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Rolling Stones – Rolled Gold +

stonesRolled Gold + n’est pas une compile de Noël en plus. C’est LA compile. Originellement sorti en 75 mais jamais édité en cd, il se voit augmenté de 12 morceaux (d’où le +) pour voir sa durée dépasser les 150 minutes. Il fait suite au précédent best of du groupe, Forty Licks, mais est nettement supérieur à celui-ci, pour deux raisons majeures. D’abord, le son est plus authentique, au dessus de la bouillie de Forty Licks. Ensuite, et surtout, même si on ne parle que de dix ans de Stones, tout était dit. Alors que, pour Forty Licks, il fallait accomoder les différentes époques du groupe et même caser quatre inédits, ici on ne doit juste que reprendre les meilleurs morceaux datant de 63 à 72, soit, en fait, de leur carrière. Bon, on pourrait peut-être, en tirant la corde, regretter It’s Only Rock ‘n Roll ou Start Me Up, mais Jump Back (la compile qui reprend 71-93) suffit amplement. Et le moins on parle d’Angie, le mieux c’est.

Comme leurs illustres pairs de l’époque, les Stones ont débuté avec des reprises de standards rock ‘n roll : Chuck Berry, Buddy Holly, et même un original de Lennon/McCartney. Peu de temps après, le premier original signé Jagger/Richard (Keith n’avait pas encore ajouté le "s") voit le jour. C’est à partir de 64 que la grande majorité des morceaux des Stones seront originaux. Même si Jagger a bien appris ses leçon : le double sens de Little Red Rooster sera repris tout au long de sa carrière, jusqu’au récent A Bigger Bang.

Les choses sérieuses ne commencent qu’avec le dixième morceau, The Last Time. Puis, la déferlante de morceaux exceptionnels. (I Can’t Get No) Satisfaction, forcément, mais aussi Get Off Of My Cloud, Paint It Black (sérieusement une des meilleures chansons de tous les temps, rien à dire), Mother’s Little Helper et ses traits acide de critique sociale chère à Jagger. Under My Thumb, s’il fallait le prouver, montre les talents de Charlie Watts, batteur d’une grande finesse avant que l’excellent Have You Seen You Mother Baby, Standing In The Shadows clôture le premier disque. On l’a déjà dit, le riff de Satisfaction pourrait déplacer des montagnes, et les différentes significations du texte ne font que renforcer son status d’icône. Mais je le répète, Paint It Black est vraiment un morceau exceptionnel, la voix de Jagger est légendaire, menaçante, terrifiante. Le premier crash de batterie de Watts vaut bien tout le heavy metal du monde.

Pas grand chose à dire, évidemment. Des débuts hésitants et forcément peu originaux, mais le rock ‘n roll était si jeune. La paire d’auteurs/compositeurs Jagger/Richards ne fera que monter en puissance, ce que le second disque montre parfaitement. Ruby Tuesday, She’s A Rainbow, Jumpin’ Jack Flash, Sympathy For The Devil, et un final ébourriffant : Gimme Shelter, You Can’t Always Get What You Want, Brown Sugar, Honky Tonk Woman et Wild Horses. Les mots ne suffisent pas, il faut se taire et écouter. Mais Gimme Shelter… Difficile, après tout ça, ne ne pas considérer le Stones, ces Stones, comme le plus grand groupe de rock du monde. Ils l’étaient.

Alors, forcément, ça a méchamment dégénéré. La paire Jagger/Richards vire au pathétique, entre concerts privés pour détenteurs de carte de fidelité de supermarché suisse et chute de cocotier, en passant par des albums dont personne n’a quoi que ce soit à foutre. Les Beatles n’ont eu que dix ans de carrière, Nirvana huit, les Stones quarante-cinq, et ce n’est pas fini. Alors, forcément, on perd de sa puissance, de son intensité, de son utilité. Ils auraient définitivement du raccrocher il y a bien longtemps, mais ce n’est pas notre décision. Notre décision, c’est de se souvenir des Stones par, et pour, Rolled Gold, qui compile leurs plus grands moments. On pourra toujours s’attaquer aux albums après Pirates des Caraïbes.

