Archives de catégorie : Marketing 2.0

Majors are dead

Jonah Matranga feat. Everyone

J’ai déjà parlé quelques fois de Jonah Matranga, que ce soit pour son excellent album solo And ou pour le premier album de Far en douze ans. J’aurais pu aussi, dans le cadre de la série « marketing 2.0« , mentionner la vente directe de son art et produits dérivés, à prix maîtrisé par l’acheteur, grâce à un système d’échelle qui propose quatre prix différents pour le même objet, selon les moyens dont l’acheteur dispose. Pour la petite histoire, il l’avait fait avant Radiohead et Trent Reznor.

Jonah a cette fois été encore un peu plus loin avec son nouvel album solo, You’re All Those Things and Then You’re None.

Les versions de l’album sont relativement classiques, du moins depuis que les artistes ajoutent plus ou moins n’importe quoi pour vendre leur brol, de la classique édition limitée/DVD/machin à la boîte en forme de Texas avec flasque (Pantera, qui d’autre) en passant par le Golden Ticket pour toute une tournée (Helmet) ou encore un peu tout et n’importe quoi, merci Josh Freese.

Matranga propose donc une demi-douzaine de packages, allant du cd/download avec ou sans vinyl/tshirt, avec les éditions plus chères ajoutant un enregistrement unique par Matranga d’un de ses morceaux au choix , la co-composition et enregistrement d’un album voire carrément un concert privé n’importe où sur Terre (4100$ quand même + 1000$ hors Amérique du Nord).

Mais plus que les moyens trouvés par un inventif Matranga, c’est le concept de l’album qui intrigue, en effet, YATTATYN sortira en plusieurs versions évolutives, comme le serait un programme informatique.

La version 1.0 est sortie, et se compose juste de dix morceaux chantés et joués acoustiquement par Matranga. A partir de là, Matranga a demandé à ses fans et suiveurs d’en faire plus ou moins n’importe quoi. Voix, parties de guitares, basse, cordes, percussions, en gros, on peut lui envoyer ce qu’on veut, selon quelques indications se trouvant sur son site. Matranga peut alors habiller les squelettes de ses morceaux de musiques envoyées par plus ou moins n’importe qui dans le monde. Lorsque les morceaux seront plus complets, il sortira une version 2.0, qui pourra aussi évoluer par la suite, selon les contributions futures.

Comme concept original, c’est assez bien trouvé. Pour en savoir plus, acheter l’album et savoir comment participer (il est toujours temps), allez jeter un coup d’oeil sur son site. Je reparlerai de l’album lorsque la version 2.0 sera sortie, vu que les morceaux dispo à ce jour ne sont finalement que des démos. Dont certaines sont très prometteuses, et déjà excellentes telles quelles.

Helmet, ou l’esprit DIY revisité

Je n’ai plus parlé de ce que j’avais appelé « marketing 2.0 » depuis quelques mois. Il faut dire que maintenant, n’importe quelle sortie majeure est accompagnée de gimmicks divers et variés, entre éditions supermegadeluxe invraisemblables (l’exemple extrême étant sans doute l’anthologie de Lamb of God, dont la version la plus chère propose une véritable guitare électrique) et autres trucs pour vendre du disque : le dernier Arcade Fire est actuellement numero 1 aux USA, mais est-ce que c’est grâce à sa qualité, à ses huit pochettes différentes, ou au fait que le download coûte quatre dollars?


Je vous parlerai bientôt de ce que Jonah Matranga propose pour son nouvel album solo, mais maintenant, c’est au tour de Helmet. Groupe des années 90 qui en a influencé plus d’un, Helmet continue à régulièrement sortir des albums sans vraiment déchaîner les passions, malgré l’évident talent du leader (et seul membre constant) Page Hamilton. On est habitué aux différentes éditions accompagnant une nouvelle sortie, mais ici, le rapport qualité/quantité/prix est assez extraordinaire, et crée un pont entre deux entités trop souvent séparées : l’album et le live.
Pour commencer, Helmet offre les options habituelles : download, cd, vinyl et y ajoute un album live. L’édition deluxe à 74,99$ y ajoute même une clé USB avec quatre albums live supplémentaires (dont Graspop 2008), le tout signé par Hamilton. Mais c’est le package supérieur qui interpelle. Pour 100 dollars, l’acheteur a droit à l’édition deluxe, mais aussi (il faut le relire 20 fois pour le croire) un passe qui donne accès à chaque concert du groupe en 2010, avec autant de rencontres du groupe. For real. Quand on sait que le groupe a 32 dates prévues cette années, dont pas mal sur la côte ouest, il fait bon être californien fan de Helmet avec une bonne voiture. En plus de ça, le groupe court-circuite les réseaux habituels de vente de billets, ce qui leur permet d’en vendre à seulement 24 dollars (avec album live compris) directement sur leur site.


