Babyshambles, il faut bien le reconnaître, c’était pas terrible du tout. Un premier album calamiteux, un second juste meilleur. On ne ressortira de cette période que le magnifique Albion, mais le morceau était aussi vieux que What a Waster. Doherty devait donc s’en sortir, au risque de – littéralement – disparaître. Et il a trouvé une aide précieuse, auprès de quelqu’un à qui on ne le fait plus : Graham Coxon.
Coxon, aussi Londonien que Doherty, est passé par l’immense succès, l’adulation, et les abus de substances (plutôt alcool pour lui). Il pouvait donc aider Doherty, qu’il a vite qualifié de « scumbag magnet », à sortir du trou, tant musicalement qu’humainement. On ne saura jamais ce que Graham Coxon – l’être humain – a fait pour Peter, mais par contre, il a prêté ses talents de guitariste à onze morceaux sur douze. Et il a bien fait.
Doherty, comme dit plus haut, ne sera jamais un grand chanteur, il se complait d’ailleurs encore parfois dans cet espèce de murmure de sdf alcoolo dans un couloir de gare. Dommage, parce que quand on écoute ce qu’il dit, on se rend compte qu’il ne reste plus beaucoup d’auteurs de talent. Vous connaissez encore beaucoup de monde qui écrit des rimes enchâssées comme « my rival the sun / who ripens the plum », vous? Contrairement à ce qu’on pourrait croire, les guitares de Coxon sont quasi toutes acoustiques (comme son prochain – et excellent – album solo, on en reparlera), ce qui accentue l’aspect « chanson ».
La majeure partie des morceaux sont assez simples d’accès, des chansons acoustico-romantiques, mais bien écrites et parfois vraiment touchantes : Salome, I Am The Rain comptent parmi les meilleurs morceaux écrits par Doherty. Mais il tente de surprendre, avec un Last of The English Roses formaté pour ressembler fort bizarrement à Gorillaz, ce qui ne marche pas trop bien. De même, l’obsession maladive de Doherty avec le classicisme british le pousse parfois à faire un peu n’importe quoi, comme le music hall douteux de Sweet By and By. Mais ces influences arrivent à pénétrer l’essence même d’autres morceaux, comme Arcady ou un poème de guerre appliqué en 2009, 1939 Returning.
Ce qui surprend surtout, c’est la solidité de l’album. On avait l’habitude d’avoir 3-4 morceaux valables par album de Babyshambles, ici tout se tient presque, on a même de très bons morceaux pour finir, dont Sheepskin Tearaway (encore un vieux morceau) avec Dot Allison, ou Broken Love Song, coécrit avec Wolfman (remember For Lovers?). Coxon se laisse parfois aller dans des paysages sonores parfois Sonic Youthiens (Palace of Bone, New Love Grows On Tree), mais l’ensemble reste étonnamment discret et d’autant plus impressionnant.
Il faut toutefois garder une certaine objectivité, ce n’est pas l’album du siècle non plus. Mais si Doherty continue à se ressaisir, à se montrer en concert (on ne parle plus de ses retards et annulations, maintenant qu’il n’y en a plus…) et à bien choisir ceux qui l’entourent, alors, il reste de l’espoir. Surtout que les Libertines vont probablement se reformer l’an prochain…