Dans un forum de discussion musique que je fréquente régulièrement, c’est devenu un running gag : qui est le meilleur groupe au monde, Radiohead ou Tool? Les fans des deux groupes se sont menés une guerre sans partage, aussi amusante qu’inutile. Et alors que Radiohead ne sortira pas d’album cette année (si l’on exclut le solo de Thom Yorke, dont on reparlera), Tool dévoile son quatrième, probablement l’album le plus attendu de 2006.
On connaît la mystique autour du groupe, et encore plus autour de Maynard James Keenan, laissons Wikipedia résumer tout ça, pour se concentrer sur 10,000 Days. Vu qu’il s’est écoulé cinq ans entre le précédent (Lateralus) et celui-ci, et que Tool a toujours eu l’habitude de pousser l’évolution de son son à son paroxysme à chaque album, 10,000 Days était évidemment attendu au tournant, et il lui était fort difficile de ne pas décevoir.
L’album commence par une relative surprise : le riff de Vicarious est étrangement similaire à celui de Schism, extrait de Lateralus. Par contre, la voix de Maynard est différente, genre deux paquets de Marlboro par jour pendant dix ans. Vicarious est très efficace, et très Tool, avec différentes phases calmes et bruyantes. Le groupe est toujours aussi précis, surtout au niveau de l’implacable section rythmique. Le second morceau conserve la même formule avant que Wings For Marie ajoute un élément atmosphérique au son très dense de Tool.
10,000 Days, le morceau suivant et donc titre de l’album, réfère à la longue agonie de la mère de Maynard, qui lui avait déjà dédié un morceau de A Perfect Circle (Judith). Effectivement, l’ambiance est très claustrophobique, et mêle instrumentation classique à un échantillon de sons de la nature. Quelqu’un a dit prog-rock?
The Pot attaque frontalement une des principales caractéristiques de la société d’aujourd’hui, selon Maynard : l’hypocrisie. Très bon morceau, mais est-ce que Tool ne commencerait pas à se répéter? Pour prouver que non, les deux suivants sont à la limite de l’incompréhensible. La fin de l’album suit cette logique, avec des longues interludes d’ambiance entrecoupées de «vraies» chansons.
Le tout se finit sur le non-sens total qu’est Viginti Tres, qui, comme virtuellement tout l’album, est fait de références ésotériques que parfois seul le groupe ne comprend.
Et c’est tout le problème d’un bon album, mais paradoxal : parfois trop obscur, et à d’autres moments trop stéréotypiquement Tool.
C’est la première fois en quatre albums que Tool se répète, et même si 10,000 Days comporte son lot de moments intenses, on pourrait craindre que malgré cette longue attente, le groupe soit devenu redondant. L’album prochain, vers 2015, confirmera ou infirmera cette inquiétante conclusion.