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Octobre 2013

2013 est maintenant presque terminé, en terme de sorties de nouveaux albums. Il ne reste plus que les éditions spéciales et compiles de Noël (Bowie, Beatles et quatre millions d’autres) et des artistes en perte de vitesse qui sortent après les autres histoire de minimiser la concurrence (Lady Gaga). Mais c’est peut-être en octobre qu’est sorti l’album de l’année, ou en tout cas celui dont parle le plus (avec Yeezus, allez). Et c’est sans problème mon album du mois.

ReflektorParce qu’il était très attendu, Reflektor, et annoncé par une campagne marketing roots et efficace. Arcade Fire est le plus gros groupe indé du monde, même s’il n’est pas stupide de dire qu’ils n’arriveront peut-être jamais à dépasser l’impact émotionnel de leur début, Funeral. Alors qu’il aurait été plus simple de se répéter, les montréalais ont engagé le leader de leur groupe préféré, James Murphy, pour produire un album radicalement différent. Reflektor est long (85 minutes, des morceaux dépassant allègrement les six), ambitieux (double album en deux parties thématiques) et terriblement varié, alliant du rock indé relativement classique à des influences haïtiennes (second pays du groupe) en passant par des références littéraires (Orphée et Eurydice) illustrant les thèmes chéris par le groupe comme la perte de l’innocence, l’enfance, l’évolution vers l’âge adulte, la mort. Il faudra sans doute des mois pour décrypter Reflektor, mais est-ce bien nécessaire?

Octobre a aussi vu la sortie du dixième album de Pearl Jam, qui succède au lamentable Backspacer. L’avantage de succéder à un album oubliable, c’est qu’il n’est pas bien difficile de faire mieux. Lightning Bolt est meilleur que Backspacer, mais il est peut-être aussi le meilleur album du groupe en dix ans. Malheureusement, il reste très frustrant : à côté de morceaux intéressants comme Infallible, Pendulum, le vitriolique My Father’s Son ou le déjà classique Sirens, Pearl Jam (ou le producteur Brendan O’Brien, qui devrait subir le même sort que Jaime Lannister un de ces jours) a jugé bon d’inclure Sleeping By Myself, déjà anecdotique sur l’album solo d’Eddie Vedder (lui-même anecdotique, pour être honnête) et présent ici en version navrante ou Future Days, qui a au moins l’avantage en tant que dernier morceau de l’album d’être facilement oublié. Frustrant, donc, surtout que les fans connaissent l’existence d’excellents morceaux (Of the Earth, Cold Confession notamment) qui semblent avoir été oubliés par le groupe. Occasion à moitié loupée, donc.

On a eu très peur pour Lemmy, qui a connu pas mal de problèmes de santé cette année, mettant à mal l’évidence de son immortalité. 2012 était la première année paire depuis 1994 à ne pas voir d’album de Motörhead, mais la patience est récompensée : Aftershock est un très bon album (bien que le niveau du trio est ahurissant depuis des années), plus varié que ce que l’on pense (à tort!) du groupe. Si Aftershock venait (mais ce ne sera pas le cas) à être le dernier album de Lemmy, on a connu bien pire épitaphe.

Pour le reste, octobre est un melting pot de sorties diverses et variées. Après moultes tentatives (toutes foirées) d’accrocher un semblant de renouveau, Korn joue son avant-dernière carte et fait revenir le guitariste Head, parti rejoindre Jésus voici une dizaine d’années. Pour être tout à fait correct, Korn a déjà fait pire que The Paradigm Shift, mais il ne leur reste plus qu’une seule solution pour accrocher l’attention : se séparer et revenir cinq ans plus tard. Ce que n’a jamais eu besoin de faire un certain Paul McCartney, probable meilleur compositeur de l’histoire de la composition. New a été confié à quelques producteurs « modernes » (Ronson, Johns, Epworth et Giles Martin) qui réussissent à garder son inimitable son, le mettre à jour sans le ridiculiser. Une vraie bonne surprise.

