Distribution de musique 2.0 : Bromheads et Ash

Les lecteurs de Music Box Off (version Skynetblogs, faut que j’importe les posts ici, tiens) le savent, je suis avec attention les artistes qui tentent de changer le canevas classique magasin/Amazon/iTunes/15€.

Cette fois, j’aimerais parler de deux nouvelles tentatives différentes, mais originales.

D’abord, les anglais de Bromheads (ex-Bromheads Jacket), deux albums à ce jour dont l’excellent début Dits From The Commuter Belt. Prenant le contre-pied des récentes déclarations de la grande gueule un peu stupide Lily Allen, ils tentent de prouver que sortir de la musique gratuitement n’est pas un mauvais calcul : ils ont l’intention de sortir un single digital gratuitement, tous les mois pendant six mois. On verra comment tout cela se passe, mais le premier, Boots (une reprise de These Boots Are Made For Walkin’) est disponible sur http://www.bromheads.tv. Vous y trouverez aussi des liens Youtube, Twitter, Facebook ou encore Myspace, où ils viennent de poster deux démos pour lesquelles ils attendent du feedback.

Ash est déjà nettement plus connu, notamment pour une série d’excellents singles qui leur ont valu le titre à double tranchant de « Singles Band ». Il est vrai que leurs albums ont toujours laissé à désirer, mais leur idée semble vouloir changer cela.

A partir de mi-octobre, les nord-irlandais vont sortir un single (digital + vinyl) toutes les deux semaines, pendant un an. Ils seront disponibles individuellement, mais aussi suivant un système d’abonnement, dont les modalités devraient être bientôt connues.

Leur gimmick, c’est l’alphabet : chaque single portera une lettre, et ils vont accompagner tout cela par une tournée UK de 26 dates, chacune dans une ville portant une lettre différente, d’Aldershot à Zennor.

Le concept est intéressant, mais il faudra voir s’ils sauront tenir la distance, et sortir un morceau de qualité toutes les deux semaines. Le premier, True Love 1980, est en écoute sur http://www.ash-official.com et est assez synthastique.

The Beatles – With The Beatles (1963)

Album numéro 2, With The Beatles et son titre kitschissime ne fera que confirmer la légende. Il détrôna Please Please Me des charts anglais pour lui même s’y installer pendant 21 semaines, portant les Beatles pendant presque un an au sommet. Pourtant, c’est probablement le moins bon album du groupe, le plus faible. Enregistré et sorti rapidement pour capitaliser sur leur immense succès, il reprend le même concept que son prédécesseur : six reprises (RnB/Motown) et huit originaux, dont, pour la première fois, un morceau de George Harrison (le dispensable Don’t Bother Me).

On ne s’y attardera donc pas trop, même s’il comprend tout de même quelques passages intéressants, dont le mémorable All My Loving, montrant déjà le sens inné de la mélodie qui sera la marque de Paul McCartney pour les années à venir. En fin d’album, le superbe And I Love Her préfigure un certain Yesterday, et on notera aussi le méconnu Not a Second Time. Sinon, on remarque vite que l’album a été conçu comme photocopie de Please Please Me, avec Roll Over Beethoven pour « faire » Twist and Shout, par exemple.

Mais il faut tenir compte du fait que c’est tout de même le second album du groupe en six mois et qu’à l’époque, on alternait albums et singles : les Beatles venaient de sortir l’excellent She Loves You, alors que le non moins fantastique I Wanna Hold Your Hand allait suivre un mois après. On reparlera des morceaux non-albums lorsqu’on parlera des Past Masters, bien sûr. With The Beatles restera toujours connu comme le second album des Beatles, sans doute le moins intéressant, mais la rampe de lancement vers l’album qui définira la Beatlemania, A Hard Day’s Night.

