Cette longue liste de dramatis personae (et encore, je passe les claviers) est symptomatique : Chinese Democracy a été tellement difficile à enregistrer qu’il ressemble plus à un énorme patchwork de copiés/collés de studios (sept personnes sont crédités pour Pro-Tools) qu’à un album cohérent de vrai groupe. Mais on le sait, le « Guns ‘N Roses » actuel, c’est juste Axl Rose. Encore pire : l’album est tellement produit qu’il est parfois difficile d’entendre qui joue quoi. En d’autres termes, Axl a réussi à faire jouer Buckethead comme n’importe quel autre guitariste, ce qui est vraiment dommage. Les passages où il est vraiment reconnaissable sont trop peu nombreux, mais se retrouvent facilement parmi les meilleurs de l’album.
Chinese Democracy est aussi bien trop long. OK, il a fallu treize ans blah blah mais quand même, les morceaux de six minutes, les albums de 71, c’est limite. Surtout quand certains passages sont étendus inutilement, comme l’intro de Riad N’ The Bedouins, pourtant un des meilleurs morceaux ici (compte tenu de la chute vertigineuse des espérances). Et quand on se demande ce que Rose peut encore sortir de son chapeau pour nous faire marrer/pleurer, il ne trouve rien de mieux qu’une collaboration avec un autre vieux type semi-oublié, Sebastian Bach. Ce dernier avait décrit Sorry comme un morceau doom metal avec un beat grind, il est donc encore plus cinglé que Rose. Même si le refrain a effectivement une certaine puissance. Dans le même ordre d’idées, l’album est souvent surproduit et bourrés d’artifices divers et variés. Exemple, There Was A Time. On a un orchestre, un choeur, des percussions tribales, des cordes de BO ciné, un break hip-hop, une backing track à l’envers (sans doute pour Charlie Manson), un solo de guitare et Axl. Et ce, durant les vingt premières secondes : après c’est moins sobre. Rose a sans doute voulu caler le plus de trucs possible, mais c’est très vite fatigant, comme l’est aussi la sur-représentation des ballades.
Si l’album a un point positif, c’est de nous rappeller ce que c’était, les fameuses ballades « de l’époque ». « And III will loooooove you babyyyyy aaalwayyyyys », de ces braves gens de Bon Jovi, remember? Messieurs K. Cobain et L. Staley y ont donné leur vie, mais ce putain de cadavre est toujours en train de frétiller, et Dr Axl Frankenstein a tenté de le faire marcher. Catcher In The Rye (quelle insulte) y réussit peut-être, je ne veux pas me prononcer, ignorant totalement ce qu’est une bonne ballade rock FM, si seulement ça existe. Mais en tout cas, c’est loin d’être un bon morceau. La tendance ne se démentira pas, avec une grande partie des morceaux comprenant au moins un passage lent, souvent au piano, avec un Axl vraiment triste (peut-être n’aime-t-il pas le Dr. Pepper). This I Love serait ridicule, s’il ne venait pas d’un vieux type paranoïaque et psychopathe. Là, c’est juste pathétique.
Dommage, car la fin de l’album comprend son lot de passages sympathiques à aller chercher, comme dans IRS, Scraped, Madagascar ou Prostitute. Mais la folie mégalo mal placée de Rose ne permet jamais à un seul morceau, à une seule simple mélodie de se développer tranquillement. Ok, Axl Rose n’a jamais voulu être calme, et cela lui a réussi dans le passé. Chinese Democracy, malgré tout, déçoit (forcément) mais montre une image sans doute fidèle de son géniteur. Si seulement l’album portait son seul nom, je suis sur que les choses seraient très différentes. Malheureusement, Chinese Democracy est un album de Guns N’ Roses, doit être jugé comme tel, et se plante. Avec panache, certes, mais il se plante.