Archives de catégorie : Ressorties et Compilations

R.E.M. – Live

Étrangement, R.E.M. n’avait pas encore sorti d’album live officiel. Il était donc évident qu’en choisissant un concert (deux même) récent, de la tournée 05 Around The Sun, que le setlist allait créer quelques critiques. Mais R.E.M. l’a fait quand même, en sachant qu’on ne peut satisfaire tout le monde.

D’ailleurs, ils prennent tout le monde par surprise en commençant par I Took Your Name, extrait du malheureux et fort critiqué Monster, avant d’envoyer Everybody Hurts tôt dans le show. Michael Stipe vole la vedette, évidemment, et encore, on ne le voit pas. Par contre, il est dommage de voir les autres musiciens en retrait, surtout au niveau batterie. On sait que Bill Berry a quitté le groupe et n’a jamais été remplacé, mais une boîte à rythmes, ce n’est pas génial. Sinon, malgré ce côté parfois pilote automatique qui fait que R.E.M. ne sera jamais considéré comme une bête de scène, les morceaux tiennent tous seuls, même les récents comme Ascent Of Man ou Walk Unafraid. Sinon c’est évidemment hit sur hit, comme on peut le voir sur le setlist.

Losing My Religion finit le concert avant les rappels, et est assez embarassant, vu la réaction d’un public pas si connaisseur, qui n’a pas trop réagi à l’écoute des trois morceaux pré-Warner, dont l’immense The One I Love. Avant un final mémorable sur Man On The Moon, le groupe nous gratifie d’un chouette nouveau morceau, qui pourrait se retrouver sur le prochain album, attendu pour l’an prochain. Somme toute, Live est de bonne facture, mais est assez dispensable. Les fans ont déjà bien plus qu’un concert à écouter, les autres pourraient être modéréments intéressés. On prendra juste ça comme une raison de ne pas oublier le trio d’Athens avant son retour.

Dylan – Dylan

Dylan_album_coverRobert Allen Zimmerman chante depuis plus de quarante-cinq ans. Dans ce laps de temps, il est devenu l’un des artistes le plus importants de la musique contemporaine (oui, c’est vague), et un des plus repris. Qui pense à Dylan en écoutant All Along the Watchtower, voire (horreur) Knockin’ On Heaven’s Door? Ces deux morceaux, et quarante-neuf autres, sont repris sur cette énorme compilation, au titre adéquat. Attention toutefois : l’album est disponible en plusieurs versions, dont une risible édition dix-huit morceaux. Tant qu’à faire, autant prendre la totale.

Arrangée chronologiquement, la compilation laisse évidemment la part belle au début de carrière du Dylan : le premier disque couvre la période entre 1962 et 67, le second 67-85 et le dernier 85-2006, le but étant de reprendre le plus possible de morceaux importants. De toute façon, le but d’un tel album, et dans une moindre mesure de cet article, n’est pas de résumer Dylan, mais plutôt de faire une sorte d’introduction générale.

Le début est évidemment folk : Dylan, une guitare acoustique et un harmonica. L’album The Freewheelin’ Bob Dylan est très bien representé, avec trois morceaux dont l’immense Masters Of War, sans doute la protest song la plus violente jamais écrite. Il faut l’entendre se clôturer avec ces mots terribles "And I’ll stand on your grave / Till I’m sure that you’re dead" pour tenter de comprendre ce qui animait son auteur, qui, sur A Hard Rain’s A-Gonna Fall décrit de manière pittoresque un paysage post-apocalyptique.

Puis, le ton devient plus électrique, et on se souvient de ce très célèbre épisode où, lors d’un concert à Manchester en 1966, un fan cria "Judas" à Dylan, coupable d’avoir échangé son acoustique contre une Strat. Il joua ensuite une version monstrueuse de Like A Rolling Stone, et le rock n roll trouvait une raison d’être supplémentaire. Dylan, constamment à la recherche d’innovation, rajouta sans cesse de nouveaux thèmes et instruments, tout en restant généralement un poète de grand niveau, quand on ne le surprend pas coupable de sexisme primaire.

Ensuite, alors qu’on peut trouver moins d’importance à son oeuvre, et même s’il passe logiquement par quelques moments moins fertiles, Dylan réussit à sortir quelques albums de qualité, continuant seul son chemin vers la légende. Est-ce que cette dernière est en en fait supérieure à l’oeuvre? Peut-être, mais l’Histoire a décidé, et Dylan restera bien plus qu’un musicien.

