur la prostitution sur l’École, voici Fruits de la Rage, sur la violence domestique). Rien n’a changé, mais ces prises de positions sont nécessaires, même si hélas marginales. La principale innovation au point de vue voix est la présence affirmée (sur chaque morceau, contre deux sur l’École) de l’ex-danseur Freeman, à l’accent marseillais bien plus marqué que le chuintement caractéristique d’Akh. Freeman apporte pas mal au groupe, une troisième voix comme un troisième point du vue. Reste quand même les clichés fatigants propres à ce genre muscial, clichés nécessaires peut-être, mais parfois disgrâcieux.
Les featurings sont comme d’habitude peu nombreux, mais de grande qualité (commerciale mais aussi artistique): Method Man et Redman sur le single Noble Art et Beyoncé sur l’engagé Bienvenue.
Il est difficile de dire si cet album rencontrera l’immense succès du précédent, mais IAM n’a pas loupé son retour, en réussissant un bon album dans le cadre très fermé du rap français engagé. Plus une mise à jour réussie qu’une révolution, mais sans doute le meilleur album rap français de l’année.