Archives de catégorie : Chroniques

Pink Floyd – The Piper At The Gates Of Dawn (1967)

PinkFloyd-album-piperatthegatesofdawn_300Pink Floyd. Je n’aime pas Pink Floyd. Les grandiloquences scéniques, les solos qui n’en finissent pas, The Wall, les morceaux connus, ceux qui ne le sont pas, Waters et Gilmour, tout ça, c’est pas mon domaine, vraiment pas. Oh, j’ai rien contre un peu de prog (mais un peu), mais là, non. Ceci dit, je considère Syd Barrett comme un excellent compositeur, qui a réussi à détruire quelques barrières avant de devenir littéralement dingo et passer les trente dernières années de sa vie en réclusion chez sa mère.

Barrett n’a en fait joué que sur le premier album de Pink floyd, avant qu’il soit effectivement remplacé par David Gilmour. The Piper At The Gates Of Dawn est aussi, mais de peu, le plus digeste. Car parfois, derrières les artifices, on trouve quelques chansons, et même des mélodies. Il faut parfois chercher, mais quand on se rend compte des progressions d’accords étranges et novatrices d’Astronony Domine, on n’est pas loin de crer au génie.

Et un génie, ça fait de tout. Y compris trafiquer les sons avec des échos et de la reverb, parler de son chat, balancer des solos de synthé à la masse (Richard Wright) et raconter la vue d’un gnobe s’appellant Grimble Gromble. Mais aussi tirer dix minutes d’un riff efficace mais limité (Interstellar Overdrive) ou faire quand même n’importe quoi (Pow R Toc H). D’un autre côté, Barrett est capable de sortir des pop songs par essence, comme The Gnome, Bike, ou les singles non album Arnold Payne et See Emily Play, deux deux plus grands moments du compositeur. On peut retrouver ces derniers dans la toute récente version 40ème anniversaire, qui comprend l’album en mono original, un mix stéréo et un troisième cd de singles, faces B et raretés.

Mais rien ne me fera changer d’avis : Pink Floyd me semble fort surrévalué, et même si Piper a ses moments, l’album est trop cinglé (et pas dans le bons sens) pour vraiment fonctionner. Dans cette optique, le pire restait à venir, mais je préfère ne pas m’y aventurer, vu le trolling probablement élevé que cet article va provoquer. Mais au moins, j’en aurai parlé.

Astronomy Domine

 

Down – Over The Under

Down n’est pas un jeune groupe, loin de là : il s’est formé en 1991, et si Over The Under n’est que le troisième album, c’est parce que les membres étaient tous occupés dans d’autres groupes majeurs, dont Pantera et Corrosion Of Conformity. Entre 2001, année de leur second album, et 2007, beaucoup de choses se sont passées, notamment dans le chef du vocaliste Phil Anselmo.

Pantera, un des grands groupes heavy US, s’est séparé avec douleurs et rancoeurs, qui ont persisté jusqu’au meurtre du guitariste Dimebag Darrell, assassiné sur scène par un malade mental. Anselmo n’a jamais pu enterrer la hache de guerre avec Dimebag, et certains morceaux de l’album reviennent sur la tragédie, même si indirectement. Anselmo a du également faire face, avec succès, à ses addictions, alors que d’un point de vue plus général, la ville où Down est basé, New Orleans, a connu une énorme tragédie aussi bien météorologique que politique. Le contexte était donc malheureusment fécond, et Anselmo et ses comparses en ont profité pour créer un album totalement monstrueux.

Là où Pantera faisait plutôt dans le hardcore, Down suit les pas de Black Sabbath, reprenant leur science du riff et de la rythmique lourde pour créer un sludge/doom metal puissant, violent et très intense. Anselmo confirme facilement qu’il est un des plus grands vocalistes heavy de tous les temps, et le reste du groupe assure, tout en force et retenue. Il est d’ailleurs difficile de sortir des morceaux du lot, tant le lot est virtuellement sans faute. Le riff de Pillamyd est plus puissant que Katrina, en tout cas, alors que certains passages sont plus atmosphériques, comme le presque prog Never Try (leur Planet Caravan?). Pour revenir à la section rythmique imparable, l’intro de Mourn suffit pour prouver le talent au service du groupe de la paire Rex Brown/Jimmy Bower, tandis que Beneath The Tides évoque les marais de Louisiane, à coups de pédale fuzz. Oui, c’est bizarre, mais c’est vrai. Les neuf minutes finales apportent une respiration bienvenue qui permet de mieux digérer ce qui vient de se passer durant l’heure écoulée.

