On avait quitté Radiohead en 1997, suite à deux événements majeurs : OK Computer, et, dans la tournée qui a suivi un concert mémorable à Rock Werchter. Puis, secret et silence, jusqu’à l’annonce d’une tournée non sponsorisée, sans aucun album à vendre. Ils sont venus de nouveau à Werchter, mais sous chapiteau, pour ce qui fut une des expériences les plus surréelles de ma vie. Lors de ce concert, on a pu entendre quantité d’inédits, qui ne ressemblaient absolument pas à ce qu’on connaissait du groupe. Quelques semaines plus tard, la première partie de ces enregistrements voyait le jour.
Everything In Its Right Place avait déjà frappé tous les esprits lors des concerts, avec son intro traînante à l’orgue, et une fin qui part dans tous les sens : Jonny Greenwood samplant et manipulant en temps réel la voix de Thom Yorke. Déjà, après quelques minutes, on se retrouve déjà face à un des plus grands morceaux du groupe. Kid A, la "chanson" suit, est en fait une sorte de collage musical étrange, influencé par quelques terroristes des circuits imprimés à la Aphex Twin ou Squarepusher. Voix complètement sous acide, basse puissante, mais absence complète de structure reconnaissable, et de guitares. C’est ce qui avait choqué à l’époque : on savait Radiohead de nature expérimentale, mais de là à quasi virer les guitares, il fallait le faire…
The National Anthem tient debout grâce, comme souvent, à la basse de Colin Greenwood, et alors que le morceau semble somme toute assez classique, il se finit en free jazz complètement à la masse, avant que le cousin d’Exit Music (For A Film), How To Disappear Completely, montre pour la première fois qua la technologie peut aussi transporter des émotions. Optimistic foule un terrain déjà plus connu, avec, il semble, une guitare quelque part derrière. Mais le morceau en lui-même, et les percussions tribales font vite comprendre qu’on n’est plus vraiment avec le groupe de Creep…
Et que dire d’Idioteque, le morceau qui avait scotché tout le monde sur place en concert. Un immense beat techno, une manipulation sonore grandiose, des paroles typiquement parano et un autre grand moment. Le sombre Motion Picture Soundtrack clôt un album choquant, peut-être moins maintenant quand on connaît les trois albums qui ont suivi, mais Kid A reste toujours un monument, et LA référence en matière de réinvention sonore. Alors que des tonnes de groupes se revendiquaient de Radiohead, ils ont décidé de se réinventer, s’attirant un immense respect et élargissant leur audience.
Everything In Its Right Place
Idioteque