On oublie les structures classiques : seuls deux morceaux sur quatorze dépassent les trois minutes, et malgré leur relative brièveté, il faut souvent attendre un petit temps avant que la voix se fasse entendre, et même à ce moment, elle est généralement mixée en retrait. On doit aussi s’attendre à un son puissant, part My Bloody Valentine, part Mogwai, toujours intense : les mélodies sont là, mais enfouies sous des couches lofi de puissance sauvage. Teen Creeps, par exemple, débute de manière mélodique et tranquille avant de surprendre l’auditeur brusquement, sans aucune concession. Ca fait mal, mais c’est vachement bon.
Tout l’album se passe dans une constante incertitude, oscillant entre le calme et la tempête, la mélodie et le chaos. Parfois, on peut regretter un relatif manque de focus, Keechle n’apportant pas grand chose de plus que trois minutes de feedback. Mais cela ne dure pas, car Sleeper Hold éclate de brillance punk irrésistible. Peu après, c’est une guitare acoustique qui entame l’instru ambient Impossible Bouquet : la diversité de l’album est énorme. Quand Brain Burner conclut par 1’51 de bonheur électrique, on ne peut que relancer l’album, et se laisser envahir de nouveau.
Nouns sera fatalement un des albums de 2008, par son caractère ovni mais aussi par un profond (et inhabituel) respect du public : l’album est accompagné d’un livre d’art de 68 pages. Même sans suppléments, il aurait de toute façon été acclamé, de la même manière que leurs collègues bruitistes Times New Viking dont je n’ai même pas encore parlé. 2008 ne sera donc pas que l’année du retour de My Bloody Valentine, mais aussi (surtout) de l’avènement d’un de leurs plus talentueux successeurs.