Over The Under sera sans doute vu comme un retour en force pour Anselmo, qui a littéralement été en enfer avant de revenir. On ne pourra que nourrir d’éternels regrets pour Pantera, mais il conserve un groupe excellent, qui pourrait finalement être son meilleur. Over The Under est, en tout cas, un des meilleurs albums de l’année.

Blondie – Parallel Lines (1978)

Blondie_-_Parallel_LinesÀ l’heure qu’il est, on doit sans doute être en train de remasteriser/fouiller les archives pour l’édition spéciale 30 ans à venir l’an prochain. Qu’importe, Parallel Lines est un de ces albums qui ne sonnera jamais daté, autant en parler maintenant. Pour des raisons imbéciles et sexistes, Blondie évoque souvent seulement Debbie Harry, et le reste, on devrait s’en foutre pas mal. Ben non, on ne s’en fout pas, parce que non seulement c’est un des meilleurs albums des seventies, mais aussi et surtout un précurseur New Wave qui fera encore des vagues vingt ans plus tard, quand des gosses new yorkais pas encore appelés The Strokes trouvent l’album par hasard.

Il suffit de comparer le premier – et meilleur – album des Strokes à ceci. Même désintéressement apparent et froid du vocaliste, mêmes guitares acérées et minimalistes, même rythme sec, même basse bondissante. Avec des différences, forcément, mais l’influence est telle qu’il est impossible de ne pas la remarquer. La pochette d’Is This It, malgré la tentative, restera nettement moins iconique que celle de Parallel Lines, qui voit la reine de glace, Debbie Harry, devancer ses discrets compères (dont même le look inspirera les Strokes) sera devant un fond de lignes parallèles noires et blanches. Un classique.

Debbie Harry, donc. Sex appeal sur vinyl (ou cassette, ou cd, même sur mp3). Il suffit de l’écouter sur One Way Or Another, et puis se demander ce qu’on a pu trouver à Madonna. Quand elle ne prend pas ce ton détaché, elle subit l’influence des groupes pop 60s (Picture This) ou se lance dans le légendaire falsetto démoniaque de Heart Of Glass. Mais malgré ce dernier, Parallel Lines n’est pas pop pour un sou : même s’il reprend quelques uns des tubes du groupe, on retrouve suffisamment d’innovations étonnantes, comme l’intro synthé/guitare immense de I Know But I Don’t Know, 1978 personnifié, les beats (oui, beats) de Fade Away And Radiate ou le heavy metal vs le thème de Batman (série TV) qu’est Will Anything Happen. Ou le rock n roll pur I’m Gonna Love You : pas innovant mais totalement jouissif. Un seul point noir : du au succès en club du 12" Disco Remix de Heart Of Glass, quasi toutes les versions de l’album comprennent ce remix, inutilement alongé. Mais cela tient plus du détail.

Parallel Lines est un album stupéfiant, qui, s’il devait sortir la semaine prochaine, ne perdrait rien de sa fraîcheur, ce qui représente un cas de figure excessivement rare. Définitivement un des meilleurs albums de la période, et dont l’influence ne s’est jamais démentie à ce jour.

 
 
I Know But I Don’t Know 

Foo Fighters – Echoes, Silence, Patience And Grace

Alors qu’il partaient de pas grand chose (le projet solo du batteur de Nirvana) les Foo Fighters sont devenus en une décennie un des plus grands groupes rock du monde. Un tel succès ne va pas sans inconvénients, notamment leur principal reproche : c’est bien, ouais, mais sans plus quoi. Il est vrai que depuis l’excellent The Colour And The Shape, les albums suivants ont été bons, mais… sans plus. Toujours quelques excellents morceaux, mais sans pouvoir assurer sur la durée, et sans arriver non plus à la perfection de l’album précité. Gil Norton, le producteur de TC&TS revient à la barre, et le premier single The Pretender n’est pas mal du tout, en restant très Foo. On tend donc une oreille attentive à ESP&G (ces titres!), en espérant être surpris.