Il serait très intéressant de savoir si une telle aventure est financièrement profitable, mais c’est une idée absolument géniale, qui, pour une fois, ne prend pas le fan comme un gros pigeon prêt à claquer n’importe quoi pour son groupe préféré. Maintenant, si Seeing Eye Dog pouvait être du niveau d’Aftertaste


Détails sur le site officiel de Helmet, avec quelques morceaux en écoute. Seeing Eye Dog sort le 7 septembre sur le label de Page Hamilton, Work Song.

Mise à jour 22 août : le passe qui donne droit à la tournée US de Helmet permet aussi l’entrée aux 26 concerts européens de novembre/décembre.

Marketing rock 2.0 : quoi de neuf depuis la dernière la fois? (Ash, Bromheads, Corgan, Jack White, Modlife)

Dans le cadre « marketing rock 2.0 », voici quelques nouvelles des programmes que je suis depuis quelques mois, et dont j’ai déjà parlé ici : les nouvelles sorties des Smashing Pumpkins, Ash, Bromheads ainsi qu’une description d’un service déjà connu mais potentiellement intéressant, Modlife.




1) Billy Corgan

Voici quelques mois, Corgan annonçait sa louable intention de sortir le nouveau Smashing Pumpkins gratuitement, un morceau à la fois. Seuls deux morceaux sont actuellement disponibles (les très moyens Song for a Son et Widow Made My Mind) et Corgan sortira un EP après que le quatrième morceau soit disponible. Mais à ce rythme-là, Teargarden by Kaleidyscope ne sera pas terminé avant quelques années. De plus, Corgan est fort peu disponible, et offre peu de mises à jour sur son projet, se contentant de tweets pseudo-ésotériques. C’est mal parti, tout ça.


2) Bromheads

Le groupe anglais Bromheads (ex-Bromheads Jacket) se sert amplement des réseaux sociaux pour faire la promo de leur musique, qui est offerte gratuitement sur leur site à raison d’un morceau par mois, depuis six mois. Pour faire le point sur le système, tenter de comprendre leurs motivations et leurs espérances, Music Box Off vous proposera prochainement leur interview.


3) Ash

Ash continue son petit bonhomme de chemin, continuant à sortir un nouveau morceau toutes les deux semaines. Les morceaux peuvent être écoutés et téléchargeables (pour 1,49$) sur leur site, mais l’abonnement aux 26 vinyls est soldout depuis un petit bout de temps. Ces sorties incessantes permettent au groupe de tourner en quasi permanence, en ayant toujours quelque chose à vendre. Cependant, ils viennent de s’exposer à la critique des fans qui suivent le programme depuis le début, en annonçant la sortie, le 19 avril, d’une compilation reprenant les treize premiers singles et cinq autres morceaux. Même si le groupe se justifie en disant qu’ils ont toujours eu l’intention de le faire, les fans qui ont dépensé une certaine somme d’argent pour collectionner les vinyls « exclusifs » l’ont un peu mauvaise, tout comme le concept « on ne sort plus d’album ». Bon, c’est peut-être du chipotage, mais tout cela devient assez compliqué, car les abonnés ont droit à deux morceaux bonus qui ne seront pas sur la compile, qui comprendra, elle, quatre inédits. Finalement, les albums, c’était quand même plus simple.

Et la musique, dans tout ça? Pas de grosse surprise, c’est Ash : un morceau pop-punk, une ballade, un autre plus hard, un peu d’électro. J’y reviendrai sur Music Box à la sortie de l’album, mais malgré l’originalité du concept, j’ai bien peur que la compile ressemble à un album d’Ash, en un peu plus varié, peut-être.