Masters Of War

 

The Verve – Urban Hymns (1997)

TheVerveUrbanHymnsUrban Hymns est un mythe, une légende, et un des tous grands classiques du rock anglais. Il a été quasi unanimement élu album de l’année 97, malgré qu’OK Computer soit sorti la même année. Le fait que le groupe s’est effondré peu de temps après, et vient d’annoncer se reformation est un bon pretexte pour le revisiter.

Non seulement Urban Hymns est solide en tant qu’album, mais il comprend aussi, et surtout, un hit immense : Bitter Sweet Symphony. Il ouvre l’album, tout le monde le connaît, et dix ans après il n’a pas pris une ride. Le morceau est pourtant très simple : une boucle de violons empruntés à une orchestration des Stones (qui ont scandaleusement voulu l’entièreté des bénéfices), un rythme régulier et la voix de Richard Ashcroft, clamant ses réflexions sur le sens de la vie. Formule parfaite pour morceau parfait. Mais si l’on croit que le groupe es relativement limité, la suite de l’album va prouver le contraire, comme Sonnet, qui est, au risque de me répéter magnifique, dans un mid-tempo poignant. Qui avait besoin, ces années-là, de Liam Gallagher, quand on entend ça?

Les deux premiers albums du groupe étaient moins Britpop et plus atmosphériques, éléments qui se retrouvent tout au long de l’album, surtout dans les morceaux qui ne sont pas sortis en single, et qui sont généralement plus rock, comme The Rolling People, ou Catching The Butterfly. Mais c’est sans doute The Drugs Don’t Work qui domine ici, histoire forcément vécue, et qui devrait être un classique au moins aussi intemporel que Wonderwall. L’expression parfaite de l’âme humaine traduite en accords et en mots. Le genre de chanson qui fiche la chair de poule à chaque fois, et qui fait qu’on s’arrête dès qu’elle commence, pour l’écouter jusqu’au bout. Terrible.

Forcément, tout l’album n’atteint pas ce niveau, et ce n’est d’ailleurs pas son but : le groupe aime se complaire dans une certaine ambiance éthérée, aux antipodes de la Britpop de l’époque, comme dans un Neon Wilderness frôlant la rythmique trip-hop. Urban Hymns est l’album le moins tubesque de la période Britpop, contrairement à, par exemple (What’s The Story) Morning Glory? ou The Great Escape, chaque morceau n’est pas un single potentiel. Mais c’est aussi le plus dense, peut-être le plus authentique. La seconde moitié est d’ailleurs nettement moins accessible que la première, à l’exception du single Lucky Man, sans doute le moins potent des quatre. One Day continue dans le sublime, et arriverait, si comparaison devait être faite, aisément au dessus des tubes surévalués de U2, par exemple.

Urban Hymns ne comprend pas vraiment de morceau de remplissage, même si les fans des singles ont sans doute été surpris par le reste de l’album. Come On conclut l’album par un déferlement de guitares limite shoegaze, et le fait très bien, comme le meilleur morceau qu’Oasis n’aura jamai eu le talent de créer. Comme évoqué plus haut, le groupe s’est violemment séparé, et à part quelques albums mineurs pour Ashcroft et la pige de Simon Tong chez Damon Albarn, on a plus entendu grand chose des cinq de Wigan, jusqu’à une reformation qu’on espère motivée, pour une fois…

 

The Drugs Don’t Work

Elliott Smith – New Moon

Le commerce des morts est lucratif, on le sait depuis toujours, anniversaire de la mort d’Elvis le prouvant une fois de plus. New Moon est le second album sorti depuis la mort d’Elliott Smith en 2003, et fait suite à From A Basement To The Hill, qui était en chantier lors de son (apparent) suicide. New Moon est différent, car il s’agit d’une collection de raretés issues de sa période chez Kill Rock Stars Records entre 94 et 97, et on peut donc se poser la question de la légitimité de l’album, pour deux raisons. D’abord, parce qu’une majorité des raretés en questions étaient largement disponibles sur divers fansites, ensuite, parce que la longueur de ce double album peut poser la question de la qualité : quel artiste pourrait avoir assez de bons morceaux pour remplir quatre cd en quatre ans? Réponse : Elliott Smith.