Franchement, je l’ai été. Autant In Your Honour me semblait assez lourd et peu subtil (des deux côtés), autant ici Dave Grohl a réussi à mêler son côté rockeur avec ses talents – indéniables – de créateur de mélodies. Le superbe Let It Die le prouve avec un brio rafraîchissant, tout la rythmique implacable de Erase/Replace. Rien de bien innovant ici, mais un groupe qui semble avoir compris qu’il allaient droit dans le mur, et se sont donc fixé comme louable objectif de faire ce qu’ils font le mieux. Comme Come Alive : 3 minutes 30 calmes avant une explosion sonore prodigieuse. Les ballades, qui sont cette fois réparties sur l’album, et plus coincées sur un second disque oublié, doivent toujours subir le fantôme d’Everlong, mais se débrouillent plutôt bien, comme on peut l’entendre sur Stranger Things Have Happened ou le dernier morceau, Home.

On reprochera peut-être un manque de folie : un titre comme Cheer Up Boys (Your Make Up Is Running) en aurait eu besoin, et une désagréable uniformité. Mais Echoes, Silence, Patience And Grace reste un bon album, non seulement largement au dessus de la médiocrité actuelle, mais aussi sans doute le meilleur FF depuis un petit temps.

On ne devrait pas attendre plus des Foo Fighters, juste des bons albums de rock, délivrés avec puissance et finesse. C’est ce qu’ils savent faire, rien d’autre, et ce n’est sans doute pas plus mal.

Future Of the Left – Curses

La séparation de Mclusky a été, n’ayons pas peur des mots, ressentie comme une vraie catastrophe. J’ai déja suffisamment dit le bien que je pensais d’eux, ici, ici ou encore , il était juste temps pour eux de passer à autre chose, surtout qu’ils se tapaient quand même méchamment sur la tronche, à la fin. Le bassiste légèrement dérangé Jon Chapple a formé Shooting At Unarmed Men avant de s’exiler en Australie, alors que les deux autres tiers, le chanteur/guitariste Andy « Falco » Falkous et le batteur Jack Egglestone ont été rejoint par l’ex Jarcrew Kelson Mathias pour former Future Of The Left.

Ceux qui s’attendaient (étrangement d’ailleurs) à quelque chose de radicalement différent de Mclusky seront sans doute déçus. FOTL porte clairement la marque de fabrique de Falco, à savoir les paroles acerbes et titres étranges, mais aussi la batterie sous amphés d’Egglestone. Mais ils n’ont pas pour autant photocopié leur ancien matériel : FOTL est différent de Mclusky, notamment par une production moins dense (pas d’Albini cette fois) et l’utilisation ingénieuse d’un synthé passé sous distortion.

Ceci dit, la puissance est souvent au rendez-vous, comme on peut le remarquer d’entrée, avec The Lord Hates A Coward ou Plague Of Ounces, même si on ne cherche pas le volume sonore à tout prix, comme démontré dans l’assez upbeat My Gymnastic Past. Les claviers, quant à eux, donnent parfois un aspect plus poppy, meme si des paroles comme « Colin is a very pretty pussy » ne passeront pas vraiment à la radio. Mclusky envoie la sauce quand c’est nécessaire : Small Bones Small Bodies (on vous parlait des titres) tient sur un riff monolithique, alors que le clavier de Team:Seed rappelle les meilleurs scores de série Z italiens. Un morceau au piano clôture l’album, avant qu’on se sente évidemment obligé de le réécouter.

Curses est bon, très bon, et réussit dans tous les domaines : il rappelle Mclusky sans copier, mais tient sur des deux jambes, sans que les références soient nécessaires. Une réussite majeure, qui rappelle l’importance de Falco dans la paysage rock indie. Et, au passage, un des albums de 2007.