Muse – The Resistance

Battre le fer tant qu’il est chaud, c’est ce que fait Muse depuis dix ans. Tournées incessantes, passages répétés en festival, cinq singles par album, et donc cinq albums studio (+ les dvd live) en dix ans. Grâce à tout cela, Muse est devenu probablement le plus gros groupe UK, et un des plus grands du monde (le monde, évidemment, ne comprend pas la grande île au large de l’Atlantique). Malheureusement, et c’est souvent le cas (voir récemment Kings of Leon), le succès populaire va de pair avec une méchante chute de qualité et de créativité. Black Holes and Revelations, l’album de la consécration, était probablement le moins bon, et les moments sympas (le surprenant comeback single Supermassive Black Hole) étaient dominés par le grand n’importe quoi (Knights of Cydonia) ou pire, le vraiment horrible (Starlight).

On ne pouvait donc pas s’attendre à grand chose de ce Resistance, surtout que les titres et le concept ne poussaient pas vraiment à l’optimisme, la parano politique du guitariste-miauleur Matthew Bellamy étant vite lassante. Les deux morceaux avant-coureurs n’ont pas aidé : United States of Eurasia commence comme une bête ballade, avant de « s’inspirer », une fois de plus, de Queen, alors que Uprising fait encore plus fort, plagiant facilement une dizaine de morceaux connus, une habitude chez Muse. Mais bon, si on est de bonne humeur, on peut aller chercher quelques éléments sympas, comme le refrain étonnant et très catchy du morceau-titre, l’intro musclée de Unnatural Selection (la suite est moins fun) ou l’assez carré MK Ultra.

Malheureusement, The Resistance est surtout le véhicule de l’ego de Bellamy, guitariste hors pair qui néglige ses guitares pour se focaliser ici sur le piano et le pompeux. Undisclosed Desires est totalement infâme, sorte de saloperie RnB rejetée par Boyz II Men en 1995 alors que I Belong To You (avec son piano cabaret parisien) se termine par un Bellamy qui ne trouve rien de mieux que de chanter un bout du Samson et Dalila de Camille Saint-Saëns, en français. Ce qui donne, en gros, « riiiiipooooonza ma tendwessseeeeuuu ». C’est mignon. L’album se termine avec la fameuse symphonie dont Bellamy parle depuis des années, et qu’il a eu la funeste idée de terminer. Enfin, soyons honnêtes : ce n’est pas mauvais, l’orchestre assure, mais on ne voit pas trop l’intérêt de ces dix minutes qui ne vont nulle part, et qui sont loin d’être le morceau épique promis.

Difficile de haïr The Resistance, qui est plus plat que le précédent. Au moins, il était très facile de détester Starlight ou Invincible, ici, on écoute une fois, on soupire et on passe son chemin. Vraiment dommage pour un groupe qui était prometteur, qui a sorti un très bon album, mais qui se perd en chemin depuis maintenant trop longtemps.

The Beatles – Please Please Me (1963)


And so it begins… La série, qui s’entame donc aujourd’hui, de chroniques des albums remasterisés des Beatles n’est pas censée (ré)écrire l’histoire des quatre de Liverpool, mais sera simplement un point de vue très subjectif. L’oeuvre des Beatles est profondément ancrée dans son époque, c’est pourquoi je ne peux que conseiller la lecture du fantastique Revolution In My Head, de Ian Macdonald, qui non seulement analyse chaque morceau du groupe, mais replace le tout dans son contexte.

En quelques mots, le contexte de Please Please Me est simple. L’industrie du disque est fort différente de maintenant, et voulait à l’époque capitaliser sur un jeune groupe qui créait des vagues, notamment grâce à leurs shows en résidence au Cavern Club de Liverpool. C’est donc tout naturellement que l’album correspond à leur setlist de l’époque, et qu’il a été largement enregistré live en studio. Le succès est immense : trente semaines numéro 1 des charts britanniques, et le point de départ d’une légende, qui est aujourd’hui remise à neuf grâce aux remasters mono et stereo.

Au risque de commetre un blasphème, je ne suis pas un grand amateur des premiers albums. Please Please Me semble être reconnu comme le meilleur de la période « rock ‘n roll » du groupe, et c’est vrai qu’il est intéressant à plusieurs égards. Mais il est très très loin d’attendre l’invraisemblable brillance que le Fab Four atteindra à plusieurs reprises quelques années plus tard. En fait, la principale qualité de l’album n’est même pas musicale, c’est ce qu’il représente : pour la première fois, un groupe de musiciens « pop » sort un album sur lequel ils chantent (tous, même), jouent de leurs propres instruments (avec notamment une section rythmique McCartney/Starr très solide) et composent une majorité de morceaux (huit sur quatorze). Ce qui n’était pas évident du tout à l’époque.