La grande majorité des morceaux présent sur New Moon auraient largument pu se retrouver sur les albums concernés, tant le niveau est élevé ici. Le toute st souvent minimaliste, et très Elliott Smith, pas vraiment d’expérimentation ici. Simple guitare, la voix doublée d’Elliott, et parfois une batterie ou un clavier, rien de plus. Mais c’est de toute façon amplement suffisant, tant le talent ébouriffant de Smith n’a pas besoin d’autres moyens d’expression. On relèvera juste quelques morceaux plus rock, comme High Times, New Monkey ou Fear City, mais c’est souvent la simplicité qui prime.

Simplicité alliée aux thèmes récurrents chez Elliott Smith : le mal-être ou la solitude qui confèrent à New Moon une atmosphère typiquement sombre mais très personnelle et passionnante. Outre les deux défauts mineurs évoqués plus haut, il n’y a rien qui pourrait empêcher New Moon de rejoindre les autres albums d’Elliott Smith, tout en espérant que le mercantilisme postmortem ne se fera pas au détriment de la qualité : tant qu’il reste des morceaux comme ceux-ci, il faut qu’ils sortent, de toute façon. Elliott Smith n’aura pas pu sauver sa vie, mais il pourrait sauver la vôtre.

Garbage – Absolute Garbage

En guise de pub pour de la vodka, c’est en fait un best of de Garbage dont on a droit. Souvenez-vous, Garbage, c’est ce groupe de rock alternatif (oui, ça existait) qui a connu un certain succès au milieu des années 90, grâce à une série de hits et à la très charismatique chanteuse Shirley Manson. Le statut de Garbage semble assez incertain, c’est sans doute pour cela que cette compilation est sortie, pour nous rappeller les quelques moments de gloire de la formation.

Garbage, ce n’est pas vraiment un groupe. Outre Manson, les autres membres sont des rats de studios et producteurs aguerris, dont le célèbre Butch Vig (producteur de Nevermind, entre autres). On leur a toujours – injustement – reproché ce fait, alors que le lineup particulier a permis d’obtenir un son particulier, effectivement très peu organique mais diablement efficace. Comme la compilation à la bonne idée d’être présentée chronologiquement, on en tarde pas à s’en rendre compte.

Les extraits de Garbage sont les meilleurs : Vow, Milk, ou encore les tubesques Only Happy When It Rains, Queer et Stupid Girl (qui sample Train in Vain, de Clash), soit des nappes d’instruments trafiqués et la voix sexy légèrement perverse de Shirley Manson. Original, et comme je l’ai déjà dit, très efficace. Ce mélange de rock, metal, electro et trip-hop (vous vous souvenez du trip-hop?) est vraiment la propiété de Garbage, même si la formule n’aura duré que deux albums. Le second opus, Version 2.0 polit la production et fait de Garbage une véritable machine à hits alternatifs : Push It, I Think I’m Paranoid, You Look So Fine ou Special, étonnant mixup entre production moderne et pop 50s. C’est à partir d’ici qu’on se rend compte du manque de profondeur du groupe, confirmé par les prestations live peu impressionnantes du groupe. Mais les morceaux sont chouettes, et Garbage devient suffisamment connu pour écrire un morceau pour le James Bond de l’époque, The World Is Not Enough.

Après, rien ne va plus : beautifulgarbage est insignifiant (même si, étrangement, un des meilleurs morceaux de l’albums, Androgyny, est absent ici) et Bleed Like Me à peine meilleur. Le fait que les deux derniers albums ne sont pas du niveau de leurs précécesseurs (même si Bleed Like Me a ses bons moments) est reconnu ici : sur les dix-huit morceaux, seuls quatre en sont extraits, contre cinq pour le seul Garbage. On ajoutera un inédit et un remix pour clôturer la compilation, qui finit forcément moins bien qu’elle n’a commencé.

On ne la conseillera pas vraiment, au contraire des deux premiers albums. Surtout que sue la longueur, c’est très bourrin et difficile à avaler. Mais j’avoue, avant de l’écouter, j’avais oublié Garbage, et je n’aurais pas du, ils me rappellent quelques bons souvenirs. Ils ne laisseront pas de trace indélébile dans l’histoire du rock, ceci dit.