 
 
Paint It Black

 
 
Gimme Shelter

Rolling Stones – A Bigger Bang

Le monde n’a sans doute plus besoin des Rolling Stones, mais ils sont toujours là, pour on ne sait quelle raison. Au moins, ils vieillissent avec grâce et classe, nous offrent des top-modèles qui ont plus en leur faveur que leur nom de famille (Jade Jagger, Theodora Richards) et marquent de leur empreinte le plus gros film Disney de ces 10 dernières années (le personnage de Johnny Depp dans Pirates of the Caribbean est tellement inspiré de Keith Richards que ce dernier va jouer son père dans la suite, prévue l’an prochain).

Mais depuis Tattoo You (1981), ils n’ont sorti aucun bon album. Oh, ça n’a pas empêché les albums live, les tournées sold out hors de prix, le best of, les dvd et les remix des Neptunes. Mais on avait carrément arrêté de se demander si Jagger et Richards avaient autre chose à nous proposer que leurs querelles de vieux couple, tant la réponse semblait évidente.

C’était jusqu’à A Bigger Bang. Attention quand même, ce n’est pas Exile On Main Street, mais non seulement c’est le meilleur Stones en 20 ans, mais en plus, c’est un bon album tout court.

Il faut dire qu’il commence fort : Rough Justice est un brûlot rock n roll qui poussera probablement Jet au suicide (quel dommage, vraiment), emmené (comme tout l’album) par un Keith Richards inventif, créatif et parfois on fire, la slide graisseuse de Ron Wood, et évidemment par Charlie Watts, qui fait peine avec sa petite batterie, mais franchement, qui a besoin de plus ? Mick Jagger rajoute sa touche inimitable, avec de paroles pleine de sous-entendus, ou comment chanter “Once upon a time I was your little rooster / But am I just one of your cocks? ” à 65 ans sans paraître ridicule.

En fait, tout l’album est appréciable, pour diverses raisons. Parfois un riff de Keef, ou une ligne terrible de Mick, qui investit une personnalité de vieux bourgeois bougon, mais qui lui va si bien. Look What The Cat Dragged In le voir râler parce qu’il ne sait plus lire son journal en paix, Sweet Neo Con attaque très directement George W Bush (« hypocrite », « crock of shit ») et quand la politique locale et internationale l’ennuie, Sir Mick reprend sa bonne vieille voix de lion en rut (« She saw me coming », ce titre !!!). De plus, Keith prend le micro deux fois, dont une chanson d’amour touchante de sincérité (« Come on, bare your breasts and make me feel at home »).

L’album est sans doute trop long (16 morceaux), et on pourrait vivre avec deux-trois morceaux en moins, mais le choix serait difficile. Disons, pour être exact, que si les Stones avaient l’habitude de sortir de bons albums tous les 5 ans, on serait plus critique, mais bon, on sera indulgent. Streets of Love est horrible, ceci dit, on dirait presque une ballade d’Aerosmith. Mais le single n’est en rien représentatif, heureusement.

Bravo donc, pour avoir sorti un bon album, enraciné dans le blues et le RnB (dont le glissement sémantique est la pire chose qui soit arrivée ces dix dernières années) mais porté par d’excellents morceaux, et un talent musical qui était à redémontrer, c’est maintenant chose faite. Á dans six ans.

Rolling Stones – Live Licks

L’immense tournée des Rolling Stones se devait d’être immortalisée par un CD live, quelques mois après le fantastique pack DVD Four Flicks. L’album est divisé en deux disques distincts : le premier contient les hits habituels (Brown Sugar, Street Fighting Man, Angie, Gimme Shelter, Satisfaction), et le second des morceaux moins joués, voire carrément obscurs (That’s How Strong My Love Is, When The Whip Comes Down). Le tout est donc un bon souvenir pour ceux qui ont assisté à la tournée, mais restera un peu plus anecdotique pour les autres, voire limite insupportable lors de l’apparition de Sheryl Crow… Musicalement c’est solide, mais pas trop inspiré quand même, trop calculé et trop sage.

Un album de Noël de plus, en somme.