4) Modlife / Third Man Records

Modlife est un site internet, lancé en 2008 par Tom DeLonge, de Blink-182 et Angels and Airwaves. La page wikipedia l’expliquera mieux que moi, mais en gros, c’est un réseau social axé autour de certains artistes, avec pour objectif d’augmenter leurs revenus en proposant des exclusivités aux fans, une sorte de fan club digital, en somme. On peut choisir entre un service gratuit, minimal (infos de tournée, etc) ou payant (environ 7$ par mois, avec prévente de tickets, chatrooms avec les artistes, …). Le service est resté relativement confidentiel, car peu d’artistes majeurs en faisaient partie (notons seulement un EP 4 titres de Korn, proposé aux abonnés), mais l’arrivée de Third Man Records, le label de Jack White, a changé la donne. J’avais déjà mentionné le lancement de The Vault sur MBO, et depuis, force est de constater que l’expérience n’est pas vraiment extraordinaire.

D’abord, on peut trouver un peu douteux que quasi toutes les parties utiles des sites Third Man (White Stripes, Raconteurs, Dead Weather) soient réservées aux abonnés payants (c’est le but de Modlife, ok, mais vous connaissez beaucoup d’artistes qui font payer pour visionner des clips vidéo, vous?). Mais surtout, les objets exclusifs perdent de plus en plus de leur intérêt. Le second package comprenait un live des Raconteurs, un 7″ de versions alternatives de deux vieux morceaux des White Stripes ainsi qu’un print, mais c’est surtout le troisième qui a joué un peu avec les pieds, pour être poli, des fans : un 7″ de deux nouveaux morceaux du Dead Weather (passe encore, s’ils ne se retrouvent pas sur l’album d’avril), des cartes postales (ça change du t-shirt, quand même) et un double 12″ compilant tous les singles sortis par Third Man Records en 2009. Même si le concept est intéressant, je me demande ce que doivent dire les fans qui ont déjà acheté chacun de ces morceaux en vinyl ou cd. Enfin, non, je ne me le demande pas, il suffit de faire un tour sur leur forum. Enfin, depuis le lancement du système, l’abonnement trimestriel a augmenté de 10$, pour « couvrir les frais d’envoi », ce qui fait donc 280 dollars par an. On va quand même leur laisser encore un peu de temps pour terminer le rôdage, mais jusqu’à présent, c’est décevant de la part de Jack White, qui semble clairement plus ancré dans le passé que dans le futur, ce qui lui convient plus par la musique que pour la distribution de celle-ci.

Enfin, la dernière activité de Modlife vient de son créateur, Tom DeLonge. Quelques mois après la reformation de Blink-182, qui passera en Europe cet été et devrait sortir un nouvel album fin de l’année, DeLonge sort le nouvel album de son « autre » groupe, Angels and Airwaves, gratuitement via fuse.tv et, évidemment, Modlife. L’idée est simple : en proposant gratuitement l’album, DeLonge espère gagner beaucoup, beaucoup de nouveaux fans qui pourront alors dépenser 7$ par mois sur Modlife. En deux mois, ils auraient alors dépensé l’équivalent de ce qu’ils auraient payé pour l’album, et tout le reste serait du bonus. Le futur dira si ce business model est rentable, mais en attendant, on pourra juste remarquer qu’Angels and Airwaves, c’est toujours aussi pompeusement mauvais.

Ash (suite) et Smashing Pumpkins, hors du circuit traditionnel

Je vous parlais il y quelques semaines de l’initiative d’Ash, qui, au lieu de créer classiquement un album, va sortir un morceau différent toutes les deux semaines pendant un an.

Leur plan est maintenant détaillé, et a un prix.

Si vous voulez recevoir les 26 vinyls 7″ (face A enregistrée, face B dessinée), avec leur belle boîte, il vous en coûtera un total 176 livres sterling, ce qui nous fait 190€. Ce qui fait quand même 7€ le vinyl, on a quand même intérêt d’être fan, surtout que, forcément, 25 des 26 morceaux sont inédits à ce jour.

