Therapy? – Crooked Timber

Il y a très peu de groupes qui font une carrière sans faute. On finit toujours par se ramollir (au mieux), par tenter de se réinventer (Radiohead étant l’exception confirmant la triste règle) ou pire, par devenir totalement inutile et embarrassant (chaussures compensées + grosses lunettes, guitariste à bonnet? Eux.). Le douzième album de Therapy? est un de leurs tous meilleurs, tout en étant, comme souvent, différent de ce qu’ils ont fait auparavant.

Therapy? est un de mes groupes préférés, que je suis depuis pas mal d’années, et qui ne m’ont jamais vraiment déçu. Cependant, les deux derniers albums (Never Apologize Never Explain et One Cure Fits All), tout en étant largement décents, n’apportaient que peu au canon des irlandais. Trois ans après, il fallait sans doute se réinventer, et c’est ce que le groupe a fait, notamment en invitant Andy Gill à la production. Gill, influence majeure de pas mal de monde s’inspirant de son groupe Gang Of Four, a réussi à insuffler une nouvelle dynamique à Therapy? Le groupe sonne très soudé, avec une mention très spéciale à la basse de Michael McKeegan. C’est simple : la basse est l’instrument majeur d’un album à la rythmique aussi impeccable que dévastatrice.

On le remarque d’entrée de jeu avec The Head That Tried To Strangle Itself, ou la dynamique (oui, je me répète) du power trio est poussée à son maximum. Therapy? n’a jamais semblé aussi tight depuis le départ de Martin McCarrick. Il faut donc souligner la place du batteur Neil Cooper : non seulement il rappelle parfois Fyfe Ewing, le légendaire premier cogneur de fûts du groupe, mais il complète McKeegan à la perfection. Reste le dernier membre, Andy Cairns, dont la guitare est donc fatalement parfois en retrait. Ce qui ne l’empêche pas d’envoyer des riffs dantesques et une guitare rythmique idéale. Enfin, Cairns profite du caractère novateur des structures des nouveaux morceaux pour tenter quelques nouvelles choses avec sa voix. Certains diront qu’il chante enfin, je dirai simplement qu’il évolue…

Après le morceau d’intro, suivent carrément deux des meilleurs morceaux jamais enregistrés par T?. Enjoy The Struggle possède une rythmique totalement inouïe alors que Clowns Galore rappelle carrément leurs débuts, et Teethgrinder. Peut-être même en mieux, c’est dire. Cairns est rageur, expédie des solos courts limite industriels, et T?, au risque de me répéter, n’a plus sonné comme ça depuis quelques années. Mais Crooked Timber est assez varié, malgré l’approche bassique (oui, j’ai fait mieux) de l’album : Exiles est étrangement atmosphérique, comme si T? se retrouve signé par Factory Records il y a 25 ans, alors que Crooked Timber commence par une intro au glockenspiel ultramélodique, avant que la basse de McKeegan ne balaye littéralement tout ce qui passe.

On se s’ennuie pas : I Told You I Was Ill pastiche leur tout premier album en ce qui concerne le son de la batterie, pendant que Cairns joue son crooner sur un accord des Ramones. Wow quoi. Somnanbulist et Blacken The Page ramènent un peu le groupe vers leurs influences punk (mais c’est pas Shameless non plus). En fait, c’est tellement varié que s’il n’y avait pas la voix de Cairns, on se demanderait pendant tout l’album de qui il s’agit, surtout avec le morceau suivant. Magic Mountain est 1) un instrumental de dix minutes 2) le truc le plus étrange jamais sorti par T? 3) un morceau qui ne leur ressemble pas 4) un morceau qui ne ressemble à personne d’autre. Parfois un peu répétitif, mais l’intention était là. Enfin, Bad Excuse for Daylight amène un peu de mélodie sur une couche grasse de basse, et clôture un album qui demande qu’on le réécoute immédiatement.

Mon album préféré de 2009 jusque maintenant. Et en plus, il sort en vinyl.

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