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The Eighties Matchbox B-Line Disaster – The Royal Society

Le monde ne tombera jamais aux pieds de The Eighties Matchbox B-Line Disaster. Serait-ce à cause de leur nom ? De leurs paroles, disons, bizarres (l’album commence par « I Wanna fly like an eagle / I wanna sing like Sinatra / I got a date with destruction / I wanna love like a mother », et plus loin «What do we do with a boy like you / We put them in a pot and we throw them on the fire ») ? De la voix du chanteur Guy McKnight, la plus sombre depuis Peter Steele ?

Ou plus probablement, plus simplement leur talent. The Royal Society est leur deuxième album, et pousse leur rock n roll bizarre encore plus loin, mêlant rythmes boogie-rock (à la Eagles of Death Metal), stoner rock (le producteur Chris Goss est responsable des Desert Sessions et de Queens of the Stone Age), claviers des films d’horreur, et donc paroles tordues. L’impression s’en dégageant rappelle un peu celle obtenue en écoutant les Pixies à l’époque, à savoir quelque chose de nouveau, de génial, mais sans vraiment savoir pourquoi. Les mots ne suffisent donc pas, et l’écoute de cet album crucial s’impose. Tous ensemble pour finir, « Do you suffer from mennnnnnnntaaaaaaal »

John Frusciante – Inside of Emptiness

Six albums en six mois, c’est l’ambition de John Frusciante (guitariste des Red Hot Chili Peppers). Celui-ci est le quatrième de la série, et déjà le cinquième album de John cette année. On pourrait donc craindre l’overdose, ou un accès d’égocentrisme. Même s’il y a certainement un peu de ça, la qualité et la diversité des disques sont la pour défendre l’entreprise. Automatic Writing était sorti sous le nom d’Ataxia, collaboration avec Joe Lally de Fugazi, le dernier EP (DC) était produit par Ian MacKaye, des mêmes Fugazi et cet album est encore différent, et montre un côte moins expérimental que le carrément bizarre Shadows Collide With People.

On y retrouve le côté mélodique légendaire de John, avec des solos et riffs qui auraient pu trouver une place chez les Red Hot. John y ajoute une atmosphère beaucoup moins produite, plus brute. Enfin, sa voix n’est forcément pas aussi radio-friendly que celle d’Anthony Kiedis, mais elle sonne plus vraie, et carrément plus juste (ceux qui ont vu les RHCP live savent de quoi je parle…). Inside of Emptiness est peut-être le meilleur album de Frusciante à ce jour, et offre une alternative intéressant à son groupe, de plus en plus gentil et fatigué, et confirme s’il le fallait encore qu’il est clairement le génie des Red Hot, et un des meilleurs guitaristes actuels. Le prochain album, Sphere In The Heart of Darkness (5/6) sort dans à pleine 20 jours…

Wu-Tang Clan – Disciples of the 36 Chambers / Legend of the Wu-Tang

Deux albums en deux semaines, pourquoi pas… On commence par un live historique, historique vu qu’il est virtuellement impossible de réunir le groupe à un même endroit (sauf si c’est une prison ou un centre de désintox), sauf en cette occasion. Maintenant, un groupe rap live, qui plus est sans instruments, c’est généralement une grosse soupe pleine de basses et d’egos, et ce disque ne fait pas exception. La seule différence avec votre concert rap habituel, c’est la qualité des cuts, qui rappellent pourquoi le Wu est un des groupes des plus importants de l’histoire du hip-hop. Les morceaux dominants vient des deux premiers albums ainsi que des premiers solos, avant que la qualité commence à laisser sérieusement à désirer. Donne envie de réécouter les classiques, mais pas vraiment de se le repasser en boucle.