De plus, les disques seront envoyés par paquet de six, ce qui diminue les frais d’envoi et l’impact environnemental, mais cela diminue aussi l’excitation éventuelle d’en recevoir un chaque quinzaine. Néanmoins, chaque acheteur bénéficiera du téléchargement digital (disponible séparément pour 20 dollars, soit 13€), histoire d’avoir le morceau assez vite.

C’est donc clairement une option pour les fans, si possible avec une platine vinyl. Et qui ne vont pas trop s’en faire que l’artwork est toujours similaire… Mon avis? Si un de mes groupes préférés avait eu cette idée, j’aurais été assez déçu de son application.

Mais bon, on verra pour la musique, en attendant, voici une photo de la boîte.


Les Smashing Pumpkins… On a rigolé maintes fois quand Billy Corgan a décidé de reformer son groupe, avec comme seul membre d’origine Jimmy Chamberlain. L’album en découlant, Zeitgeist, n’était pas terrible du tout, et maintenant, Jimmy est (de nouveau) parti.

Pourtant, Billy persiste, signe, et continue dans l’invraisemblance mégalo, mais, quand même, un poil intéressante, surtout en ce qui concerne cette rubrique qui parle des nouveaux modes de distribution de musique.

Le nouvel album s’appellera Teargarden by Kaleidyscope (sic), comptera 44 morceaux (resic) et s’inspire d’un bazar de Tarot auquel je n’ai rien compris. Mellon Collie 2? Not quite.


Parce que Corgan va sortir totalement gratuitement cet album, morceau par morceau, à partir de Halloween (on ne se refait pas), et jusqu’à ce que ce soit fini, pas de date précise. Et c’est seulement après tout ça que l’album sortira en forme classique (même si des EP devraient précéder). Ce n’est pas la première fois que Corgan balance un album gratuitement (Machina 2 était un précurseur du genre), mais ici, le concept se rapproche étrangement de celui d’Ash.

Là aussi, on verra à l’usage, mais si cette phrase est seulement à moitié vraie, on peut espérer (un peu) : « The music of ‘Teargarden by Kaleidyscope‘ harkens back to the original psychedelic roots of The Smashing Pumpkins: atmospheric, melodic, heavy, and pretty. « 

Mais bon, c’est Billy, aussi…

Distribution de musique 2.0 : Bromheads et Ash

Les lecteurs de Music Box Off (version Skynetblogs, faut que j’importe les posts ici, tiens) le savent, je suis avec attention les artistes qui tentent de changer le canevas classique magasin/Amazon/iTunes/15€.

Cette fois, j’aimerais parler de deux nouvelles tentatives différentes, mais originales.

D’abord, les anglais de Bromheads (ex-Bromheads Jacket), deux albums à ce jour dont l’excellent début Dits From The Commuter Belt. Prenant le contre-pied des récentes déclarations de la grande gueule un peu stupide Lily Allen, ils tentent de prouver que sortir de la musique gratuitement n’est pas un mauvais calcul : ils ont l’intention de sortir un single digital gratuitement, tous les mois pendant six mois. On verra comment tout cela se passe, mais le premier, Boots (une reprise de These Boots Are Made For Walkin’) est disponible sur http://www.bromheads.tv. Vous y trouverez aussi des liens Youtube, Twitter, Facebook ou encore Myspace, où ils viennent de poster deux démos pour lesquelles ils attendent du feedback.

Ash est déjà nettement plus connu, notamment pour une série d’excellents singles qui leur ont valu le titre à double tranchant de « Singles Band ». Il est vrai que leurs albums ont toujours laissé à désirer, mais leur idée semble vouloir changer cela.

A partir de mi-octobre, les nord-irlandais vont sortir un single (digital + vinyl) toutes les deux semaines, pendant un an. Ils seront disponibles individuellement, mais aussi suivant un système d’abonnement, dont les modalités devraient être bientôt connues.

Leur gimmick, c’est l’alphabet : chaque single portera une lettre, et ils vont accompagner tout cela par une tournée UK de 26 dates, chacune dans une ville portant une lettre différente, d’Aldershot à Zennor.

Le concept est intéressant, mais il faudra voir s’ils sauront tenir la distance, et sortir un morceau de qualité toutes les deux semaines. Le premier, True Love 1980, est en écoute sur http://www.ash-official.com et est assez synthastique.