Évidemment, le monde n’avait pas besoin d’un nouvel album des Stooges, un des groupes les plus importants de l’histoire du rock. Leur premier album est sorti en 1969, et est largement considéré comme un précuseur du punk, grâce aux classiques No Fun ou I Wanna Be Your Dog. Deux albums suivirent, et ensuite le chanteur partit vivre une des plus extraordinaires vies d’abus en tous genres. Iggy Pop, l’Iguane, légende vivante et mystère de la science aura 60 ans le mois prochain, mais a toujours été capable de livrer des prestations scéniques délirantes, malheureusement gâchées par des albums généralement indignes de son talent.
Skull Ring, son album de 2003, le vit collaborer avec ses héritiers Green Day et Sum 41, mais aussi avec les frères Asheton, bassiste et guitariste des Stooges, intéressés par une tentative de reformation. L’album ne restera pas dans les annales, mais une tournée « Iggy and The Stooges » fut mise sur pied, et petit à petit,on est arrivé à ceci, The Weirdness, le premier album du groupe en trente ans.
On ne peut plus attendre que l’album réinvente la roue, mais on peut aussi craindre qu’il éclate l’héritage du groupe, danger des albums de reformation (Pixies en savent quelque chose). Soyons rassurés, The Weirdness est un bon album de rock. Et il l’est grâce à la qualité des dramatis personae : Iggy, égal à lui-même, Ron Asheton et ses doubles guitares incisives et bruyantes, Scott « Rock Action » Asheton dont la batterie connaît une nouvelle vie; et les nouveaux comparses : Mike Watt à la (discrète) basse, et surtout Steve Albini a l’enregistrement.
Albini était la personne parfaite pour le job, lui seul sait comment obtenir la pleine puissance des instruments, la simplicité de l’enregistrement. Lui seul a pu gêrer l’énergie brute du groupe et la transformer en morceaux tout à fait écoutables, et réécoutables. The Weirdness est aussi son album. De plus, comme toujours avec Albini, l’album a été enregistré live, sans post-production, et on l’entend, jusqu’à quelques petites erreurs et sons accidentaux sortant des guitares. Mais c’est ça le rock n roll, un reptile mort-vivant croonant « My idea of fun is killing everyone » jusqu’à plus soif, et des vieux types qui sont plus punk qu’une armée de Green Days et de Good Charlottes.
On regrettera juste que personne n’ait osé faire comprendre à Iggy que ses paroles étaient ridicules (et je les comprends); mais à part ça, il faudra le faire pour sortir un album plus authentique que The Weirdness cette année. Même si cela implique un retour de 30 ans en arrière.