Archives de catégorie : Music Box

Chroniques d’albums contemporains

Spinnerette – Spinnerette

Un rapide recadrage : Brody Dalle, la chanteuse de Spinnerette, est l’ex-chanteuse des très punk Distillers, et l’ex-madame Tim « Rancid » Armstrong. Maintenant, elle est mariée à Josh Homme (Queens of the Stone Age), et donc, fait du QOTSA. Juste? Pas loin, en fait.

Spinnerette est censé être un nouveau groupe, mais aux membres très expérimentés : à Dalle s’ajoutent un autre ex-Distillers, Tony Bevilacqua (guitare) mais aussi Alain Johannes (QOTSA, Eleven) à la basse, et cette vieille branche trop rare de Jack Irons (Red Hot, Pearl Jam) derrière les fûts. Pas d’amateurisme, donc.

Ghetto Love, premier morceau, sonne effectivement plus QOTSA que nature, mais l’album est étonnament varié, avec comme point commun la voix de Brody, totalement inmanquable et inimitable. Elle peut irriter, certes, mais n’empêche, c’est elle qui porte Spinnerette sur ses épaules, d’ailleurs, vu que le groupe varie selon les tournées, on peut dire qu’elle est Spinnerette.

Et donc, l’album se passe tranquillement, sans coup d’éclat majeur mais sans baisse de régime. Et c’est là son principal défaut : on a rien vraiment à dire, c’est bien, mais sans plus, quoi. Brody s’essaie un peu aux beats dance (Baptism By Fire) et essaie de chanter (le joli Distorting The Code), mais tombe parfois dans le lourdaud (Sex Bomb, même si je n’oserais jamais dire ça à Josh). Pas mauvais, mais pas franchement intéressant non plus. Dommage.

Sonic Youth – The Eternal

Que peut-on encore prouver quand on est un groupe légendaire, qui a influencé des générations d’indierockers (ils sont d’ailleurs maintenant chez Matador), et qu’on sort son seizième album (sans compter les EP et albums expérimentaux)? Rien, si ce n’est démontrer qu’on a raison de continuer, et qu’on ne fait pas partie de ces groupes qui auraient du se séparer depuis des années. Sonic Youth n’en fait pas partie, et une fois de plus, The Eternal est un album de grande qualité, avec tous les éléments habituels des derniers SY : accessibles, pas trop expérimentaux mais toujours inimitables. The Eternal suit donc les pas de Sonic Nurse et Rather Ripped, en mixant passages mélodiques avec instrumentation spatiale, chant de Kim Gordon avec celui de Thurston Moore (avec un peu de Lee Ranaldo). En fait, c’est peut-être leur album le plus accessible : Sacred Trickster dure moins de trois minutes, pendant lesquelles tout est dit. Antenna est très joli, Calming The Snake un peu plus punk en attitude alors que Thunderclap For Bobby Pyn est presque pop. C’est alors qu’on pense à Be Your Own Pet, déjà regretté groupe de Nashville emmené par une chanteuse blonde un peu cinglée et au penchant pour le bruit peu consensuel. BYOP, qui était signé sur Ecstatic Peace, le label de Thurston Moore. BYOP, qui est maintenant définitivement un grand groupe, parce que être comparé à Sonic Youth, c’est une chose, mais le contraire est déjà nettement plus surprenant. C’est pourtant à eux qu’on pense partiellement en entendant Sacred Trickster, Thunderclap ou No Way. Mais évidemment, Ranaldo et Moore sont des dieux vivants de la guitare, et leur jeu stupéfiant dégouline de chaque morceau. Comme chaque album du Youth (ou de Dinosaur Jr, par exemple), The Eternal est un long orgasme pour quiconque apprécie les sons de la guitare électrique, et qui se saigneraient les veines pour s’offrir les toutes nouvelles Fender Jazzmaster Signature Series de Moore et Ranaldo. Alors, c’est vrai, après seize albums, Sonic Youth ne se réinvente pas, et ne semble toujours pas vouloir (être capable de?) écrire une vraie chanson. Ils ne sont plus vraiment nécessaire dans le paysage contemporain, mais ils ont la grande décence de refuser d’être mauvais. Ce qui est important à souligner.

Placebo – Battle For The Sun

C’est qu’il s’accroche,le ptit Brian. Après trois albums en demi-teinte (pour être gentil), il n’a toujours pas décidé de raccrocher. Mieux (?), il a viré le batteur pour prendre une sorte de Travis Barker blond, et s’est apparemment payé quelques implants capillaires. Et il est heureux, Brian. Battle for the Sun est leur album « heureux », c’est en tout cas ce qu’il raconte dans chaque interview. Cela semble terriblement stéréotypé, mais voilà encore quelqu’un qui était nettement meilleur quand il ne l’était pas, heureux. Battle for the Sun continue la lente pente descendante commencée avec Black Market Music sans être spécialement pire que les deux précédents (ou peut-être bien que si, je ne m’en souviens plus).

Quoi de nouveau? Moins de guitares acérées, plus de synthés qui sonnent parfois sympathiquement comme une vieille Nintendo. Des refrains « infectieux » (ce qui est censé être bien, mais personne n’a envie de se choper la grippe molkienne), comme celui, en espagnol, d’Ashtray Heart et parfois un peu d’originalité, comme le sombre rythme de Battle for the Sun, qui fait penser (un tout petit peu, au début) à Pure Morning. A part ça, tout est oublié après une écoute, et c’est bien dommage. Mais qui a encore envie d’entendre Molko ruminer dans son nez des mauvaises rimes à la killer/lover/brother?

On sauvera peut-être du lot le single For What It’s Worth, single assez décent et le dancepunk 2002 Breath Underwater. Mais sinon, le groupe est bien loin de celui qui a produit Without You I’m Nothing, où la voix, déjà énervante, de Molko était sauvée par des compos excellentes et une énergie stupéfiante. Maintenant, c’est juste un vieux groupe de cons ramollis.