Le best of, disons-le clairement, est douteux, pour une raison : il est inacceptable que le best of du Wu ne reprenne pas les meilleurs cuts des albums solos, dont certains sont de qualité égale à ceux du groupe. On ne retrouve donc que des morceaux des quatre albums du groupe, dont la grosse majorité venant du premier. Les curiosités viennent de deux remixes (moyens), et trois extraits de compiles et BO, dont la reprise de Sucker MC de Run-DMC. Donc, même remarque, préférer les classiques : en gros, tout ce qui se trouve entre Return to The 36 Chambers et The W, solos définitivement inclus.

Frank Black Francis

Même si la réunion des Pixies (et un probable prochain album studio) est financièrement justifiée, Frank Black a régulièrement sorti des albums solos (assez médiocres en général), et organisé pas mal de tournées. Ceci dit, Charles Thompson (son vrai nom) a très rarement repris des morceaux des Pixies sans les musiciens concernés. Cet album est donc une curiosité de premier plan, et double, en plus.

Le premier disque, tout d’abord, a une valeur historique absolument inestimable, car il agit ni plus ni moins de démos acoustiques enregistrés par Black Francis (son nom de scène chez les Pixies) avant la première répétition du groupe. Bien sûr, il faut absolument connaître les versions finales, mais quand c’est le cas, c’est passionnant. Les morceaux sont presque complets, les paroles définitives. Black va même jusqu’à donner des indications au producteur, à jouer les parties de basse et de percussion sur son acoustique. Il est assez facile de comprendre les tensions qui ont minées le groupe, Black semble en effet être assez dictatorial, mais bon, ce sont ses chansons après tout. Les morceaux présents comprennent Broken Face, Caribou, Isla de Encanta, Holiday Song entre autres, ainsi que deux inédits.

Le second disque se passe très longtemps après, puisqu’il s’agit de réinterprétations contemporaines de classiques des Pixies, chantés par Black et accompagnés par d’autres musiciens. Les morceaux sont souvent radicalement différents des originaux, au point que certains vont sûrement crier à l’hérésie. On a donc pas mal de cuivres, donnant une ambiance jazzy par endroits ; et de légère électro, comme dans le lounge Where Is My Mind. Nimrod’s Son sonne comme Morricone, mais on est moins convaincu par le Holiday Song version mariachi. Pas trop convaincant donc, même si on trouve du bon (Into The White, inquiétant, Wave of Mutilation, sombre). Mais bon, pour en faire des reprises, autant qu’elles soient faites par le maître lui-même.

Elliott Smith – From A Basement On The Hill

Les albums posthumes sont toujours une entreprise douteuse. Les morceaux exhumés frisent peu souvent le génie (les inédits des Beatles ou Nirvana, par exemple, étaient très loin derrière la qualité moyenne des deux groupes), et des artistes comme Jeff Buckley ou Tupac Shakur ont été exploités sans vergogne. On ne saura jamais ce qu’Elliott Smith, disparu violemment l’an dernier (suicide apparent d’un coup de couteau dans le coeur), voulait faire de cet album, maintes fois reporté, et qui aurait pu/du être un double album, montrant une progression sonore du calme au chaos.

Il n’en est rien, mais From A Basement On The Hill reste un très bon album. Il est difficile d’en parler sans sombrer dans l’épitaphe, mais Elliott Smith n’a probablement pas montré le quart de son talent. Des morceaux acoustiques tristes et tendus, de la pop 60s psychédélique, des arrangements chaleureux, des mélodies magnifiques, du rock pur, le tout porté par l’inimitable voix d’Elliott. Malgré les circonstances, FABOTH reste très personnel, et il est maintenant difficile de ne pas trouver un sens vaguement caché à toutes les paroles, qui peuvent facilement sonner comme des références au suicide, qui sont par ailleurs parfois très claires (« I can’t prepare for death any more than I already have », King’s Crossing), ou aux autres démons de l’artiste.

Très bel album, triste, gai, en tout cas très chargé en émotions. Surtout, pour un album posthume, il fait partie du meilleur d’Elliott, et mérite sa place aux côtés d’Either/Or et XO.

Quelle énorme perte.