Deux groupes cultes, plus ou moins gallois, et avec une attention particulière aux paroles pour suivre : Los Campesinos! et Future of the Left. On pourrait tellement comparer Los Campesinos! aux Smiths pour plein de raisons,  comme les paroles (évidemment) et leur audience fantastiquement fanatique. Mais ce serait complètement passer à côté de l’attrait de la musique du groupe, délicieusement mélancolique, recherchée, douloureuse, rassurante, glorieuse (No Blues). Quant à Future of the Left, maintenant qu’ils ont un album de plus que Mclusky, il faudrait peut-être arrêter d’en parler à chaque fois. Oops. Financé par Pledge Music, How to Stop Your Brain in an Accident est ce qu’on peut attendre de la bande à Andy Falkous, maintenant fermement un quatuor. Abrasif tant au niveau de la musique que des paroles, l’album se permet toutefois quelques excursions réussies vers une certaine idée de la musique pop (Falco chante!). Un EP 6 titres d’outtakes intéressantes, Human Death, sort en parallèle.

Sleigh Bells tente une seconde fois de nous faire croire que leur date d’expiration n’est pas dépassée depuis longtemps, mais on n’est pas dupe. Derek Miller lève un peu la main sur la production, légèrement moins bourrine qu’avant et nous dit qu’Alexis Krauss a beaucoup participé à l’écriture. Mais si l’on considère que l’album (Bitter Rivals) est constitué de morceaux de 3 minutes maximum qui deviennent emmerdants après 40 secondes, ce n’est pas suffisant, malgré les tentatives de sonner comme Beyoncé.

Plus intéressant, The Dismemberment Plan nous revient pour de bon, avec leur premier album en douze ans. Beaucoup de choses se sont produites depuis, notamment 4 tonnes de groupes influencés par Travis Morrison & co. Uncanney Valley arrive sans faire trop de bruit, et repart de la même manière. Agréable et divertissant, en espérant que c’était leur but. Cage the Elephant est annoncé comme « the next big thing » depuis quelques années, et il est possible que Melophobia soit l’album qui les fasse exploser (tout comme une tournée prochaine avec Muse). Mais je n’y connais rien à ces trucs, je trouve juste que leur son est sympa sans plus : à force d’emprunter un peu partout, on se retrouve avec peu d’identité. Poliça s’est bien détaché de l’étiquette Bon Iver (Justin Vernon vient dire bonjour sur un morceau, quand même) et sort un album d’indé-électro (Shulamith) bien réalisé mais peut-être un peu fatigant. Mais une fois de plus, qu’est-ce que j’en sais, j’ai bien aimé le dernier album d’Electric Six, Mustang, qui ressemble à un album d’Electric Six. Et j’ai bien aimé aussi Corsicana Lemonade, le nouvel album tout à fait recommandable de White Denim, qui tape un peu dans tous les sens, comme une sorte de version mathy de Soundgarden qui jouerait du classic rock.

Dans la catégorie EP, on notera avant tout Best Coast, qui revient brillamment à la fuzzpop du premier album avec la voix de Bethany qui a bien progressé depuis (Fade Away) mais aussi Albert Hammond Jr., dont AHJ ressemble plus au son Strokes que tout ce qu’ils ont sorti en dix ans. Toujours en EP, les comiques de Fall Out Boy se la jouent Black Flag sous la direction de Ryan Adams (Pax-Am Days), alors que le duo TheHELL (Atom Willard et Matt Skiba) fait nettement mieux avec le brut Southern MedicineParquet Courts confirment qu’ils sont bien la réincarnation de Pavement joué par les Beastie Boys (Tally All The Things You Broke), The Men continuent leur évolution de plus en plus loin du hardcore quasi instrumental de leurs débuts avec un EP qui porte très bien son titre (Campfire Songs) alors que Stone Temple Pilots récupèrent un chanteur fiable (Chester Bennington) mais n’arriveront jamais à sortir de la division 3 du rock indé dans laquelle ils végètent depuis toujours (High Rise).

Voilà pour octobre, il est probable que novembre et décembre soient balancés en même temps, juste avant le récapitulatif de 2013.

Playlist Spotify ci-dessous!