Parlons tout de même un peu de musique. Forcément, c’est brut et primitif, on est tout de même en 1963. Et même s’il ne faudra que quelques années pour que les Beatles (et certains de leurs pairs, n’oublions pas) révolutionnent la musique populaire, ici, c’est le début. On sent un groupe qui se cherche, notamment au niveau des voix : les cinq premiers morceaux voient quatre lead vocalistes différents se succéder. Quatre vocalistes qui d’ailleurs, chantent juste. De même, les contraintes de production et de marketing font que les compositions personnelles ne doivent pas s’éloigner trop des reprises. Il n’empêche que les toutes premières compositions estampillées Lennon/McCartney (pas encore de compos de Harrison) sont souvent meilleures que les reprises, et comprennent déjà quelques éclairs de génie, comme la ligne de piano de Misery, ou le rythme probablement indécent de Love Me Do (batterie jouée par Andy White, la version Ringo étant encore plus puissante).

I Saw Her Standing There et Please Please Me sont sans doute les deux autres originaux qui sortent du lot, mais c’est la reprise finale qui restera le morceau de choix de l’album. Enregistré en toute fin de session, Twist and Shout est électrique, et aussi puissant qu’un morceau pop pouvait être à l’époque. La voix de John Lennon, qui était préservée jusque là, se rapproche de la rupture, et montre à quel point ces quatre-là possédaient des talents complémentaires hors pair. On n’avait encore rien vu.

The Beatles Remasters : introduction explicative

Vous l’avez probablement entendu/lu quelque part, un vieux petit groupe refait parler de lui ces jours-ci. Pour voir un peu plus clair, voici un résumé de ce qui se passe avec les remasters des Beatles et Music Box.

Aujourd’hui, le 9/9/9, sortent les albums des Beatles, remasterisés pour la première fois depuis leur sortie en cd, qui date de 1987. Pour faire court, les albums avaient besoin d’un gros dépoussiérage, et ce dernier est magnifique.

Les albums sortent de trois manières :

– individuellement, les douze albums studio + Magical Mystery Tour et la (double) compilation de morceaux hors albums Past Masters. Ce seront les mixes stéréo, pour la première fois en ce qui concerne les quatre premiers albums. Chaque album est accompagné d’un documentaire en quicktime, ainsi que des notes d’époque.

– un box reprenant tous les albums qui sortent individuellement, avec un DVD reprenant les documentaires

– un box plus particulier, qui comprend les dix albums sortis à l’époque en mono, autrement dit, de la manière à laquelle on était tous censés les écouter. De plus, Help! et Rubber Soul comprennent le mix stereo d’origine (les versions cd de 1987 avaient été remixées pour l’occasion). Past Masters est ici renommé Mono Masters, et comprend les morceaux non-albums mono, y compris un EP 4 titres jamais sorti pour accompagner Yellow Submarine (le film).

Ce qui fait donc trente disques, et un certain temps pour tout ingurgiter. Après quelques écoutes, deux conclusions sont évidentes : d’abord, le son est totalement somptueux, et surpasse non seulement les cd de 87 (ce qui n’était pas difficile) mais aussi les remasters officieux du Dr. Ebbetts. Ensuite, les versions mono me semblent préférables quand c’est possible, pour des raisons de fidélité, mais aussi de qualité sonore : on peut remasteriser ce qu’on veut, mais à l’époque, l’enregistrement en stéréo, ce n’était pas encore au point.

Mais je ne veux pas rentrer dans des détails trop techniques : les articles qui, j’espère, seront publiés ici régulièrement feront part de mes impressions en tant qu’auditeur, pas en tant que technicien qui repère le moindre détail, la moindre différence entre les versions.


On commencera donc avec Please Please Me, pour se terminer un jour avec Let It Be.

« When I get to the bottom, I go back to the top of the slide… »

This is my music box, this is my home. Since 2003.