Red Hot Chili Peppers – Stadium Arcadium

23 années d’existence, et toujours aussi populaire. Le quatuor californien, qui n’aura pas été épargné au cours de sa carrière (overdoses et drames divers), s’est particulièrement assagi ces derniers temps, au point de ne plus signifier grand chose aux yeux du connaisseur, éternellement rivés sur leurs deux chefs d’œuvre, Mother’s Milk et BloodSugarSexMagik. Mais voilà, malgré leur quota has-been qui rejoint presque celui de Metallica, malgré leurs concerts typiquement mauvais (Anthony Kiedis est clairement un bon chanteur de studio), malgré les pitreries fatigantes de Flea, le groupe reste incontournable pour une seule raison.

John Frusciante.

Probablement le guitariste le plus doué de sa génération, voire des précédentes. Il avait déjà réussi à canaliser le son Red Hot (le guitariste d’origine était Hillel Slovak, mort en 1988) dès BSSM, mais ses problèmes personnels liés aux drogues l’a forcé à quitter le groupe. Vu que son remplaçant (Dave Navarro, quand même) ne convenait clairement pas, il est revenu pour les moyens Californication et By The Way, mais l’an dernier, il a pu montrer au monde (ou du moins à ceux qui l’écoutent) l’immense étendue de son talent grâce à six albums solo aussi différents qu’excellents (à conseiller : Curtains et The Will To Death).

Alors, qu’a-t-il apporté à Stadium Arcadium, double album ambitieux ? Tout, aussi simple que ça. Anthony Kiedis apporte son timbre de voix reconnaissable, histoire de vendre, Flea et Chad Smith font tenir la baraque, mais Frusciante… Autant être clair, la moitié des morceaux ici sont moyens, et on s’en serait mieux sorti avec un simple. Mais chaque passage est intéressant grâce à Frusciante, qui transcende chaque petite note.

Il ne faut pas aller très loin pour les exemples : oublions le single Dani California et son double plagiat de Tom Petty (Mary Jane’s Last Dance) et Lynyrd Skynyrd (Sweet Home Alabama)) pour arriver au second morceau, le pénible et énervant Snow. Eh bien, sans Frusciante, on serait carrément en pays Black Eyed Peas. Ici, il sort une intro terrible, et des minis solos un peu partout. D’ailleurs, quand on prête une oreille attentive, on remarque qu’il joue très rarement la même chose lors de deux couplets successifs.

Par la suite, Stadium Arcadium vit bien son titre, tout comme Hump De Bump, qui voit le groupe revenir timidement au funk qui fit leur renommée. Et c’est tout le problème de cet album, qui continue dans la veine molle des deux albums précédents : on dirait que le groupe a envie de lâcher un brûlot à la Give It Away, mais ils ne se le permettent pas, peut être par frilosité commerciale.

On retiendra encore du très bon (Torture Me, Storm in a Teacup), du moyen, et du carrément mauvais (Hard To Concentrate, ou la demande de mariage de Flea écrite par Anthony Kiedis).

C’est assez contradictoire, mais même si Stadium Arcadium n’est pas un très bon album, et souffre de grosses longueurs, il reste très intéressant, et se laisse aisément réécouter grâce à la performance de John Frusciante, littéralement une des plus extraordinaires de ces dernières années.

Et en plus, quand on l’a entendu chanter, on se demande quand même ce qu’il fait toujours avec cette bande de losers vieillissants. Mais bon, vaut mieux un Frusciante que pas de tout, et vivement les prochains albums solo.

Morrissey – Ringleader Of The Tormentors

Le come back de Morrissey en 2004 était aussi impressionnant qu’étonnant. Succès populaire et critique, on se serait cru de retour à une époque qu’on pensait révolue, où les posters de Steven Patrick Morrissey et Johnny Marr ornaient les chambres des adolescent(e)s.

Deux petites années après, Morrissey revient avec un album écrit et enregistré à Rome, dans un état d’esprit radicalement différent : en effet, ce reclus légendaire a trouvé l’amour, et ne se prive pas de nous en faire part : « I entered nothing, and nothing entered me / Till you came with the key ». Plus explicite que ça, c’est un album de Lil’ Kim.

Et ce n’est pas la seule allusion sexuelle qu’on retrouve sur ce disque, mais Morrissey n’a évidemment pas oublié d’inclure des remarques cyniques sur la politique US actuelle (« If the USA doesn’t bomb you / I will see you »).

Tony Visconti, le légendaire producteur de David Bowie, a truffé Ringleader of The Tormentors (ce titre…) d’effets sonores rappelant la capitale italienne, mais aussi de cordes et de différentes instrumentations très classe, moins rock que You Are The Quarry, mais tout aussi attachant. Autre référence italienne, Ennio Morricone en personne a participé à l’écriture d’un morceau.

Évidemment, tout cela sonne parfois un peu too much, mais on ne refera jamais Morrissey, et on ne le voudrait pas de toute façon. Reste un album sans vraie faille, qui comblera la légion de fans de Morrissey sans vraiment parvenir à toucher les autres.

Be Your Own Pet – Be Your Own Pet


L’univers indie contemporain est assez calme, voire aseptisé. On n’a plus vraiment eu, depuis quelques temps, de groupe dont l’attitude et l’envie d’exister transcendaient leur art. Arctic Monkeys, en effet, mais leur musique reste somme toute assez classique. Finalement, il faut s’en référer aux tabloïds pour trouver trace de danger, avec ce brave Pete Doherty. Qui serait une bien meilleure incarnation du rock n roll s’il décidait vraiment à faire de la musique.

Ce qui nous amène aux très intrigants be your own PET (selon leur orthographe), quatuor très jeune de Memphis, emmenée par une arme de destruction massive absolument inouïe, et une des plus extraordinaires frontwomen de l’histoire du rock (non, je ne rigole pas), Jemima Pearl, 18 ans. Oh, elle n’a pas une gamme vocale terriblement étendue, elle ne semble pas fumer de crack, mais putain, quelle énergie.


Après quelques EP bien reçus, le premier album de BYOP (Jemima et trois non moins énergiques teenagers) est court, une trentaine de minutes, mais ne s’arrête quasi jamais. En esprit, c’est le truc le plus punk entendu depuis très longtemps. Les morceaux se suivent à une vitesse effrénée, sur base de riffs empruntés autant aux Ramones qu’à Black Sabbath. Les paroles suivent le reste, soit complètement nonsense (We Will Vacation, You Can Be My Parasol) soit agressives (« I’m an independent motherfucker, and I’m here to steal away your virginity ») et sont chantées/hurlées avec la conviction qu’avait Courtney Love il y a si longtemps…


En fait, cet album est tellement pavé de bonnes intentions qu’on laisse passer ses défauts, à savoir un certain manque de variation et une voix qui peut quand même vite fatiguer. Mais d’un autre côté, les morceaux dépassent rarement les deux minutes, avec le single Let’s Get Sandy atteignant les 58 secondes frénétiques.


Mais on s’en fiche, un album avec imperfections est encore plus attachant, et à défaut d’être parfait de bout en bout (quoi que dans le genre, il l’est), be your own PET est carrément incroyable et surtout inattendu.


Kick in the ass of the year

This is my music box, this is my home. Since 2003.