Stone Temple Pilots – Stone Temple Pilots

Bon, on est à plus de la moitié de l’année, les sorties se font plutôt rares, et ma pile virtuelle de trucs à écrire, elle, ne diminue pas. Il faut donc que je parle des Stone Temple Pilots, d’abord parce que c’est un groupe que j’ai l’habitude de suivre depuis des années, et aussi parce qu’on me l’a demandé sur Facebook. Les Pilots s’étaient séparés il y a quelques années, suite aux frasques incessantes du chanteur Scott Weiland. Les trois musiciens ont formé l’assez médiocre Army of Anyone avec Robert Patrick, alors que Weiland s’acoquinait avec les ex-Guns dans Velver Revolver. L’histoire se répétant souvent, Weiland s’est fait virer, les STP restants l’ont repris parce qu’il faut bien manger, quand même. Cet album sans titre est leur sixième, et même si on n’en attendait pas grand chose, on pouvait quand même avoir un petit espoir de brillance de la part d’artistes qui en ont parfois eu un peu quand même.

Bilan : gros bof. Le single, premier morceau et seul futur classique du groupe sonne daté, emprunte méchamment à Nirvana (un comble, quand on sait que les Pilots furent ridiculisés au début de leur carrière parce qu’ils sonnaient plus Vedder que Pearl Jam) et compte des paroles totalement abyssales, même pour Weiland : « you were always my favorite drug / even when we used to take drugs ». Et c’est le refrain. La suite est généralement peu inspirée, malgré un Weiland qui fait quand même quelques efforts, qu’on mettra sur le compte de boissons énergisantes et d’auto-tune. Le reste du groupe tient la baraque sans génie, mais bon, ils n’en ont jamais vraiment eu, de génie. L’album est relativement varié, et est assez éloigné des débuts grunge du groupe, allant parfois vers le glam ou le « hard rock » classiquement vulgaire (Huckleberry Crumble, Peacoat) qui aide à expliquer pourquoi ils ont tourné avec Aerosmith cet été. Ailleurs, Weiland prend des accents bizarres (Johnny Rotten sur Hickory Dichotomy), mais cela frôle juste le ridicule, en fait. Enfin, les évidentes ballades (First Kiss On Mars étant un peu meilleure que son titre) n’arrivent pas vraiment à faire décoller un album inutile d’un groupe que personne ne regrettait vraiment, et qui ne laisse aucune doute sur ses véritables motivations, Weiland n’a même pas enregistré avec les autres membres.

Mais il ne faut pas exagérer non plus, le paysage musical contemporain compte suffisamment de médiocrité comme ça, cet album n’est pas mauvais. Cinnamon est une chouette chanson d’été, aussi vite appréciée qu’oubliée, et les frangins DeLeo savent toujours écrire des mélodies sympas, comme Hazy Daze ou le Beatlesque Dare If You Dare. Mais l’album est finalement plombé par une certaine lourdeur, des solos de guitares trop appuyés à un chanteur omniprésent, cherchant en vain une gloire passée. Juste un album de plus…

Blip.fm : Hickory Dichotomy, Cinnamon, Between The Lines

Stone Temple Pilots – Thank You

Même si la sortie de cet album est forcément orienté période de fêtes, cet album mérite d’exister pour des raisons autres que le pur marketing. En effet, le groupe reste une des légendes du mouvement grunge des années 1990, et après avoir été considéré comme le parent pauvre des Alice in Chains et autres Pearl Jam, l’heure a sonné pour un peu de reconsidération. C’est bien simple, comme best of cet album est parfait. On trouve des morceaux de chaque période du groupe, et ils méritent tous leur place. Même l’inédit est vraiment excellent. Bien sûr, on pourra chicaner quant à l’absence de certains morceaux (Art School Girl !!), mais bon… On trouve dans cet album leur hymne, Plush, le fantastique Creep et 12 autres morceaux montrant leur impressionnante évolution (les derniers albums n’avaient plus trop à voir avec le grunge de type Seattle). Écoute indispensable pour amateurs du dernier vrai grand genre musical à avoir percé, et chemin idéal vers d’autres perles du groupe enfouies dans leurs 5 albums (tous recommandables, mais mon préféré reste Tiny Music, le troisième) De plus, le groupe a officiellement splitté il y a quelques semaines, et le très troublé chanteur Scott Weiland a retrouvé un nouveau groupe : Velvet Revolver, formé avec les ex-Guns N’Roses, moins l’imbécile de chanteur. Une des compiles de l’année.